Photos de guerre atroces contre un accès libre au Net porno
Article paru dans l’édition du Monde du 01.10.05
Chris Wilson, 27 ans, entrepreneur en Floride, s’était aperçu que les soldats postés en Irak ou en Afghanistan ne pouvaient pas accéder aux services de son site Internet, faute de pouvoir payer avec une carte de crédit domiciliée aux Etats-Unis. Il leur a proposé un marché : s’ils postaient des photos de leur vie quotidienne, il leur accorderait un accès gratuit à son site. Ainsi a commencé un commerce qui attire maintenant plusieurs milliers de militaires.
Les soldats ont envoyé des photos de scènes ordinaires et aussi de scènes dites « sanglantes ». Chris Wilson les a postées en accès libre sur son site, avec une mise en garde : « A éviter si vous êtes sensible ou si vous avez un problème avec les terroristes morts. » On y voit des corps mutilés, des têtes explosées. Les auteurs ont ajouté des légendes humoristiques : « Celui-ci, c’était pas son jour ! » Ou des détails sur le calibre des armes qui ont permis d’aboutir au résultat présenté.
En échange, les soldats obtiennent un accès complet aux photos pornographiques publiées sur le site. Chris Wilson estime qu’il défend les soldats. « De leur point de vue, c’est une vision non censurée de la guerre, a-t-il expliqué au Washington Post. Ils s’expriment sans être filtrés par l’administration. » Le Council on American-Islamic Relations, une association d’Américains musulmans, a écrit le 27 septembre au secrétaire à la défense, Donald Rumsfeld, pour lui demander d’ouvrir une enquête sur le fait que des militaires « utilisent des photos de cadavres d’Irakiens comme une monnaie d’échange pour gagner l’accès à de la pornographie sur Internet ». Selon le Washington Post, le Pentagone a enquêté, mais l’authentification des photos, des lieux et des unités est difficile.
L’armée estime qu’elle ne peut pas grand-chose contre le site de Chris Wilson. Mais elle est mobilisée pour essayer de ne pas avoir à publier les photos des sévices d’Abou Ghraib. Jeudi 29 septembre, le juge new-yorkais Alvin Hellerstein a ordonné cette publication pour la deuxième fois, au nom de la liberté de l’information. Pour le Pentagone, la diffusion de ces photos mettrait en danger la vie des soldats en attisant l’animosité dans les pays où ils sont déployés.
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