mercredi 30 janvier 2013

Une version améliorée de la tristesse

Honoré par mon absence persistante comme une puissance quasi-tu-t'es-vu-quand-tutélaire sur un forum consacré à la dépendance sexuelle, je condescends parfois à m'y tremper l'Anouilh, pour glisser une suggestion à un déshérité.
Je suis trop bon.
Ce matin l'un d'eux cite le bon docteur Lowenstein, auteur du roboratif "ces dépendances qui nous gouvernent", à propos de ces foutus circuits de récompense à mèche courte dans le cerveau primaire (dopamine et endorphine), qui ont leur chic pour court-circuiter le cerveau cortical.

" L'enfant que nous avons tous été  éprouve le besoin dès son plus jeune âge d'être regardé, aimé, valorisé par ses parents. De recevoir une attention bienveillante, de la reconnaissance et un soutien ferme et inconditionnel de leur part, afin de construire son identité et gagner une certaine confiance en soi .... S'il a manqué de ces témoignages (absence de mère, père trop autoritaire, violent, incapable de rassurer l'enfant ...) et que cette situation s'est prolongée à son adolescence, l'adulte qu'il deviendra risque de souffrir d'une insécurité affective. L'auteur classe alors les "insécures" en 2 catégories : les "insécures détachés" qui veulent anesthésier ce passé, les "insécures préoccupés" qui vont accentuer l'émotionnel. L'adulte affectivement déficitaire risque alors de devenir dépendant affectif ... L'autre (et en particulier le compagnon ou la compagne) devient celui ou celle qui réglera les problèmes de l'enfance, on recherche la mère ou le père que l'on n'a pas eu. S'il ne parvient pas à combler ses manques avec l'autre, il trouvera d'autres moyens pour échapper à ses souffrances, en particulier tout ce qui peut le rassurer et lui donner l'impression d'une attention bienveillante. Dans le cas des "insécures préoccupés", l'individu recherchera l'hyper-activation émotionnelle. (et c'est le cas de le masturbation compulsive qui engendre des phénomènes biochimiques amenant à  cette sensation de plaisir et de satisfaction).

Beaucoup d'entre nous ont été des bébés Lowenstein avant de basculer dans le Frankenstein... 
Tous ces enfants qui demandaient de l'amour et n'ont reçu que des cailloux, "Love and Stein", en anglais-allemand, et qui en concluent un peu hâtivement que le plus simple, c'est encore de s'en frapper eux-mêmes à coups de conduites compulsives.
Est Cyrulnik qui peut.
Quand ils ne caillassent pas leurs gosses, pour ne pas rompre le grand lien de l'attachement, qui comme chacun sait, pend dans le vide.
Avec en plus la satisfaction logique de pouvoir se dire "ça fait plaisir à papa, maintenant je fais le boulot tout seul", je n'invente rien, c'est du vécu. 
Et mes doigts courent tout seuls sur le clavier, guidés par l'esprit qui souffle où il veut, bon ou mauvais selon le coefficient des marées en vigueur à Perros-Guirec, tandis qu'en sous-main l'ego s'en attribuerait bien les mérites, le petit coquin.
Heureusement que, plutôt que de diviser les pensées en "bonnes" et "mauvaises", le bouddhisme nous suggère de les classer en "habiles " et "malhabiles", tiens.
Ca en a sauvé les miches à plus d'un.

Du coup, un pote m'envoie ça :


Research supported by the National Institute on Drug Abuse (NIDA) has demonstrated that the addict's brain changes once addiction has been established. In one study, researchers assembled two groups of people : one group with a history of cocaine use who were in recovery and one group with no history of drug abuse. Each subject was given a PET scan that generates a computer image of the areas of the brain that are absorbing glucose, which reflects which areas of the brain are active.
In the first phase of the study, researchers showed the subjects a video of a hummingbird. In the next phase, they showed the subjects a video of drug-related paraphernalia. In both phases, researchers performed brain scans and collected images. The results revealed that a part of the brain called the amygdala lit up when the recovering drug addicts watched the drug-related video but was inactive when they watched the other video. The amygdala is part of the reward center of the brain. The amygdala did not light up when subjects who never used cocaine observed the drug-related video. This study and numerous others clearly demonstrate that the addict's brain is different from the normal person's brain. Once the brain has been changed by addiction, it is changed forever.
This research supports what has been said for many years in the substance-abuse field: addiction is like a tiger lying in wait for its prey. Unfortunately, we are the prey! The tiger is extremely patient as it waits for the optimal moment to pounce on its unsuspecting victim. It is well camouflaged with denial, minimization, rationalization, and other psychological defenses, so it is hard to distinguish the menace from its surroundings. It is extremely powerful arid can kill or maim with its first strike, especially when the addiction is to methamphetamine or cocaine. Its stealth makes it hard to identify as it is sneaking up and preparing to attack. Addiction is cunning and baffling. Many times its victims do not know they are being stalked until it is too late.What makes matters even worse is that our opponent—our addiction—knows everything about us. It is a part of us; it has all the intelligence, capabilities, insights, and knowledge that we possess. It's like we are in a life-and-death struggle against a clone. Our disease anticipates our every move. It understands our strategies. It knows our strengths and weaknesses.
From this discussion, we can see why recovery is so difficult and elusive, and why so many people struggle to get well. I have seen figures that indicate that 80 percent of newcomers relapse in their first year.
It is imperative to begin recovery with surrender. We cannot defeat addiction in the traditional sense. The solution begins with a paradox: victory is achieved through surrender, not in battle.
When we totally and unconditionally surrender, which means that we accept our total and complete powerlessness over our addiction, we begins to build a solid foundation for recovery. If we surrender, our disease loses its control over our life. It doesn't disappear. It doesn't go away. It never goes away! it merely recedes into the background. Yet it's always there, like that tiger, waiting for when we have a lapse in our spiritual program, when we are feeling down and out because we have just gotten into a bitter argument with our spouse, or when we have received a special recognition at work and feel that we deserve to celebrate. It will act on any opportunity to regain control of our life. The stronger our recovery, the more subtle and insidious are addiction's efforts to sabotage us. Beware!
Now let's use this discussion of addiction to understand self- destructive behavior. llse first thing to consider is whether our disease is once again trying to establish a foothold in our life. It may be setting us up in order to take charge and again run the show. Remember, it is always looking for that opportunity to convince us to return to drinking or using other drugs.

Ce qui est une figure imposée et une posture assez en vogue dans les milieux des 12-steppeurs, et comme ça fait déjà une semaine que le feu couve sous la casserole du blog, je lui réponds que nous établissons plein de subterfuges pour échapper à cette vérité apparemment insoutenable :
de la naissance à la mort, nous sommes indiciblement seul (c'est pourquoi j'ampute le s) dans notre pyjama en peau. Que l'alcool et le porno se révèlent de piètres anxyolitiques, parce qu'ils finissent par outrepasser leur fonction et par nous crever (tout court, ou alors juste le foie, ou les yeux, et nous faire péter la tête, alouette) parce que la fonction du mensonge est de nous contraindre à en sortir, fatalement, au bout d'un moment, et c'est tant mieux.
La prison qui n'a qu'un seul barreau, et on finit par en avoir fait le tour.
Alors, les questions antérieures à l'addiction reviennent se poser comme cendres de papillons sur l'oreiller : tout plutôt que la solitude, tout plutôt que la liberté et la responsabilité de donner un sens à sa vie.
Heureusement que l'abstinence continue ramollit le(s) barreau(x), permet de passer la tête, puis un bras, puis l'autre (celui qui était fort occupé à ne rien vouloir savoir et à donner du fil à re-tordre...) 
L'abstinence, c'est le béaba du "ne-pas-faire" pour ceux qui n'en finissent pas de repiquer la maternelle.
Si je bouge de là, si je lève le coude ou si je commence à dégrafer mon ceinturon devant mon ordinateur, comme un vrai cow-boy fraichement arrivé en ville et qui se dit qu'il va se taper une cyberpute au saloon parce que ça fait 3 mois qu'il est dans le désert depuis trop longtemps, et que les vaches ça va bien un moment mais qu'elles ont une conversation somme toute limitée....
Un jour à la fois.
D'autant plus que pour avoir tiré une taffe sur un tarpé il y a 2 semaines, me revoici la clope au bec à 6 du mat, tremplin assuré vers l'humilité.
Et que ma seule filleule en AA (qui a ensuite trouvé son équilibre en NA) se retrouve à nager dans des eaux troubles après 12 ans d'abstinences continues, et me dit que l'obsession ne l'avait jamais quittée et qu'elle en avait marre que ça lui prenne la tête.
C'est ça le plus dur à trouver, l'équilibre entre prudence et névrose obsessionnelle.



Le journal de Spirou a bien changé.

dimanche 27 janvier 2013

Encore des éléphants



Avant de devenir une machine hydraulique de 45 tonnes qui arpente quotidiennement les nefs Dubigeon, l'éléphant de Nantes a été une idée sur une feuille de papier.
C'est pourquoi il ne faut pas négliger le pouvoir des rêves.

samedi 26 janvier 2013

Pourriels et réincarnation

J'aime les spams, surtout quand c'est des gens qui m'aiment qui me les envoient, me prouvant ainsi que j'existe.
J'ai reçu ceci :

Deux bébés discutent avant leur venue au monde, sur le délicat sujet de la vie sur terre...
- Bébé 1 : Et toi, tu crois à la vie après l’accouchement ?
      

- Bébé 2 : Bien sûr. C’est évident que la vie après l’accouchement existe. Nous sommes ici pour devenir forts et nous préparer pour ce qui nous attend après.
      
  
- Bébé 1: .. tout ça, c’est insensé. Il n’y a rien après l’accouchement ! A quoi ressemblerait une vie hors d'un ventre ?
    
  
- Bébé 2 : Eh bien, il y a beaucoup d'histoires à propos de "l'autre côté"... On dit que, là-bas, il y a beaucoup de lumière, beaucoup de joie et d'émotions, des milliers de choses à vivre... Par exemple, il parait que là-bas on va manger par notre bouche.
     
  
- Bébé 1 : Mais c’est n’importe quoi ! Nous avons un cordon ombilical et c’est ça qui nous nourrit. Tout le monde le sait. On ne se nourrit pas par la bouche ! Et, bien sûr, il n’y a jamais eu de revenant de cette autre vie... donc, tout ça, ce sont des histoires de personnes naïves.
La vie se termine tout simplement à l’accouchement. C'est comme ça, il faut l'accepter.
      
  
- Bébé 2 : Et bien, permets-moi de penser autrement. C'est sûr, je ne sais pas exactement à quoi cette vie après l’accouchement va ressembler, et je ne pourrais rien te prouver. Mais j'aime à croire que, dans la vie qui vient, nous verrons notre maman et elle prendra soin de nous.   
- Bébé 1 : "Maman" ? Tu veux dire que tu crois en "Maman" ??? Ah ! Et où se trouve-t-elle ?
     
  
- Bébé 2 : Mais partout, tu vois bien ! Elle est partout, autour de nous ! Nous sommes faits d'elle et c'est grâce à elle que nous vivons. Sans elle, nous ne serions pas là.
     
  
- Bébé 1 : C’est absurde ! Je n’ai jamais vu aucune Maman donc c’est évident qu’elle n’existe pas.
    

- Bébé 2 : Je ne suis pas d’accord, ça c'est ton point de vue. Car, parfois lorsque tout devient calme, on peut entendre quand elle chante. On peut sentir quand elle nous caresse. Je suis certain que notre Vraie vie va commencer après l’accouchement.     
De la, ……… rejoint ma pensée, nous ne sommes que de passage sur terre et que notre vraie vie est dans l'autre monde,  ici bas nous sommes à l'école de la vie, nous sommes en stage ...
En fonction de sa foi, on peut y réfléchir.

Ce genre de message s'adresse à la sensibilité plus qu'à la réflexion.
Comment intérioser les menaces du patronat, autrefois du clergé, sinon en dévalorisant les conditions d'existence qui nous sont faites ici, sous prétexte que nous sommes en stage, qui rime avec chantage ?
Néanmoins, je poste celui-ci, qui fournit l'occasion d'un changement de point de vue inédit.



vendredi 25 janvier 2013

Onfray mieux d's'abstenir quand on a mauvais Allen


En décembre, j'ai eu cet échange avec un ami, que je croyais savoir en relation avec une femme deux fois moins âgée que lui.
Quand j'étais jeune, franchement je ne voyais pas ce que les vieux nous trouvaient.
Maintenant, je vois mieux, et c'est loin d'être fini.
En fait, j'avais mis en garde un autre ami contre les jeunettes, bonnes à épuiser les quinquas, ce dont il n'avait apparemment cure, et qui avait déclenché l'amusement de mon premier ami, qui m'avait alors révélé sa relation naissante avec une jeunette.
Ce qui prouve (je parle pour moi, bien que j'aie l'air de parler pour lui : comme je l'explique plus bas, ce gars je crois qu'il a gardé assez de bonté pour mériter le bonheur, ce qui est loin d'être mon K. ) qu'on peut être moraliste de haut vol et complètement demeuré dès lors qu'il s'agit de recueillir les fruits nés de son propre esprit.
Poil aux fruits qu'on fit.
Bref, fin décembre, je reçois ça :




LJ : "Salut à tous,
voici une proposition originale pour ceux qui n'ont rien de prévu  pour le vendredi 28 12. Pouvez-vous faire circuler l'info autour de vous? Merci.
En espérant vous y retrouver,
Bonnes fêtes.

JW : Au vu des photos des bretteurs, je mets $10 sur le Lee Van Cleef de l'existentialisme, à droite sur votre écran, qui ne peut que ratatiner ontologiquement le Luc Chatel de l'hédonisme neu-neu qui s'est laissé faire un brushing cata sous exstasy (à gauche sur votre écran)
de plus, la question du jour n'appelle qu'une réponse : oui, au prix d'une ascèse, on peut se libérer des affects, mais après on se fait bien chier en attendant l'amor.
Pas de quoi passer une soirée entre les 2 réveillons !
C'est dommage que je n'habite pas C**, hein ?
J'aurais proposé un cabaret philo travaux pratiques " Kalachnikov et libre arbitre".
C'est marrant, hier j'ai réécouté Béranger, et ce soir paf ! ton mail.
Alors que quand j'écoute Lavilliers, paf ! ma femme me cogne (pas fort, mais quand même…).
Précisions sur le café philo : 
Va surtout pas inviter michel onfray, plus personne peut parler et il laisse des ardoises énormes... ah oui, et puis j'ai l'air de me gausser, mais j'ai récemment découvert philosophie magazine, et c'est très correct comme revue, si tu le vois trainer en salle des profs, n'hésite pas à le tchourer.

LJ : je ne commenterai pas les jugements perfides sur le physique des orateurs: la véritable beauté est intérieure, surtout en hiver...
Rassure toi, on vient de casser avec mon amie. Tout rentre donc dans l'ordre ou plutôt dans le désordre. En vieux guerrier de l'amour je suis partagé entre l'inquiétude sur mes capacités une fois encore à me relever et le constat que ça fait de moins en moins mal de heurter le sol. Mais devrais-je m'en réjouir?
Mais, t'inquiète 2012 c'était l'année de la louse, alors que 2013 sera l'année de la b.....
Biz,
LJ


JW : Courage, mon jaune ami : cinquante ans, c’est le bel âge pour un homme : quand une femme lui dit oui, il est flatté, et quand elle lui dit non, il est soulagé. (David Lodge)
Uh uh uh.
A propos d'être flatté, c'est toi mon maitre étalon en matière d'humour, donc ça me fait tout drôle et pour tout dire (pied de) bicher que mon humour te fasse marrer, il faut croire que tu m'inspires le meilleur de moi-même.
On aurait dû monter un duo comique, je l'ai toujours pensé. 
Maintenant que nous sommes dans notre bel âge, j'y entre moi-même dans 5 jours, et que nous sommes  visiblement dans la pleine maturité de nos talents, peut-être un premier contrat pour se tour-de-chauffer au café de C*** ?
Sinon, pour abonder dans ton sens, le plus dur quand l'être aimé se barre avec les clés du camion de l'Enthousiasme, c'est de regarder ce qui se passe en soi à la levée du jour suivant : le sentiment survit-il à la disparition de la personne qui l'a suscité ?
Si oui, alors c'était pas une hallu.
Cet enthousiasme.
Sinon, y'a plus qu'à se jeter au premier café-philo venu et payer une tournée générale rien qu'à l'idée d'être guéri d'une infection psychique sans lendemains ...
Parce que si c'est pour se prendre pour le Lavilliers de la rupture amoureuse et finir par se dire que les efforts & salamalecs à fournir pour se mettre de temps en temps une princesse au bout du gland n'en valent pas forcément la chandelle,...
Bref, je crois que nous tenons là un thème qui peut nous permettre de pousser notre avantage au café philo de C**, à condition de ne pas trop forcer sur la limonade.
Tu remarqueras que j'ai totalement éludé le sujet du jour, l'amour, avantages et inconvénients, mais tu n'avais pas commandé non plus mon catalogue d'effets de manche de la Déroute à Roubaixtte...
Si la vie affective et sexuelle des zumins était une méritocratie, je pense que tu serais mieux Loti que Pierre, et que j'irais me tordre dans les flammes de l'enfer égotiste...
mais théories du chaos, hasard des rencontres et blagues pourries du karma en ont décidé autrement.
a+
JW. 

Que ne suis-pas berger au fond de l'Ethiopie ?
Que ne suis-je un Autre ?
Ca fera certainenement l'objet d'un prochain café-philo.


jeudi 24 janvier 2013

Le vrai visage du Dark Knight, sous contrôle d'huissier


D'abord j'ai cru qu'il parlait du dernier Batman, celui dont la sortie a occasionné une tuerie dans un cinéma américain, et qui était loin de valoir qu'on génocide pour (ou contre) lui, et puis non, c'est bien le Dark Knight de 2008 dont il cause, celui que je trouvais assez réussi ... voilà qui me réconcilie avec la critique cinéma, petite coterie souvent trop consensuelle dans son jugement, bien qu'avec Allociné on puisse se faire un panel express d'opinions divergentes et se décider sur une formule qui emporte l'adhésion ou suscite une légitime méfiance, surtout les soirs où je doute de la validité de toute fiction à dire quoi que ce soit d'intelligible, sans parler de ceux où, partant droit vers l'orage, j'avais oublié le mien.
Hier soir, pendant l'hémorragie silencieuse et post-opératoire de ma gencive mutilée qui dégorgeait de gros caillots de sang aggloméré et laissait suinter son filet de globules rouges et salés au fond de ma gorge, je me suis franchement marré, dans mon lit avec notre Ipad® à recouper le style fluide, cinématographiquement culturé sans en rajouter de "il a osé", en fait un tandem, son envie de faire partager ses choix et ses aversions, qui renvoie parfois l'ascenceur à l'odieux connard de service, et je les en remercie, puisque je m'étais fait enfler, et pas que la mâchoire, par Télérama, pour aller voir Loopers lors de notre escapade parisienne fin décembre, "une rêverie sur l'enfance pleine d'étrangeté, sombre et brillante (…) pour le spectateur, c'est l'innocence retrouvée, grâce à la fraîcheur du regard d'un cinéaste avide de nouveauté, aussi audacieux que franc-tireur." et que j'ai bien fait de ne pas y trainer ma compagne et ma fille, qui auraient ajouté ce navet à la courte liste des attentats cinématographiques que je leur ai dégoupillé sous les yeux en me faisant sauter avec au passage.
Ils sont jeunes, obsédés de mauvaises blagues et de bon cinéma, et ça fait quand deux bons blogs à la rubrique "que télécharger ce soir".

lundi 21 janvier 2013

Ecrivain raté : plus qu'un métier, une passion

Finalement, écrivain raté, je vais laisser ça aux professionnels de la profession.
J'en reviens pas que  Môrice Dantec, après des débuts intéressants (Les racines du mal ne tenait pas ses promesses, proclamées dès la préface sous forme de bibliographie babylonienne, mais secouait quand même son lectorat), qui écrit depuis lors une bouillie infâme qu'on dirait sortie d'un process de méthanisation d'ordures ménagères, parvienne à faire autant de buzz sur son nom.
Trop de drogues, trop de folie, trop d'acharnement à aller fouailler du côté obscur, et à agiter rageusement son bâton merdeux dedans. 
N'est pas Ellroy qui veut.

Edit : en farfouillant un peu hier soir bien au chaud, au lit avec notre nouvel Ipad, je découvre l'étendue des capacités d'auto-destruction de Dantec, c'est dantesque
Il est certain que j'ai trouvé mon maître, et je jure que j'en prends de la graine, et que j'en laisse des feuilles.
Manquerait plus qu'à filmer sa vie, avec Gérard Depardiou dans le rôle, d'ailleurs il apparait, affreusement grimé, dans la bouse qu'a extrait Kassovitz de Babylon Babies... comme si le seul résident de la Villa Vortex, réputée inhabitable et illisible, pliait tous les rayons de lumière qui se penchent sur lui pour l'aider à en sortir !
Reste à comprendre comment il a fait pour soutirer autant de ronds à autant de maisons d'éditions différentes sans jamais pondre LE roman techno-thriller qui lui a été payé plusieurs fois d'avance.
A relire ses avanies dans les deux articles sus-cités, je ne peux que pencher pour l'hypothèse bien conne U du petit Méphisto qui vend son âme au Diable pour la Beauté d'écrire deux premiers romans qui arrachaient bien dans le Landerneau du polar français, puis de passer le reste de sa vie à payer l'addiction...
La force du Dark, quand même...

dimanche 20 janvier 2013

Vieillir

On en a tous soupé de la fin du monde, sauf moi.
J'ai eu 50 ans.
Je ne me suis pas vu vieillir, mais quand je regarde la photo, je ne peux que constater l'accumulation des rides, et pas forcément celles de la rigolade.
50 ans, pour un nombrillidé comme moi, c'est un peu la fin du monde. D'autant plus que je n'ai même pas réussi à concrétiser mes rêves les plus secrets, et qu'il devient malaisé de me faire accroire que j'en ai 30 de moins, car des rêves de cette ampleur, c'est à 20 ans qu'il faut les planifier puis mettre patiemment en oeuvre les moyens habiles qui amèneront à leur satisfaction : devenir un écrivain raté, coucher avec une femme noire.

Je pense même que dans cette vie-là, c'est un peu baisé, bien que je continue à me dire que n'est pas pauvre qui désire beaucoup.
Tout a une fin, même ce qui n'a pas toujours eu de début discernable à l'oeil nu.
Pourquoi l'écrivain raté ?
Ecrivain parce qu'en créant des mondes, on jouit de l'illusion d'échapper à la condition de mortel.
Raté parce que ça ne peut que foirer, et pas que vers la fin, quand plus personne ne vous lit.
Et pourquoi vouloir cesser d'être mortel ? Heureusement qu'on meurt, putain de moine, et qu'une fois le vase brisé, tout l'air contenu dedans regagne l'atmosphère.
Enfin je peux toujours essayer me refaire ici, mais je n'ai plus guère le temps d'entrer en littérature autrement qu'en attentif lecteur.
La lecture, cette geekerie préhistorique, c'est a dire datant d'avant la télé et l'ordinateur.
D'ailleurs, pourquoi jalouserais-je cette aptitude à créer des mondes par la plume ?
Au moins, j'ai cessé de vivre dans un roman de Houellebecq, c'est déjà pas mal.

Pour ce qui est des femmes noires, je peux me l'accrocher.
Ou plutôt la laisser partir, en lui souhaitant bon voyage.
Et alors ?
Dans les faits, vu les démons auxquels je me suis frotté, je crois que je ne mesure pas la chance que j'ai eue, et que je continue d'avoir dans mon parcours de vie. Merci qui ? Si je fais encore de l'oeil à certains précipices thiéfainesques et simule le vertige au bord du trou fumant, il s'agit plus des vestiges d'une complicité contrainte du fait des années de captivité en leur compagnie que d'une réelle sympathy for the debvils, et il s'en faut pour l'heure que je trébuchasse devant et choyiasse dedans.
Nonobstant, j'ai eu droit fin décembre à un clin d'oeil du destin. Papa nous envoie alors un message enthousiaste : sa nouvelle amie, soi-disant rencontrée après la mort de maman, vient d'être grand-mère. 
Il nous communique même son numéro pour qu'on lui envoie des SMS de félicitations. Ca me surprend, mais pas tant que ça. 
Cette femme que nous n'avons rencontrée qu'une fois et qui garde une distance prudente avec la famille, que papa ne nous présente d'ailleurs que très parcimonieusement, au demeurant charmante & classieuse au point qu'on peut se demander ce qu'elle lui trouve, s'attendrait à ce que nous la congratulassions comme si nous étions de vagues neveux ou beaux-fils d'occasion ? Papa a dû paumer un joint d'étanchéité émotionnelle, il a souvent connu des bouffées de positivisme délirant, rarement  suivies d'effets.
Renseignements pris, le fils de la dame en question a 40 ans, vit en Afrique, et vient bien d'avoir un enfant avec une blackette de 20 ans, et la grand-mère trouve ça moyen-moyen au niveau de la différence d'âge, oui
J'ignore ce qu'elle pense de la couleur. Les métis sont vraiment des enfants de l'amour : selon la société dans laquelle ils vivent, leurs parents prennent quand même le risque que leur enfant soit ostracisé des deux côtés : trop blanc pour les noirs, trop noir pour les blancs.

Aaah moi aussi quand j'avais 40 ans je suis été en Afrique et j'ai pété les plombs pour une jeune femme de couleur, et je lui aurais bien fait un enfant aussi si je n'avais été retenu par les liens du mariage et un certain réalisme, qui consistait essentiellement à me rendre compte que cette histoire de nouveau départ c'était juste une projection de ma part, simplement parce que je n'étais qu'un champignon de Paris qui avait pris un coup de soleil sur la cafetière, plus habitué à errer dans les caves du Destin en s'interrogeant sur l'embranchement à prendre qu'à faire le kéké en motard ravageur de l'Afrique subaustrale, circonstances assez radicales sur les joints d'étanchéité du carburateur émotionnel, et pas insensible aux charmes déployés par ces indigènes d'un naturel débonnaire, rieuses et manifestement moins inhibées que moi, avec qui le changement ça serait maintenant.

Et je ne peux même pas féliciter ce demi-frère d'occasion (le fils de l'amie de mon père) que je me suis vu octroyer par indiscrétion paternelle, d'avoir su aller au bout de son idée et de son engagement : se tremper la quéquette néocoloniale est une chose, fonder une famille à partir d'un couple mixte en est une autre.
A l'époque, je suis rentré d'Afrique avec tout dans la tête et rien dans les mains, me sentant coupable au-delà du dicible, n'ayant péché qu'en pensée mais c'était déjà trop : me constituant prisonnier d'un crime non encore commis, je n'ai réussi qu'à me faire interdire de nouveaux voyages en solitaire. 
Rions.

D'autant plus que selon notre envoyé spécial en Guinée, "L’économie libidinale n’est à Conakry qu’un lien social dégénéré bien que délibéré ; une sorte d’avatar hypocrite de la relation drague homme / femme en Afrique de l’ouest. S’il paraît si normal aux fifilles, (aux poupées à longues jambes et entrejambes prometteurs) de recevoir - comme un dû -, tant de présents, c’est que quelques imbéciles, qui s’étaient fait des sous de manière indécente aux bons temps de la dictature du Général Conté, avaient inondés ces demoiselles de téléphones portables, de minijupes, sous-vêtements et talons hauts, ainsi que des parfums de marque, quand , pour les plus belles, ce n’était pas des Rav4 Toyota, (très utiles pour se faire sucer par les plus prometteuses d’entre elles.) Ces pratiques, (couplées à des rituels de griots vieux de plusieurs siècles) se sont finalement vite propagées à Conakry et sont passées pour ainsi dire, dans le mode relationnel des relations de drague si ce n’est de couple.
Ce qui gênerait en occident, - tant il paraît évident que les rapports d’argent pour s’attirer les faveurs d’une femme dont on cherche la vertu d’une relation suivie, est vulgaire -, va ici quasiment de soi !
C’est une culture vraiment différente et prompte à se propager par la survie imposée en pays pauvre. Le premier des métiers c’est…
Comme tu en fais si bien la remarque, il semble que dans la dépendance il n’y ait pas de rencontre de «l’autre », rien qu’un rapport égoïste à Soi en instrumentalisant le « baisé » qui devient littéralement un
objet sexuel et rien de plus…mais oh ! c’est terrible ! Quel vide ! La dépendante est soumise aux même tracas que le dépendant mâle semble-t-il : leur séduction est le produit infantile d’émotions perpétuelles, tout est sexualisé, n’importe quel homme rencontré devient une proie potentielle avec envie « de se le faire » ; et cette séduction dont les règles sont imposées aux autres n’est que la somme de nœuds émotionnels de l’enfance jamais résolus. Il s’agit là de fuir la réalité, toujours la fuite comme point central des dépendances."

Et puis, la Beauté ne se mange pas en salade, à moins d'être un loup, un prédateur.
Et moué, je serais plutôt né l'année du Mouton de Métal (hurlant).
Bêêêêê.



Depuis quelques mois, souterrainement hanté à l'approche de mon demi-siècle qui allait enfin sonner le glas de l'adolescence et me contraindre à solder mon déficit d'aventures pour ne pas sombrer plus avant dans l'indignité morale, je me suis aperçu que je mimais une forme subtile de décrépitude intellectuelle, comme pour m'y préparer, encore de l'anhédonisme là dessous si vous voulez mon avis.
Je tentais d'anticiper l'inéluctable, ce dont il n'a franchement nul besoin, en tout cas pas comme ça, pas celui-là.
Là encore je n'ai réussi qu'à inquiéter mes proches, qui ont cru que je virais neu-neu.
Pas question de leur avouer que c'était à moitié expérimental, et complètement à côté.
J'ai jusqu'à présent été bien plus apte à me projeter dans le passé que dans l'avenir.
Depuis mes 18 ans et l'écoute trop attentive pour ne pas être désastreuse de la chanson "les Vieux" de Brel, je souffre de crainte 
1/ raisonnée : le temps finira par me transformer en viande froide, et là plus question de regretter ma jeunesse, donc j'avais bien raison de le faire de mon vivant, comme j'ai pu le comprendre en me gargarisant des plus affreuses chansons de Gérard Manset, mais nul réconfort n'est à attendre de cette compréhension qui m'a pris un peu jeune
2/ irraisonnée : y'a une fichue pyramide de névroses et de dépressions familiales avec son bout pointu s'enfonçant plus hardiment dans mes dorsales avec les années,  malgré des traitements divers et variés
et il me reste de moins en moins de temps et d'énergie pour y faire face.

Comme d'habitude dans ces cas-là, j'en conclus qu'il ne me reste plus qu'à chercher refuge sous les ailes poilues des archanges laïcs de la méditation Vipassana en gratouillant des accords toltèques sur ma guitare monocorde, pour évacuer ce radotage que je pensais avoir déjà laissé derrière moi.
Mais ne serait-ce là qu'un fantasme de plus que je caresse ?
La peur n'empêche pas le danger.
Bonne année à tous et à toutes.


Edit : suite à la parution synchrone de l'article "Rajeunir", je me vois contraint de retitrer cet article.
c'est un sale boulot, mais il fallait que quelkon le fisse.