mercredi 16 août 2006

La Vue

Il y a 15 ans, longtemps après cet accident de voiture où nous fûmes, moi et mes compagnons d’infortune, ramassés à la petite cuiller au fond d’un canyon ibèrique, je rêvai que mon père subissait une tragédie analogue. Sortant par miracle d’un désastre routier, il m’annonçait le terrible drame en vacillant dans son peignoir de convalescent. Soucieux de me faire compatir à sa souffrance, au mépris de sa pudeur et de sa fierté, il écartait alors prudemment les pans de sa robe de chambre, et me laissait entrevoir la sinistre vérité : dans l’accident, son sexe avait été tranché à la base et était profondément enfoncé dans son anus. Troublé par cette mutilation mortifère, je me réveillai derechef et narrai immédiatement ce songe à ma femme, qui dans les limbes d’un demi-sommeil, me répondit en maugréant "mmmmhgrmbl... c’est normal, ton père c’est un auto-enculé", puis elle se tourna de l'autre côté, et se rendormit aussi sec.
C’est depuis cette nuit d’épouvante que je sais que ma femme dispose de la Vue, qui la dispense de toute pratique spirituelle.


Commentaires

  1. Mwhahaha ! Là c’est pas possible, tu nous fais marcher ! ;-) ))
    En tous cas, c’est le rêve le plus rigolo que j’ai jamais lu. Et comme le disait Corneille, le vrai n’est jamais vraisemblable. Ou un truc comme ça. Ou bien il l’a pensé très fort.
  2. Je retombe ici suite au lien placé dans ton dernier post. En fait si on y voit clair, on voit que les gens ne font que s’auto-niquer. Avec l’ami de ma mère l’autre jour, à un moment il était de tellement mauvaise foi que je me suis dit “Tu peux tjs essayer de me mentir, mais à toi tu ne peux pas mentir et la vérité va te revenir en pleine gueule, d’autant plus fort que tu la nies maintenant”. Et à la fin du repas, alors qu’on n’en parlait plus, il a soudain reconnu piteusement que le bonheur matériel était bien superficiel - après avoir juré dur comme fer qu’il était bien réel, et suffisant.
    C’est évident pour moi qu’il se sentait super mal de son mensonge au moment même où il mentait (fallait voir comment il tordait sa serviette), et que c’est ce malaise qui l’a obligé à avouer la vérité finalement. C’est ce que j’appelle s’auto-niquer.
  3. il a de la chance d’avoir osé l’admettre à la fin du repas, nous connaissons tous des gens qui même à l’approche du trépas reculent devant les évidences… merci à l’effet-boomerang de l’auto-nication quand il nous invite à éviter de perdre du temps avec les mensonges.
  4. quelques méthodes éprouvées d’auto-nication (il met en référence Watzlawick qui en avait très bien parlé dans les années 70)
    http://fredericjoignot.blog.lemonde.fr/2007/12/08/autosabotage-galere-garantie-2/
  5. Tiens dans le sous-titre de ton blog, tu pourrais ajouter “auto-nication(R)”, à côté d’auto-addiction(R).
  6. ben justement je ne me sens pas de privatiser le terme auto-nication® qui me préexistait et qui me survivra, cf Watzlawick (même pour “auto-enculé” que je n’utilise quand même pas tous les jours, je verse des royalties à ma femme) alors que auto-addiction®, même si tu m’as aidé, je sens bien que c’est mon bébé et que personne ne va le réclamer… et puis mes capacités à me nuire ont elles aussi leurs limites.

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