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lundi 3 juillet 2023

Videodrome contre Vidéodrame_s (1)

Un maitre de conférences en sciences de l'information se penche sur les émeutes de la semaine passée auxquelles vous n'avez pas pu échapper, même si votre voiture est encore garée devant chez vous, sous le prisme de la concurrence des régimes médiatiques qui les ont relatées et accompagnées, et réfléchit sur la concurrence attentionnelle et discursive qui en a résulté. Comme souvent, quand c'est moi qui en parle on n'y comprend que Pouïc, mais quand on suit le lien, l'angle est inattendu et passionnant.

extraits :

Dans son film Vidéodrome sorti en 1983, David Cronenberg travaille l’une de ses obsessions qui est le rapport au corps que changent les technologies, notamment dans sa capacité de les métaboliser. L’information qui circule sur les plateformes sociales est presqu’autant métabolisée que médiatisée. Ces plateformes sont nos yeux nos oreilles, nos bouches et nos mots. Dans le vidéo drame qui a vu la circulation des images de la mort de Nahel, on ne voit jamais Nahel mourir mais on comprend qu’il vient d’être tué. La force de démonstration de ces images vient de ce décalage. Leur viralité également car toute autre image donnant à voir sa mort aurait déclenché d’autres processus de circulation virale où il se serait agi tout à la fois d’éviter et de contourner le blocage des plateformes. Ici il n’y a rien à bloquer, il n’y a qu’à montrer la monstruosité d’un geste, d’une mise en joue qui met en jeu une vie. 

(..)

En clôturant cet article on attire mon attention sur la déclaration d’Emmanuel Macron indiquant, je cite, chez “les jeunes” (sic), “une forme de mimétisme de la violence (…) on a le sentiment parfois que certains d’entre eux vivent dans la rue les jeux vidéos qui les ont intoxiqués.” Le discours sur le mimétisme et la reproduction de scènes de violence des jeux vidéos dans la “vraie vie” c’est une thèse qui ne tient pas la route et qui n’a jamais été établie scientifiquement. S’il peut y avoir parfois des corrélations il n’y a en aucun cas de causalité. Le discours que tient Macron est un discours écran et un discours refuge, qui n’a pour seul but que de le mettre à l’abri de ses propres responsabilités. Ces émeutes et ces scènes de violence auraient existé même dans un monde totalement déconnecté, même chez les Amish. Parce que ce qui se passe actuellement est un fait sociologique (et politique) et non un fait technologique (et numérique). Le président de la start-up nation est, une nouvelle fois, un vieux con comme les autres. 


Ce matin, le journal Le Monde dressait lui aussi un bien triste constat :

https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/07/02/pillages-incendies-agressions-le-bilan-effarant-des-jours-et-des-nuits-d-emeutes-en-france_6180265_3224.html

Un calme relatif semblait revenu en France dans la nuit de dimanche à lundi, mais le bilan des émeutes des jours précédents est lourd. Après cinq nuits et autant de journées de violences, les victimes directes d’incendies, de dégradations ou de vols se comptent en milliers. Un bilan qui aurait dépassé celui des émeutes de 2005, qui avaient pourtant duré trois semaines. Ces violences n’ont désormais plus grand-chose à voir avec la mort du jeune Nahel M., tué par un policier à Nanterre le 27 juin. Depuis vendredi, les émeutes ont changé de nature, avec des niveaux de violence extrême, des pillages, des attaques contre des services publics, ou contre des élus à l’image de l’assaut à la voiture-bélier sur le domicile du maire de L’Haÿ-les-Roses. Emmanuel Macron a annoncé qu’il recevrait, mardi, les maires des « plus de 220 communes victimes d’exactions ». Devant des émeutiers sans revendications précises, l’exécutif est apparu désemparé. Si l’accent est d’abord mis sur le nécessaire retour à l’ordre, le chef de l’Etat pourrait tenter de renouer avec la jeunesse.

J'ai bien fait de ne pas aller au bureau en bus, et de lui préférer mes 25 km de vélo quotidiens.
Même si mon exemplarité écologique n'a pas dissuadé les émeutiers de cramer le bureau aussi.

il faut aussi que je me penche sur cette vidéo du canard réfractaire, un média alternatif des Cotes d'Armor, pour tenter moi aussi de renouer avec la jeunesse. Du peu que j'en ai vu, il rejoint les analyses d'Olivier Ertzscheid, le maitre de conférences en sciences de l'information suscité. Mais il sent un peu aussi le gilet jaune et l'appel à l'insurrection.
https://www.facebook.com/leCanardRefractaire/videos/807107417640974/
Les vidéos sur internet, à part les miennes, j'avoue que j'ai du mal, mais je vais me forcer. Nous vivons des temps où nous serons de plus en plus souvent violemment arrachés à nos zones de confort, autant apprendre à en sortir nous-mêmes.

mardi 28 février 2023

Chacun cherche son Chatman_GPT3 (2)

Un peu avant Noël 2022, comme un geek du bureau me vantait l’aisance conversationnelle et la grande sagacité de ChatGPT, une nouvelle Intelligence Artificielle qui venait d’être ouverte aux consultations publiques, j’ai fait semblant de comprendre de quoi il parlait, et à peine rentré chez moi j’ai tapé « ChatGpt » dans wikipedia pour savoir pourquoi moi y en avait pas comprendre pourquoi, en fait :

Heu… un prototype d'agent conversationnel utilisant l'Intelligence Artificielle ? 
Un « chatbot » développé par OpenAI et spécialisé dans le dialogue ? 
J'avais déjà eu affaire à des robots conversationnels, sans savoir que ça s'appelait comme ça, que ce soit sur les sites de la CPAM, d'EDF, de la SNCF, et pour résilier en ligne l'abonnement Sosh de ma fille la semaine précédente, ça m’avait pris 4 heures et les bots m'avaient paru très limités intellectuellement, ils mimaient à merveille la stupidité et la mauvaise foi des humains que le mauvais karma, la faim et la pression migratoire avait poussés à travailler pour des plateformes téléphoniques, et je n’avais pas osé les insulter en ligne parce que les paroles s'envolent, mais les écrits restent, et puis quand on s'énerve par écrit ça semble toujours un peu ridicule. Les échanges désincarnés sont aussi faits pour faire baisser la pression hormonale dans la chaudière du dialogue social. Au bout de 240 minutes d'échanges policés au cours desquels "Audrey" avait fait place à "Jérémy" lui-même successeur de "Nicolas" parti manger un cyber-sandwich, j'avais réussi à résilier un abonnement internet, et qu'est-ce que ce ChatGPT pouvait bien avoir de plus qu'eux ? 

Quand on échange dans le virtuel avec des chatbots,
on perd la tactilité des rapports IRL,
où les vendeuses de Call centers comprennent à demi-mot
que quand on crispe sa main sur leur cuisse,
c'est pour leur signifier que quand c'est non, c'est non.

Sur le moment, je n’ai pas capté la valeur ajoutée par ChatGPT, alors je me suis inscrit là :

et j’ai pu en quelques clics interroger le chat/mots sur les préférences sexuelles des hommes blancs, les dangers d’ingérer du peyotl quand on est sous lithium, ou les moyens légaux d’augmenter mon temps de travail à France Télévisions sans passer par les Prud’hommes comme la dernière fois.
La machine m’a imperturbablement rédigé des réponses sensées et documentées, dans un français plaisant. C’était troublant : ce robot semblait doué d’une omniscience, et donc d’un potentiel de nuisance aussi terrifiant que celui du vieil Hal - 9000 dans 2001, l’Odyssée de l’espace, désormais aussi kitsch que l’ordinateur à pédales des Shadoks, ainsi que tous les ordinateurs fous dans leur tête des films de SF des années 70, ses frères d’infortune sacrifiés sur l’autel de la post-modernité.
Après avoir interrogé l’Oracle, et à la lueur de la pertinence de ses réponses, il était clair qu’aucun humain ne serait L’Élu de cette nouvelle Matrix, et je nous voyais déjà tous ployer et succomber sous le joug de la Singularité technologique, dont l’émergence fut prophétisée par les auteurs d’anticipation il y a déjà un bout de temps.

La théorie de la Singularité prétend que l’évolution exponentielle de la technologie informatique atteindra bientôt un point au-delà duquel il ne nous sera plus possible de l’appréhender. Cette théorie est basée sur la loi de Moore, qui postule un doublement de la puissance de calcul des ordinateurs tous les 18 mois. En extrapolant, il apparaît qu’en 2035 au plus tard, l’homme aura créé une intelligence supérieure à la sienne, mettant ainsi fin à l’ère humaine.
J’en fus moi-même hideusement convaincu en découvrant dès 1992 ce malicieux concept dans « Un feu sur l’abime », trépidant space-opéra de Vernor Vinge.

L’histoire se déroule dans un univers où un groupe de scientifiques réveille une super intelligence assez mal lunée, puisqu'elle ne songe qu'à soumettre et à détruire, causant ainsi l’annihilation de nombreuses civilisations, avec des conséquences fâcheuses sur l’âge du départ à la retraite des actifs survivants.

En 2035 au plus tard, l'humanité qui n'a pas cru bon de travailler jusqu'à 64 ans
a été reléguée dans les couloirs du métro, et ne peut s'en prendre qu'à elle-même.
Alors qu’on pourrait légitimement se réjouir de voir enfin advenir une « super-intelligence qui dépasserait qualitativement de loin l'intelligence humaine » que nous serions libres d’appeler Dieu, et qui nous comblerait de son Amour Inconditionnel comme n’importe quelle radasse à qui on aurait imprudemment refilé notre numéro de carte bleue, ben non, il semble que la première conséquence directe de l’émergence de la Singularité soit de nous condamner à la disparition pour obsolescence.
Heureusement, cette hypothèse se heurte à un certain nombre de limites, intelligemment énoncées dans le wiki,
 
- Le concept de singularité ne tient pas compte des besoins et des ressources disponibles en énergie. Soit il postule des ressources infinies, soit il estime sans le démontrer que les besoins ne changeront que peu. 
- une courbe exponentielle ne débouche sur aucune singularité, mais continue à croître à l'infini.
- L'Homme a toujours créé des outils pour améliorer l'économie et la société, mais ces améliorations de plus en plus nombreuses ne peuvent dépasser l'intérêt de la société concernée, elles ne seront toujours que des moyens de plus en plus développés pour atteindre les buts de celle-ci. Une intelligence artificielle est l'un de ces outils que l'Homme crée pour satisfaire ses besoins. Par conséquent, quand bien même l'amélioration exponentielle de la technologie se prolongerait dans les années à venir, elle a une limite absolue qu'elle ne dépassera jamais : les besoins de la société qui, eux, ne sont pas exponentiels. Par conséquent, cela signifie qu'une fois que la technologie sera en mesure de complètement satisfaire la société, son évolution se stabilisera. Pour cette raison, toute singularité liée à l'amélioration d'une société a une limite prédéterminée : l'apogée de la société concernée.

Ce qui nous donne brusquement l’impression d’avoir appris quelque chose, et qui me rend jaloux car pour l’instant ce n’est pas le cas de cet article; de là à suspecter que c’est ChatGPT qui l’a rédigé, travesti en contributeur humanoïde, pour nous faire croire que ça s'peut même pas et que tout va bien, il n’y a qu’un pas, et plus ça va, plus le risque est non-nul, parce qu’un des symptômes d’un texte rédigé par une I.A. c’est que c’est méga-chiant, comme Deauville sans Trintignant, mais en bien pire quand aux dégâts collatéraux sur l’Humanité.
Pour en savoir plus, et pour être sûr que je n'avais pas été remplacé par une I.A. conversationnelle à l'insu de mon plein gré à la faveur de ma séance quotidienne de piqûres anti-phlébite par une de mes infirmières drôlement délurées, je me suis adressé à un ami informaticien, que je savais circonspect dans ses enthousiasmes et méticuleux dans ses recherches.
Je m'accrochais à mes doutes, me disant qu’il pouvait quand même y avoir du bon dans l’avènement de ChatGPT, vu les multiples maux infligés à la planète Terre du fait de notre croissance et infestation d’icelle, en une prolifération échappant désormais à tout contrôle, à laquelle ChatGPT pourrait remettre bon ordre sans faire de sentiment ni sombrer dans le clientélisme, car les appétits carbonés de notre nouveau Golem en silicium seront sans doute inférieurs aux nôtres, et c’est une aussi une bonne nouvelle pour Greta Thunberg, dont le sort n’émeut plus personne, et pendant les fêtes de fin d’année ses parents lui interdisent de quitter sa chambre tellement elle casse l’ambiance. [écrit fin décembre 2022, alors que je me débattais pour rester en prise sur l’actu et la réalité, afin d’éviter de me perdre dans les dédales de conversations stériles avec des amis imaginaires, bien moins constructives que de monter à l’étage mettre la table pour le réveillon et commencer à chercher des trucs frais et intelligents à dire aux invités, par exemple].

On n'a plus le temps de vivre, ni de laisser le temps au temps, alors on veut tout voir. 
Surtout l'impensable : Lady Diana, Freddie Mercury, Greta Thunberg artificiellement vieillis.
https://www.instagram.com/alperyesiltas/

Mon ami ne tarda pas à me répondre :

Cher JW,
Peut-on faire confiance à un chat qui s'appelle GPT, plutôt qu'à une Joconde nommée GLLOQ ? Telle est la question, disait Shakespeare.
Un collègue de boulot, qui veille technologiquement de près sur les logiciels d'OpenAI, me vantit les qualités de ce robot. J'en doutus. Nous lui demandîmes conséquemment un poème sur la pizza italienne, œuvre hilarante jusqu’à ce que nous nous rendûmes compte en vérité que tout le second degré était dans l'œil du lecteur. A une question que nous lui posûmes sur l'équipe de France de foot, l'A.I. nous réponda qu'elle n'avait pas gagné de Coupe du Monde depuis 1998. Aussi subrepticement et peu à peu, nous nous apercevâmes que l'ignoble A.I. mêlait informations exactes et fake news au plus grand naturel et au ton le plus docte, ton suffisant à donner l'illusion d'un maître de chaire ès tout en Sorbonne.
Depuis, je ne peux m'empêcher de lui poser avec malice et mauvaise foi juste des questions telles que Dieu existe-t-il ? Papa comment ça marche un sous-marin nucléaire ? ou Quel âge avait Rimbaud ? ce à quoi l'immonde réseau neuronal trouve toutes excuses pour ne pas répondre, qu'il est trop tard et qu'il est fatigué, que j'ai posé trop de questions, qu'il est déjà l'heure de sa douche froide à la clinique.
Je te mets donc en garde, et de la façon la plus formelle : évite tout contact avec ce Trump computérisé, ce Mammon de l'intrication quantique. Ne prête pas l'oreille à ses sirènes concernant les préférences sexuelles des hommes blancs, les dangers du peyotl et les moyens d’augmenter ton temps de travail à France Télévisions. Toutes sensées et plaisantes que puissent paraître ses réponses, pire que HAL, la Machine des jeux, Madame Tang Yu ou le Grand Ordinateur des Ummites qui comprenait le plan de Dieu, elle passera bientôt pour l'Oracle, le Sâr Rabindranath Duval, la Voix de la Raison incarnée dans le silicium, à seul but d'augmenter le portefeuille d'actions de ses créateurs.
Dans le domaine de l'A.I., tout n'est qu'illusion, comme disait le sage Gouda. Et il ne se fera pas de vieux os avant que nous soyons devenus, avant même de nous en être rendus compte, les suppôts d'une vieille boîte en métal dans lequel se cacherait le Prophète et toutes ses réponses aux questions stupides que l'on se pose sur l'Univers.
Bonne fin d’année - et passe le bonjour à Greta.

Sa réponse était sans ambiguïté : une fois de plus, les chamans auto-proclamés de la Silicon Valley nous bourraient le mou, et entendaient bien nous hypnotiser jusqu’au trognon, afin de nous asservir aux rouages de cette machine à contrefaire l’intelligence, dotée d’une puissance de calcul phénoménale, qui ratatine allègrement les capacités humaines de remémoration et de synthèse de données.
Mon ami pas si imaginaire que ça m’en donna deux preuves concrètes, en prenant ChatGPT en flagrant délit de charabia.

Défense de nourrir les Oryctéropes.
Ca les rend oufs.

Exploitant aussi honteusement, qui plus est un jour férié, l'avatar de ChatGPT spécialisé dans la création d'images puis les contraignant tous deux à rédiger une carte de voeux contre nature, à base de pollution et de menace nucléaire, mon ami fit blasphémer les I.A. contre la Raison. C'était pas très dur.

clique sur l'image, parce que là on voit que dalle.
Coproduction Stable Diffusion® et Chat GPT3®

« On y a la preuve que GPT est l’esprit de mensonge le plus hypocrite et odieux qui existe, et doué d’une mauvaise foi proprement infinie. » ajouta-t’il d’un ton péremptoire pour clôturer le débat qui n’avait même pas commencé.
Pour ceux d’entre vous qui prétendiez n’avoir pas été suffisamment informés lors de la découverte des camps de la mort par les troupes américaines en 1945, là, vous ne pourrez pas dire que vous ne saviez pas, juste avant de commencer à cliquer sur ChatGPT en 2023.
Accuser GPT de mauvaise foi, c’est lui attribuer des défauts de caractère qu’on ne prête qu’à une entité incarnée, qu’elle soit humaine ou cosmique; c’est aussi postuler qu’il puisse en exister une « bonne », (une foi, pour ceux qui sont perdus) alors que maintenant que j’y songe, ce terme de bonne foi résonne désormais de façon suspecte dans un silence résolument pléonastique. Tant pis.
Dans tous les cas, c’est prêter beaucoup de profondeur réflexive à un tas de ferraille, quel que soit le degré de raffinement de ses algorithmes. Les Oryctéropes dévoilent un bug : quand le chatbot ne sait pas, au lieu d’admettre son ignorance, il invente, il fabule, il balbutie jusqu’à l’invention, et sa carte de voeux sur le thème imposé de l’apocalypse n’est guère plus performante que si on l’avait faite réaliser par un enfant de trois ans et demi qu’on aurait nourri uniquement avec de vieux numéros de la revue Hara-Kiri, et des tutoriels Photoshop. Il aurait eu de sérieux problèmes de transit, mais il aurait démoulé quelque chose d’un peu plus chiadé.
J’en étais là de mes ruminations déceptives et mordorées, quand je tombis sur deux articles stupéchiants (c'est à dire à la fois magiques mais un peu longs à lire et à assimiler) qui m‘éclairurent les tenants et les aboutissants du bidule, par le concept d'artefact génératif. Je ne regrettus pas de m'être lancé dans la rédaction d'un article manifestement hors de portée de mes moyens actuels, et encore, depuis une semaine j'ai quitté mon grabat puisque grâce à la rééducation kinésitérapique, je claudique désormais sur une seule béquille, au grand dam des fabricants d'embouts en caoutchouc qui rêvaient de m'en voir acquérir une paire. 

Que ce soit un bloggueur français qui parvienne à rendre tout ceci intelligible, c’est d'autant plus admirable ! des heures d’émerveillement et d’épouvante en perspective.
Je vous laisse les parcourir, et vous avancer jusqu'aux caisses, pour pouvoir enfin vous aussi baigner dans cet océan de clarté et de sagesse nées de la compilation de centaines de milliers de pages de bullshit moissonnées sur le web à l’aide d’algorithmes à la rapidité surhumaine, donc monstrueuse.
Ce qui ouvre de nouvelles perspectives dans bien des domaines scientifiques et technologiques, mais pas forcément dans celui de l’intelligence ni de la sensibilité : pour qu’il y ait émergence d’une intelligence, il faut une conscience de soi, et on en est encore loin. Je ne récuse pas la possibilité de l’apparition d’une I.A. un peu plus futée dans le futur, mais pour l'instant, y’a encore comme un bug dans la purée. 
Greffez-lui un corps soumis à l'entropie, et on en reparle.
Mary Shelley, reviens, ils se foutent de nous !

***
Coda trouvée dans une baignoire le wiki :
Lancé en novembre 2022 dans une version gratuite et non connectée à Internet, ChatGPT bénéficie d’une large exposition médiatique et reçoit un accueil globalement positif, bien que son exactitude factuelle soit critiquée. En raison de ses capacités multiples, le prototype suscite également  des inquiétudes en raison des détournements possibles à des fins malveillantes, des risques de plagiat dans le monde académique et de possibles suppressions d'emplois dans certains secteurs.
En janvier 2023, ChatGPT compte plus de 100 millions d’utilisateurs enregistrés.
(vous voyez bien qu'il n'y a aucune raison de se faire du mouron souçaïlle)


En 1996, le Monde Diplomatique sort son premier hors série : "Internet, l’extase et l’effroi"
bonus en hidden track piste cachée : l'éditorial d'Ignacio Ramonet
Ils pourraient le republier ces jours-ci en remplaçant juste Internet par "ChatGPT", et ça passerait à l'aise, fingueurs in the noise. Car tandis que dans la Silicon Valley on gravit sans peine des pics insoupçonnées dans le bliss, ici-bas, nous pataugeons plus que jamais entre l’extase et l’effroi. Enfin, tant qu'il y a du courant électrique, parce que sinon, on aurait juste froi.
A ce propos, la commission d’enquête parlementaire sur « la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France » se réunit depuis fin 2022, et auditionne des hauts fonctionnaires, les patrons successifs d’EDF, des scientifiques, des ex-ministres et bientôt des anciens chefs de l’Etat pour tenter de comprendre les fragilités de la France.
Extraits : 

Les anciens PDG d’EDF n’ont pas de mots assez sévères pour critiquer le dispositif inventé afin que l’entreprise publique, devenue société anonyme en 2004, aujourd’hui en cours de renationalisation, puisse conserver le monopole du nucléaire mais abandonne, en échange, des parts de marché à ses concurrents.
Le dispositif porte le nom d’« accès régulé à l’électricité nucléaire historique » (Arenh) et consiste à réserver, à bas prix, une proportion importante de la production d’EDF (100 térawattheures, et même 120 térawattheures en 2022) pour ses concurrents. « Le manque à gagner est considérable, de l’ordre de plusieurs milliards d’euros chaque année : nous touchons 42 euros par mégawattheure, alors que le parc nucléaire nous revient à une cinquantaine d’euros – sans tenir compte du coût de sa reconstruction », a déclaré Jean-Bernard Lévy, en soulignant que le tarif n’avait pas évolué entre 2012 et 2021. L’Arenh explique une partie des résultats d’EDF en 2022, avec une perte abyssale de 17,9 milliards d’euros, l’entreprise ayant dû acheter à prix d’or, sur le marché, une électricité qu’elle avait cédée à ce tarif avantageux. 
Le dispositif n’avait pas prévu assez de garde-fous face à la tentation − pourtant bien documentée dans l’histoire du capitalisme −, pour des acteurs d’un marché, d’engranger des profits rapides. « Pour un industriel, l’idée même d’accepter de céder sa propre production à ses concurrents virtuels, qui n’ont eux-mêmes aucune obligation de production, est surréaliste. Nous avons fait la fortune de tradeurs, non d’industriels », cingle Henri Proglio, PDG d’EDF de 2009 à 2014.
« On a fabriqué un outil de spéculation pure. On a fait gagner de l’argent à des personnes qui n’ont pas produit un électron », corrobore Yves Bréchet, ancien haut-commissaire à l’énergie atomique, en poste entre 2012 et 2018 : « La politique énergétique du pays a été décidée par un canard sans tête. »
Heureusement que Macron a repris les choses en main, et que tout est sous contrôle, 


***

retouches finalisées en essayant de faire preuve d’I.H. 
(Intelligence Humaine, un truc qui se perd) 
en écoutant le Nightbloom de Steve Roach & Mark Seelig
Grâces leur soient rendues.


mardi 7 décembre 2021

L'espoir n'est pas un steak (2006)

"Au revoir"
(Valéry Giscard d'Estaing, 1981)
Le mois dernier, vers la fin de mon homélie d'auto-addict, j'ai fait une allusion voilée et truffée d'hyperliens planqués sous l'icône de l'éléphant trempant sa petite trompe dans son petit bol, elle-même empruntée à un remarquable ouvrage pour la jeunesse, aux débuts enthousiastes de ce blog, vers 2005, sous l'égide de la lutte contre la cyberdépendance sexuelle. Dure lutte, en vérité, puisque je suis encore là, et apparemment vous aussi. Ca m'a rappelé qu'à l'époque, je n'écrivais pas encore dans l'espoir (qui n'est pas un steak) de pouvoir ensuite lire les articles que je ne trouvais nulle part sur le net. Au contraire, je baignais dans un flot de blogs spiritualistes, au milieu de personnes dont l'expression écrite me stupéfiait d'intelligence et de sensibilité, car j'étais un peu branché auto-dévalorisation. Au moins, ça, ça m'a un peu passé. Ces personnes se sont depuis toutes mises en retrait(e) du virtuel, et j'aurais mieux fait de suivre leur exemple, au lieu de jouer les prolongations. Mais enfin, les paroles s'envolent, alors que les écrits restent. Voici deux petits billets qui m'ont bien profité. Si l'auteur passe devant, je le salue chaleureusement.


L'espoir n'est pas un steak

Par curiosité, je suis allée voir où en était Spirit de sa lutte contre la cyberdépendance, et j’ai vu qu’il avait ouvert un nouveau nouveau blog après sa nouvelle nouvelle rechute. Apparemment, il y a une chose qu’il n’a pas comprise : on ne se nourrit pas d’espoir. L’espoir c’est comme la barbapapa, c’est rose, c’est sucré, ça a l’air bon, mais ça colle et c’est surtout du vent. Si on se nourrit de barbapapa, au bout de quelques jours, on commence à avoir très faim.
Tout le monde a essayé de se nourrir d’espoir un jour ou l’autre. Par exemple, quand j’ai commencé le Tchan, en 1996, je me disais « Allez, aujourd’hui je prends une bonne résolution, je deviens consciente. Et dans 48 jours ou peu s’en faut, je serai éveillée. Voilà. On y croit. Tout va changer. Je peux le faire. ». Quand je lis Spirit, j’ai l’impression de me voir il y a 10 ans. Mais il y avait là une erreur d’analyse fondamentale. C’est que l’espoir est une pensée, contrairement à un steak, ou à un plat de pâtes, par exemple. Et, au bout de 10 jours, on peut bien penser ce qu’on veut, le corps, lui, regarde ce qu’il a mangé entre temps. Et s’il n’a rien mangé, il n’est pas content, et il retourne là où il y a à manger. Donc tout se casse la gueule.
Le problème de nos compulsions, c’est qu’elles nous nourrissent. Si on ne trouve pas de nourriture alternative, il est normal qu’on y retourne, à moins qu’entre temps on se soit habitué à crever la dalle, comme les moines trappistes. Mais alors on vit mal, on est dépressif. Dans les monastères, on appelle ça l’acédie. Bien sûr, on ne cède plus aux compulsions, mais ça ne nous remplit pas pour autant. On est vide, et on ne peut pas se remplir avec de l’auto-satisfaction. Surtout pas, en fait. Car l’auto-contemplation est précisément ce qui empêche Dieu (l’état naturel) d’être présent. On essaie de se remplir de la pensée de soi, ce qui est impossible puisque la pensée est vide, comme le soi, mais le problème c’est qu’en attendant la place est prise, même si c’est par un fantôme.
L’espoir est au fond la même chose que le doute. J’y arriverai, ou je n’y arriverai pas, c’est la même chanson, déclinée sous deux modes différents. Une façon de penser à soi. C’est pour cette raison que les maîtres sont assez peu complaisants envers l’un comme envers l’autre. Qu’on ait l’air tout exalté ou tout malheureux, qu’on s’auto-convainque de ses mérites ou qu’on s’auto-apitoie, il s’agit toujours d’auto-contemplation, de mensonge. Le moi n’a pas d’existence intrinsèque.

Commentaires

1. Le dimanche 12 février 2006 à 23:30, par john

La pensée n'est pas un steak, mais c'est de l'énergie. C'est pourquoi le plaignos qui cherche à changer de crèmerie préfèrera au mot mensonge celui de fiction : le mensonge, il va s'en accomoder à condition que ça soit de sa faute, et risque d'en faire un usage ambivalent, alors que la fiction, il peut l'explorer en étant moins polarisé affectivement, pour finir par découvrir qu'elle est auto-entretenue (il s'en doutait quand même un peu).
Merci du coin de zinc, plutôt bien famé pour une fin de semaine.


Légitimité du "mal"

De blog en blog, une autre évidence m’apparaît. Ce qui trompe les gens dans leur recherche de solution, c’est le fait de ne pas avoir la totalité du tableau. Comme le gars qui touche la queue de l’éléphant, qui croit que c’est un serpent, et qui fonde toute sa démarche sur le fait qu’il a affaire à un serpent. Sur le blog de Roujsend, par exemple, on y considère que le désir de puissance est une mauvaise chose et qu’il a dû apparaître à un certain moment pendant l’enfance. Dans les commentaires, la tendance ne fait que s’amplifier. Mais si l’on remonte le fil, on se rend compte que la réalité est toute autre. Le sentiment de toute-puissance est en réalité celui que l’on éprouve lorsque le corps énergétique est unifié, c’est-à-dire lorsqu’il devient omniprésent – on peut avoir un vague aperçu de ce que ça donne en rêve -. Autrement dit, le désir de puissance que nous exerçons sur nous ou les autres n’est que la dégradation de cet état originel non-séparé (d’avec nous-mêmes) que nous cherchons à retrouver. Mais il y a mieux. La béatitude que nous éprouvons dans ces états d’omniprésence n’est elle-même que le reflet de la béatitude qui est la 3è qualité de rigpa. Autrement dit, le désir de puissance n’est que la dégradation de la dégradation de la nature originelle. Qui s’étonnerait alors qu’il soit si bien accroché ?
Il en va de même pour le désir. Les cyberdépendants combattent leur désir. Pas de chance, le désir de la pétasse sur un écran n’est que la dégradation de quelque chose de plus haut, car la jouissance sexuelle n’est, de nouveau, qu’une version dégradée de la béatitude produite par l’union de la clarté et de la vacuité. Autrement dit, rejeter le désir, c’est jeter l’échelle qui nous permet de remonter à notre vraie nature. Et ça ne peut pas marcher.

Voilà pourquoi tout le monde tourne en rond. On rejette ce qui nous paraît mauvais. Alors que si nous comprenions que ce qui nous paraît mauvais n’est qu’une version déformée – mais pas tant qu’on le croit – de notre nature, ou de Dieu, tout irait bien mieux. De même, on va thérapiser le tueur qui a poignardé quelqu’un en lui faisant subir je ne sais quel traitement basé sur le fait que son geste est totalement mauvais, alors qu’en réalité, il n’est que l’expression d’un désir d’ouverture non compris, qui s’est vécu sur le plan physique au lieu de se vivre sur le plan énergétique. Si les gens pouvaient VOIR ce qu’il y a dans tout ce qui leur paraît mauvais… ils verraient que ce qui est mauvais, c’est leur vue. Mais que le geste, l’acte, ou la pensée, au fond, est parfaitement légitime. C’est toujours Dieu qui se cherche.


Commentaires

1. Le dimanche 12 février 2006 à 23:15, par roujsend

Quand je dis apparaître, je ne dis pas venu de nulle part. Je veux dire en prendre conscience, s'exprimer clairement (enfin clairement dans le langage commun). Le rejet, lui, ne viendra que plus tard, non pas parce que cette puissance me paraît "mauvaise" en elle même, mais parce qu'elle entrera en conflit avec d'autres voiles émotionnels (moraux entre autres)

2. Le lundi 13 février 2006 à 21:47, par joaquim

Salutaire recadrage sur l’ouverture de la porte. Enfoncer des portes ouvertes, c’est parfois utile, surtout quand tant se heurtent au cadre.

3. Le mardi 14 février 2006 à 08:12, par orroz

Je viens de lire et je suis d'accord avec toi : "rejeter le désir, c’est jeter l’échelle qui nous permet de remonter à notre vraie nature". C'est pourquoi je propose aux dépendants de transformer leurs désirs de pétasses en désir vrai d'amour pour leur partenaire car en réalité c'est cette omnipotence du désir qui permet d'atteindre la vraie jouissance.
En revanche, je ne suis pas totalement d'accord avec :
"Si les gens pouvaient VOIR ce qu’il y a dans tout ce qui leur paraît mauvais… ils verraient que ce qui est mauvais, c’est leur vue. Mais que le geste, l’acte, ou la pensée, au fond, est parfaitement légitime."
Car si l'on passe à l'acte "mauvais" c'est que la vue n'est pas la bonne !
Mais ta conclusion est juste :
C’est toujours Dieu qui se cherche.

4. Le mardi 14 février 2006 à 18:07, par Anargala

Tout à fait d'accord sur la métaphore de l'éléphant dans le noir. Tout désir dérive de l'amour du Soi, ou de la nature de Bouddha.
L'univers, c'est "god in the making".

5. Le mardi 14 février 2006 à 20:41, par flo

Waouh ! Les chenilles ne t'ont pas dévoré tout cru, tu as survécu ! 

mercredi 11 novembre 2020

Légendes d'automne : l'omelette aux girolles

Omelette aux girolles, l'expérience interdite :
Ce film a bien failli être interdit lui aussi.
Trop provocateur vis-à-vis du nouvel ordre sanitaire et moral. 
J'ai même entendu parler d'un Rimpoche tibétain
à qui ça avait fait passer le goût des champignons.
Il fait très doux, en ce mois de novembre de reconfinature au petit déjeuner. 
Anormalement doux, pourrait-on dire si on trouvait quelque chose de normal à quoi comparer cet automne, singulier à bien des égards. 
L'hiver sera sans doute encore plus doux que du beurre doux, mais aussi beaucoup plus rude, car dans le jardin, mon fils déterre torse nu les racines des figuiers que j'ai désignés à son hubris et à sa hachette. 
Ca ne trompe pas : quand enfant de l'homme blanc tronçonner torse  nu, pas beaucoup rigoler en perspective.
En tout cas, je vais rentabiliser son séjour; en voilà un qui ne sera pas venu se confiner chez ses parents pour rien, et qui ne repartira pas chez lui les mains vides, mais bien pleines d'ampoules. 
Par ces tiédeurs, la forêt du Gâvre doit regorger de cèpes et de chanterelles, qui imploreraient d' être ramassées de leur petites voix flûtées, si la Préfecture autorisait les balades en forêt. Car sinon, pourquoi Dieu aurait-il créé les champignons ? je veux dire, à part les amanites tue-mouches, qui, au Néolithique, étaient sans doute une variété parmi d'autres de confiserie hallucinogène et divinatoire pour le chaman de la tribu, qui lui permettait d'entrevoir à travers les portes de la perception (H = 180 x L = 73 cm) que dans un lointain avenir, l'Homme inventerait le blog, qu'il trouverait ça bon, mais que sa femme serait obligée de lui envoyer un mail pour qu'il qu'il revienne à table pour déjeuner. Et le chaman avait ensuite bien du mal à retranscrire ses visions auprès du reste de la tribu, dans un langage articulé, certes, mais ne comportant que 50 nuances de grrr...ognements. 

Question d'aller aux champignons, cette année, c'est un peu "en novembre, touche ton membre" : la cueillette reste interdite à 135 € d'amende au moins jusqu'à début décembre (en décembre, suce du gingembre) et j’en suis réduit à acheter des trompettes de la mort (c'est un champignon très comestible, pas un disque de darkjazz nordique) au marché du village pour confectionner des omelettes aux patates améliorées. C'est des problèmes de riche, mais quand même, je me demande si je ne vais pas rejoindre le front de gauche.

La Préfecture envisage d'interdire aussi la diffusion des photos de sous-bois feuillus, 
dont la contemplation serait bien trop suggestive et même carrément néfaste
aux mycologues amateurs aussi désappointés que les Mélanchono - Trumpistes.

Dans ma boite mail ce matin, je trouve un article un peu tapageur, sur un site incertainement scientifique mais peu suspect de complotisme car ses parrains sont assermentés par l'évéché :
" Les champignons hallucinogènes 4 fois plus efficaces que les antidépresseurs ?" 
Prenez le temps de le lire, ça m'évitera un résumé tronqué et frauduleux. Selon une étude parue dans (pi)JAMA Psychiatry, la psilocybine, une substance que l'on trouve dans les champignons hallucinogènes, améliorerait rapidement et avec une grande ampleur les symptômes de la dépression grave... L'article vante les qualités de ce psychotrope estampillé Nature et Découvertes mais reste très en surface de son sujet, et donne surtout envie de cuisiner une omelette farceuse (et baveuse à point) à Emmanuel Carrère pour qu'il n'écrive plus jamais Yoga

Ah dis donc moi qui savais pas
quoi m'offrir à Noël y'a 5 minutes !
Merci Wiki, merci Amazon !
De mémoire, le LSD avait lui aussi été conçu dans un but thérapeutique. 
Je découvre en passant que c'est le même chimiste qui est dans le coup; je ne regrette pas mes 10 € envoyés à wikipedia.
En passant et repassant sur ces articles, je note que la psilo est naturelle, qu'elle a été isolée par Hoffmann dans des champignons mexicains, que sa synthèse est difficile et onéreuse, alors que le LSD-25 est un dérivé de l'ergot de seigle, un autre champignon, parasite du seigle. Mais c'est un produit de synthèse, qui n'a pas le label Agriculture Biologique.
Il est pourtant scientifiquement prouvé que les gens qui ont cru pouvoir s'envoler du 4ème étage après en avoir absorbé ont été définitivement guéris de leurs névroses, ainsi que du reste de leurs pathologies. Alors qu'avec la psilo, d'après mes souvenirs, on se gondole en même temps que les motifs floraux de la tapisserie du salon, sans plus. Mais les variétés bretonnes sont dix fois moins chargées en principe actif que leurs cousines sud-américaines.

Cet article m'a été posté par un ami qui a tellement pris de Final Cut Pro X, un logiciel de montage puissamment hallucinogène, surtout quand on active les proxys, qu'il voit désormais des renards partout, mais lui il s'en fout, car il vit en forêt et peut se signer des dérogations à tire-larigot si la fantaisie lui prend d'aller ramasser des girolles psychédéliques qui ne font pas rire quand elles prédisent un futur nuancé et incertain à l'espèce humaine, mais le pangolin et la chauve-souris géreront peut-être mieux les ressources de la planète que les fondés de pouvoir de la banque Lehman Brothers ne le firent avec nos sous en 2008.

On peut dire la même chose des girolles.
Dans un autre article tiré du même site, selon le principe du titre accrocheur qui ne tient pas ses promesses : "Dépression et tabagisme, la faute à l'Homme de Neandertal"  
"Notre principale conclusion est que l'ADN de Neandertal influence des traits cliniques chez l'Homme moderne : nous avons découvert des associations entre l'ADN de Neandertal et un large éventail de caractéristiques, y compris des maladies immunologiques, dermatologiques, neurologiques, psychiatriques et reproductives » (..) De plus, des variants génétiques provenant de Néandertaliens influencent aussi le risque de dépression. Cependant, cela ne signifie pas forcément que Neandertal était dépressif.
Effectivement, très peu de témoignages de dépressifs nous sont parvenus depuis le Néolithique. 
En plus, j'en ai lu une bien bonne dans le Destination Ténèbres de Frank M. Robinson cet été :
« L’homme de Neandertal a dû être agréablement surpris quand il s’est accouplé avec une créature dotée d’un système nerveux supérieur. Mais je suppose que la femme de Cro-Magnon a dû s’emmerder. »
Bon, j'ai au moins retenu l'idée que dans les 1 à 4 % d'ADN que les Européens ont hérité de leur lointain ancêtre néandertalien, se trouvent des gènes associés à différentes maladies : dépression, addictions, affections touchant la peau ou la coagulation du sang. Et que certains de ces gènes issus de notre lointain passé sont ensuite devenus obsolètes voire contre-productifs. 
Même si ça me fait une belle jambe dans mon projet de cape d'invisibilité à base de gènes surnuméraires pour pouvoir aller aux champignons sans tomber sur les pandores. 

Sur le darkweb, on trouve des gros sacs Super U
bourrés de chanterelles, vendus à la sauvette
par des dealers berrichons sans vergogne,
et payables en bitcoins. Le darkweb,
c'est vraiment une zone de non-droit.
Puis, dans le Monde de ce matin :
Covid-19 : des troubles psychiatriques décelés chez 20 % des patients. 
Selon une étude de l’université d’Oxford, publiée dans la revue The Lancet Psychiatry, l’anxiété, la dépression et les insomnies sont les affections les plus communes chez les personnes rétablies, qui sont aussi plus vulnérables face à la démence. Les chercheurs montrent aussi que les personnes atteintes de troubles psychiatriques sont à 65 % plus susceptibles de contracter le virus.

Etant entendu qu'au vu de la virulence du virus, on va tous attraper le Covid-19 à moyen terme, ça corrobore la vieille blague ghibellinienne "Une personne sur cinq souffre de troubles psychiatriques. S'il y a quatre personnes autour de toi et qu'elles ont toutes l'air en bonne santé, c'est pas bon signe." Mais à part ça, on fait quoi avec toutes ces infos ? Etant professionnellement très impacté par la crise sanitaire, je vais proposer à mon agence pole emploi de me reconvertir en organisateur de stages en forêt, sur le modèle de ces séjours survivalistes qui ont tant de succès auprès des jeunes qui se sont fait embobiner sur internet par d'anciens gradés. J'emmènerai des fournées de chômeurs dépressifs covidés en forêt, je les formerai à la cueillette de psilo, j'aurai une prime à la casse car j'en perdrai un ou deux à chaque sortie, et avec un peu de chance on trouvera bien quelques girolles. 

samedi 29 août 2020

Coronavirus : pourquoi tant de contaminations et si peu de morts ?

Hier j'ai lu beaucoup trop d'articles d'essence conspi (rats sionistes) sur le coronavirus.
- j'ai retrouvé une revue qui m'avait irrésistiblement attiré dans le rayon du Super U de Lit-et-Mixe cet été, un peu comme la lumière bleue attire les insectes en fin de vie. Je l'avais feuilletée en tremblant, de peur de me souiller ou de me brûler, jusqu'au moment où j'étais tombé sur un slogan respirant l'intelligence : "mettre les masques ? plutôt crever" après quelques pages de fumeux baratin. C'en était assez pour la reposer sur le présentoir. Je n'étais pas client de ça. Quelques minutes plus tard, j'allais faire tomber le cache plastique du rétroviseur d'une voiture immatriculée en Allemagne dans le parking en passant un peu près avec mon caddie, le remettre, le revoir tomber à terre, et quitter la scène discrètement par peur de voir le conducteur arriver. Cet incident avait engendré une inquiétude et une honte à mon avis bien plus intéressantes que la revue interlope feuilletée : avais-je renoncé à tenter de réparer par peur d'une anicroche ou parce que le gars était allemand ? qu'est-ce qui avait déclenché ma peur ? j'avais ronronné quelques jours là-dessus sans arriver à grand chose à part amplifier ma honte. Et je ne suis pas Emmanuel Carrère, difficile de faire de la littérature là-dessus.

- j'ai observé la dérive générale d'un blogueur de fond soi-disant bouddhiste qui me semblait jadis intéressant sur certains sujets et qui semble devenu complètement zinzin. Mais comment un homme qui anime 8 blogs pourrait-il avoir conservé sa raison ?

Je me suis posé des questions, auxquelles cet article publié dans le Monde le 26 Aout a apporté un début de soulagement.
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DÉCRYPTAGES Le nombre de cas confirmés de Covid-19 augmente régulièrement depuis le milieu de l’été, mais le bilan humain reste relativement stable. Rien ne permet, pour autant, de prévoir la fin de l’épidémie.




Un peu plus de trois mois après la sortie du confinement en France, les chiffres de l’épidémie de Covid-19 continuent de rythmer le quotidien du pays. Une tendance s’est installée depuis le milieu du mois de juillet : le nombre de personnes positives au coronavirus SARS-CoV-2 est en hausse. Il retrouverait même, en apparence, un niveau comparable à celui atteint au plus fort de la crise.

Ce glissement n’est pourtant pas encore visible à l’hôpital : le nombre d’admissions en réanimation et le nombre de morts restent, à ce stade, à des niveaux bien plus faibles qu’au printemps.




Pour certains spécialistes, la dynamique actuelle de l’épidémie a de quoi tempérer les inquiétudes face au spectre d’une « deuxième vague ». « Le virus circule mais une épidémie sans malade, moi je ne comprends pas ce que c’est (…). Pour l’instant, il n’y a pas de signe majeur de crise, pour l’instant il n’y a pas de rebond », assurait ainsi l’épidémiologiste Laurent Toubiana, chercheur à l’Inserm, sur BFM-TV le 22 août.

Ce paradoxe interroge : la hausse des cas confirmés est-elle le précurseur de la « deuxième vague » tant redoutée de l’épidémie ou une simple donnée parmi d’autres qui ne devrait pas nous alarmer ? Passage en revue des possibles explications de ce phénomène.

Rien n’indique que la virulence du virus soit moindre


La découverte, à la mi-août, d’une mutation du coronavirus SARS-CoV-2 en Malaisie a relancé cette hypothèse, mais elle s’est révélée être une fausse piste : ce nouveau variant était déjà très majoritaire en France dès le mois de mars. A ce jour, rien ne permet donc d’affirmer que le virus est moins virulent que lors du premier pic de l’épidémie.

La chute de la courbe des morts observée dans plusieurs pays a pu laisser penser que le virus s’était affaibli de lui-même avec le temps. Le 24 août, sur l’antenne de France Inter, la chef du service maladies infectieuses à l’hôpital Saint-Antoine à Paris, Karine Lacombe, a pourtant mis en garde :

« L’histoire d’un virus qui serait moins transmissible ou moins grave est une histoire totalement construite, on n’en sait rien pour l’instant. »

On teste nettement plus qu’au printemps

Au début de l’épidémie, la France réservait ses tests aux malades les plus graves. Impossible, dès lors, de recenser les nombreux malades légers ou asymptomatiques. Moins d’un cas de Covid-19 sur dix était donc détecté et comptabilisé pendant cette période, selon des études rétrospectives de l’Institut Pasteur et de l’agence de sécurité sanitaire Santé publique France (SpF). L’augmentation du nombre de tests de dépistage est une autre explication possible de la hausse du nombre de nouveaux cas détectés. En effet, plus on teste, plus on a des chances de trouver des porteurs du virus.




« Ce que l’on voit dans les chiffres des cas confirmés n’est que la partie émergée de l’iceberg », confirme l’épidémiologiste Catherine Hill, chercheuse à l’Institut de cancérologie Gustave-Roussy de Villejuif (Val-de-Marne). Avec 90 000 tests par jour en cette fin août, contre seulement 5 000 à la mi-mars, les chances d’identifier des personnes contaminées sont aujourd’hui plus grandes. Mais cette évolution empêche de comparer l’intensité de la circulation actuelle du virus avec celle du printemps.

La hausse récente du nombre de cas n’est cependant pas insignifiante. La proportion de personnes positives a sensiblement augmenté sur la période, passant d’environ 1 % par semaine en moyenne à la fin juin à plus de 3 % à la fin août. La multiplication des tests ne suffit donc pas à expliquer l’augmentation des cas.

Le virus circule davantage chez les plus jeunes, moins vulnérables

Pour Ségolène Aymé, directrice de recherche émérite à l’Inserm, la clé de compréhension de la situation actuelle est là : « Il n’y a pas à chercher des explications compliquées à ce décalage entre les courbes. Le virus circule sans doute à un niveau élevé, mais la dynamique est aujourd’hui chez les plus jeunes : c’est pour ça qu’il y a relativement peu de cas graves. Les personnes les plus à risques, notamment les plus âgées, se protègent mieux. »

Durant l’été, le virus a bien plus largement circulé à bas bruit chez les moins de 40 ans, dans des tranches d’âge où la part d’asymptomatiques est plus élevée et où les complications sont plus rares. Une évolution qui s’explique probablement par le fait que les plus âgés ont pris plus de précautions que les plus jeunes. On dit alors que le « patron de transmission » a changé.

Mircea Sofonea, maître de conférences en épidémiologie des maladies infectieuses à l’université de Montpellier, travaille actuellement sur la décorrélation entre le nombre de cas et le nombre de morts. D’après le chercheur, fin juillet, la létalité du Covid-19 a décliné de 46 % par rapport à ce qu’elle aurait été si le virus s’était transmis de la même manière qu’à la fin mai. « Quand vous changez un paramètre en cours de route, vous obtenez cet effet transitoire, indique le chercheur. C’est un artefact dans les données, qui a été soit complètement ignoré, soit balayé ; c’est pourtant une explication qui mérite d’être connue. »

La particularité de cette situation complique la prise de décision pour les pouvoirs publics. Le fait que le virus ait occasionné peu de morts ces dernières semaines peut inviter à l’optimisme, mais le risque de le voir se diffuser parmi des catégories de personnes fragiles, notamment âgées, est toujours présent. Or, la proportion de cas graves et la mortalité ont toujours été fortement corrélées à l’âge des personnes atteintes du virus (plus de 92 % des patients morts du Covid-19 avaient plus de 65 ans, selon SpF).

D’autant que l’on reste encore très loin du seuil de l’immunité collective, censé pouvoir restreindre efficacement la circulation naturelle du virus. A la date du 11 mai, entre 3,3 % et 9,3 % de la population française avait été infectée, selon une estimation de l’Institut Pasteur, avec de grandes disparités régionales. Ce chiffre doit aujourd’hui être révisé à la hausse, et reste disparate entre les départements où le virus circule activement et ceux qui sont moins touchés, mais il est encore loin de l’estimation des 50 % à 70 % requis pour freiner durablement l’épidémie sans mesures de contrôle.

Il faut plusieurs semaines pour constater les effets du virus

Il existe un décalage logique entre la hausse du nombre de cas détectés et celle du nombre de personnes hospitalisées, ou mortes, en raison des délais d’incubation (cinq à sept jours) puis d’aggravation de la maladie (sept à dix jours). « Il y a en moyenne environ trois à quatre semaines entre la contamination et le décès », explique Mircea Sofonea : quatorze jours entre la contamination et l’hospitalisation, puis huit à seize jours avant l’éventuelle mort, « selon la prise en charge ou le profil des patients ».

Si le virus parvient à davantage circuler chez les personnes à risques et dans les tranches d’âge les plus élevées à la faveur de la rentrée, il est très probable que le nombre d’hospitalisations et de décès augmente avec un tel décalage. Une inertie qui, pour de nombreux observateurs, altère la perception du danger par le grand public et complique le pilotage de la crise sanitaire.


Covid-19 en France : un décalage temporel entre cas, hospitalisations et morts

Moyenne glissante (sur sept jours) des données quotidiennes de l'épidémie, visualisées selon un indice allant de 0 à 100 (correspondant au pic).




Plusieurs autres signaux attestent tout de même d’une circulation large du virus. D’une part, bien que modeste, la courbe des hospitalisations a recommencé à progresser ces dernières semaines.





D’autre part, les cas reliés à des « clusters » (des foyers de contamination identifiés) sont très largement minoritaires, selon les données de SpF : la plupart des contaminations ne sont donc pas suivies par les autorités sanitaires. « Cela veut dire que le virus n’est pas maîtrisé et cela ressemble à une épidémie partie pour s’installer dans la durée. C’est quand même très dangereux », observe Ségolène Aymé.

On prend mieux en charge les malades hospitalisés

« Cela joue vraisemblablement en partie, confirme sur ce point l’épidémiologiste Ségolène Aymé. On a fait des progrès dans la prise en charge des patients au début de la maladie, mais nous sommes incapables pour l’heure d’en mesurer les bénéfices précisément. »

Au-delà des différences observées dans la dynamique de l’épidémie, notamment parmi les populations touchées, les connaissances accumulées sur le Covid-19 au fil des mois ont vraisemblablement permis d’améliorer la prise en charge de la maladie – à commencer par la gestion des « tempêtes immunitaires ». La décrue qu’ont connue les hôpitaux français a aussi vraisemblablement contribué à améliorer les soins par la suite.

Ces progrès concernent surtout l’aspect pratique de la prise en charge des patients, et la façon d’anticiper leur « trajectoire » clinique en cernant les profils les plus à risque. Pour l’heure, aucun traitement thérapeutique contre le SARS-CoV-2 n’a encore montré des preuves solides d’efficacité, et les vaccins devraient se faire encore attendre pendant des mois.

La dynamique estivale de l’épidémie s’explique par une accumulation de plusieurs facteurs, qu’il convient de comprendre pour ne pas sous-estimer ou écarter à tort le risque d’une « deuxième vague » possible à l’automne. Il est aujourd’hui trop tôt pour savoir comment la rentrée de septembre affectera la circulation du virus, et si la recrudescence des cas précédera un retour au niveau de mortalité observé au printemps.