lundi 23 janvier 2017

Nova Verba, Mundus Novus (4)

Encore une histoire de Nouveau Monde et de Nouveau Verbe.
Dont le souvenir a été réactivé par l'étrange nouvelle de Ken Liu "Nova Verba, Mundus Novus".
Mêmes effets de rétropédalage.
C'est une variante (très) retorse de la planète des Singes.
Mon Encyclopédie de Masse de 1982 est toute jaunie, et sa reliure craque quand je la soumets au scanner, pire qu'un Hérétique qu'on soumettrait à la Question.
Tant pis.
Quand on aime on ne compte pas.








Pendant ce temps là, IRL :
Selon une étude publiée dans Science Advances (article scientifique écrit avant l'élection de Trump et démenti par elle), 60 % des espèces de primates sont en danger d’extinction en raison d’activités humaines d’ici vingt-cinq ans à cinquante ans.
75 % des populations accusent déjà un déclin.
http://www.lemonde.fr/idees/article/2017/01/19/une-planete-sans-singes_5065292_3232.html

En butinant deci delà pour cet article, je retombe sur Gloutonnerie apocalyptique, article inédit pour «Le Monde des livres», signé par Russell Banks, dans lequel l'écrivain américain explique comment la vision du monde séculière et temporelle des Etats-Unis a cédé la place à une vision religieuse intemporelle :
"Quand un groupe de primates supérieurs - chimpanzés ou gorilles - commence à manquer de nourriture, les mâles adultes sont pris de folie dévoratrice, de gloutonnerie apocalyptique. Ils engloutissent toutes les bananes et toutes les baies qui restent sur le territoire du groupe. Et quand il n'y a plus de bananes et de baies, ils envahissent le territoire de leurs voisins et s'en rendent maîtres par la violence. Nous, êtres humains, sommes une variété de primates supérieurs, et notre degré d'évolution ne nous garantit pas d'un accès de folie dévoratrice. Bien au contraire. La seule différence entre les chimpanzés et nous, c'est que nous avons inventé une théologie pour la justifier."
Ca promet.
Arg.

dimanche 22 janvier 2017

Nova Verba, Mundus Novus (3)

Supplément dominical à notre bulletin paroissial d'hier
Toutes ces trumperies de régression langagière et de conception pré-galiléenne du monde m'évoquent une nouvelle de science-fiction de Ken Liu : "Nova Verba, Mundus Novus" (à la surprise générale)

en anglais 

- en français : parue dans La Ménagerie de papier (Bélial, 2015)
Saga #34, Brian K. Vaughan, Fiona Staples

Nova Verba, Mundus Novus, ça a quand même une autre gueule et une autre portée que Valar Morghulis, bon sang de bois.
Nova Verba, Mundus Novus 

AU BOUT DE cent quatre-vingt-quatre jours, le Sesquipédal atteignit le bord du monde. 
L’océan Atlantéen s’y déversait en superbe cascade. Les écailles des poissons qui s’abîmaient dans le vide reflétaient le soleil couchant comme de l’or liquéfié. L’équipage, pris d’un effroi mêlé d’admiration, se tut. On n’entendait que les cris de panique des dauphins qui plongeaient dans l’abysse. 
« Le monde est donc plat, déclara le docteur Denham. Vous avez mérité votre place dans l’Histoire, capitaine. » 
Le capitaine Baffin réagit d’un hochement de tête presque imperceptible. 
Tout le monde retint son souffle tandis que la caravelle, courant sur son erre, se rapprochait du bord. 
« Lancez l’aérostat, décréta Baffin. Simple péripétie. Plus ultra. Il faut continuer, où que le chemin nous conduise. » 
Avec la moitié du navire dans le vide, l’équipage, qui se cramponnait aux haubans, crut que la quille allait se briser en deux. 
Mais l’aérostat, énorme ballon de soie cirée qui mesurait plusieurs fois la taille du vaisseau, se gonfla de l’air chaud issu des bidons enflammés disposés partout sur le pont. Le bateau, suspendu à cette enveloppe, prit son envol pour descendre lentement le long du bord du monde. 
Une vingtaine de marins avaient sauté à l’eau pour rentrer à la nage. Le capitaine Baffin dit une brève prière pour le repos de l’âme de ces pauvres inconscients tandis que leurs corps épuisés passaient en tourbillonnant. 
Le rideau liquide se réduisit à un voile de brume où se dessina un vaste arc-en-ciel circulaire par lequel l’équipage regarda ardemment afin de discerner ce qui soutenait la montagne inversée qui constituait le monde. 
Une énorme créature grise barrit un salut au navire. « Un éléphant, indiqua le capitaine. 
– Les Hindous avaient raison, dit le docteur Denham. Le Sesquipé... » Sa phrase demeura inachevée. « Je parais avoir quelques difficul... » Il écarquilla les yeux. « Voilà que je n’arrive plus à parler ou à penser comme je le voudrais. 
– Il ne peut s’agir que d’une supersti... » Baffin déglutit et secoua la tête. « Ma foi, on dirait bien que nous sommes limités aux mots de trois syllabes ou moins tandis que nous voguons vers l’assise du monde. » 
Les quatre pattes du pachyderme, tels des troncs d’arbre, se dressaient sur le dos d’une tortue géante. 
« La cara... coquille mesure trois cents milles de diamè... » Le docteur se tut. « Flûte, juste les mots de deux sylla... 
– En avant ! cria Baffin. En avant ! »
La bête sortit la tête de sa coquille et scruta le bateau sans un mot.
« Qu’y a-t-il sous elle ? »
Le jour baissait. Ils virent que chaque patte de la tortue géante se 
dressait sur le dos d’une tortue plus petite, dont chacune, à son tour, se tenait sur quatre autres tortues plus menues encore. 
« Le grand se fonde sur le petit, dit le marin, le complexe sur le simple ». 
En bas, rien à voir.
Plus de jour.
« Il fait tout noir au fond.
– Et on n’a plus rien dans la tête », dit le doc. Des pleurs à la ronde. 
« À l’aube fut le Verbe », dit le cap, l’œil plus vif. « La base du monde, que nul ne brise, je la nomme iotam. » 
Tic du doc. « Iotam a trois syl... 
– Les iotams créent des choses neuves, comme les mots font des mots neufs. On peut dire bien des mots d’un coup. Je les nomme “syllanante”. Par mots d’une syllanante, je crée du sens pour des mots qui en ont plus, qui nomment les iotams. Je te nomme “doctiste” et moi “capvaiss”. De par ces lois, je fais des mots neufs en groupes, pas un par un. Un “-iant” à la fin d’un verbe le place dans ce lieu et ce temps, ou le change en nom ; mettiant “-ut” à un mot crée un mot neuf qui dit “plus du vieux” ; mettiant “-ta” à la fin du mot crée le même, dans un temps plus tôt. » 
Le groupe crieta de joie car leur tête, sans ordre, se clarta. La nef cesseta sa chute, puis monta. 
Ils virta des formes dans la brume, des grains se fondiant en grains plus grands, preniant un tour neuf. Jambes, conches, longs cous — « Je te nomme tortée, pour tes pieds torta, dit le capvaiss. 
– Et des tortées grandut se placent sur les moins grandut », dit le doctiste, comme la nef monte et monte. 
Au vrai, de plus grandut tortées se montriant dans la nuit fuitiant. 
À la fin, passiant le neztube géant et par l’arcbrume de toutes teintes, le Ses faitta plouf dans la mer vive puis se lèveta. Les filuants toves hurliffloumèrent, et les borogoves tout smouales gyrèrent et bilbèrent dans la loirbe. 
« Nous sommes chez nous, dit le riant doctiste. – Le même, mais pas le même », dit le capvaiss. 

samedi 21 janvier 2017

Nova Verba, Mundus Novus (2)



J'ai refait une incursion sur Tumblr, site de microblogging (permettant à l'utilisateur de poster et surtout reposter du texte, des images, des vidéos, des liens...) sur lequel pullulent les mèmes du chien avec un chapeau dans l'incendie en flammes®.
Ce qui est souvent signe chez moi d'un passage sur le versant hypomaniaque de la bipolarité, toujours préférable à son versant dépressif, néanmoins plus pentu et dont on pourrait croire qu'il serait plus aisé d'y skier quand il neige, mais une tragique pénurie de remonte-pentes là-bas dans la vallée rend le retour à la station pour y déguster le vin chaud de l'amitié assez laborieux, que voulez-vous c'est le yin de mon yang, et on n'a rien sans rien.
Bref. Sur Tumblr, j'ai trouvé la carte de voeux idéale, en ce beau lendemain de l'investiture trumpinesque.
Trumpinique.
Trumpinale.
Je crois que je vais garder "Trumpinale", bien que ça me fasse derechef songer au Trumpinol®, médicament ressemblant comme le frère d'une goutte d'eau à celui que prenait Emmanuel Carrère au plus fort de sa dépression, et qu'il faudrait sans doute administrer en doses massives au nouveau Président.
"Le seul traitement qui m’ait apporté un peu de soulagement est un médicament pour psychotiques qui, d’après la notice, remédiait aux « croyances erronées ». Peu de choses à cette époque me faisaient rire, mais ces « croyances erronées », si, d’un rire pas vraiment gai."
Le responsable de cette élégante carte de voeux est encore un génie méconnu de l'art graphique, comme Francis Masse.
Qui était aussi un grand malade du Verbe.
Pas de danger que ça arrive à Donald Trump, dont le manque de vocabulaire est tel qu’il complique considérablement la tâche du traducteur.
Au printemps dernier, une étude réalisée par l’université Carnegie Mellon, largement relayée aux Etats-Unis, avait démontré que le niveau de grammaire des discours de Donald Trump se situait juste en dessous du niveau sixième.
C'est pas très marrant de s'apprêter à vivre dans un monde multipolaire (c'est toujours mieux que bi, n'en déplaise aux transgenres) dont un des dirigeants trahit sa pensée étriquée par la frugalité de son vocabulaire.
Vais-je pour autant hurler avec les loups conspirationnistes qui cherchent à identifier l'Antéchrist, et à lui faire bouffer ses sandales ?

mercredi 18 janvier 2017

La genèse de Charlie





L
e saviez-vous ?
Avant Charlie Hebdo,
il y eut Charlie Mensuel.

Né de la volonté de ses créateurs (Cavanna, Choron et Delfeil de Ton) de faire découvrir au public français des bandes dessinées contemporaines, à la fois françaises, italiennes et américaines : comme son homologue italien Linus, il tire son titre du nom de l'un des personnages des Peanuts (en l'occurrence Charlie Brown).

N’oublions pas qu’à l’époque, la presse BD adulte n’existe pas, puisque la BD adulte n’existe pas.

Tout est dans le wiki.

J’ai retrouvé un strip des Peanuts publié dans un des premiers numéros du mensuel qui pourrait s’intituler « Naissance d’une vocation » à propos de l’hebdo.


En quatre cases, tout est dit, et résumée toute l'histoire du futur hebdomadaire satirique.
J'appelle tout de suite Pompidou pour le mettre au courant de ma trouvaille.

Plus tard, Umberto Eco dira dans "La vie et un rêve, Charlie Brown" :
« ces enfants (Les Peanuts) nous affectent parce qu'ils sont des monstres. Ils sont les réductions monstrueuses et infantiles de toutes les névroses des citoyens modernes de la civilisation industrielle (...) L'univers de Peanuts est un microcosme, une petite comédie humaine pour le lecteur candide comme lettré »

C’est vrai qu’à côté, le chien avec un chapeau dans l’incendie en flammes® fait pâle figure.
Même quand après l’instrumentalisation de son dessin "This is fine", il se livre à une métaphore autoréflexive sur la portée de son travail.



On imagine mal Charb faire ce genre d’autocritique s’il avait survécu à l’attentat de 2015.




A part les Peanuts, il y eut un autre ancêtre à Charlie, c’est "L’âge d’or" de Bunuel « film injurieux pour la patrie, la famille et la religion. »






Et leurs enfants ?
Charlie survit, tant bien que mal.
L'actualité lui donne tous les jours tort d'avoir raison.
Mais la disparition de ses plus fines plumes n'aide pas : il est tout déplumé.

Enfin, les dessinateurs passent, l'esprit satirique reste.
Qu'il serve à quelque chose ou pas.
Heureusement qu'il n'est pas le monopole de Charlie.











En ce moment, je lis le Fluide Glacial Or-Série (en vente partout) consacré à Franquin.
Certaines de ses Idées Noires auraient pu être publiées dans Charlie.
Simplement, ça n'était pas sa culture.

«Lorsqu’après avoir lu une page d’«Idées noires» de Franquin, on ferme les yeux, l’obscurité qui suit est encore de Franquin.» 
disait le regretté Gotlib.




"Influencé par le style sombre de Guido Buzzelli, qu’il vient de découvrir au salon international de Lucca, Franquin ose se rebeller, faire exploser une partie de ses codes (plus de héros récurrents, un graphisme plus personnel, de fortes prises de position) et cibler avec prédilection l’imbécilité des chasseurs, la morgue déshumanisée des militaires ou le rôle moralement paradoxal des bourreaux. Anticlérical et anticapitaliste, Franquin évitera de parler de certains sujets comme le showbiz ou la sexualité. 
Impressionné par son propre négativisme, Franquin arrêtera la machine en pleine production du tome 2 des « Idées noires », cependant paru en juin 1984."

Que sont-ils devenus ?

- Charles Schultz, créateur des Peanuts, est mort après avoir travaillé jusqu'à la fin, mais il doit bien avoir quelques héritiers illégitimes parmi les 100 milliards de bloggers bd américains. J'ai un peu la glu de chercher.
Kendra Walls, peut-être ?
mais c'est une fille, c'est tout de suite plus subtil.




- De la première équipe de Charlie, il ne reste que Willem (dessin) et Delfeil de Ton (chroniqueur, qui livre son imperturbable papier toutes les semaines dans l'Obs)

Willem, autant je ne comprenais rien à ses bédés de libertaire néerlandais (les Hollandais, c'est pas des gens comme nous), autant il est devenu en vieillissant un dessinateur politique de génie.






- De la seconde équipe de Charlie... je préfère ne pas en parler.
Y'a le bouquin de Denis Robert pour ça.

- Et la troisième, encore moins.



Anonyme, 2015


Sinon, Mix et Remix est mort, et tout le monde s'en fout.
Il ne dessinait pas dans Charlie, mais c'était aussi un génie, dans son genre.










dimanche 15 janvier 2017

Le Mème Internet du chien avec un chapeau dans l'incendie en flammes®


J’ai d’abord été intrigué par cette illustration issue de la compilation du Gramophone 2016
Ca sentait le webcomic bien grave.
Alors je l’ai mise dans le truc de Google qui permet d’effectuer une recherche d'images à l'aide d'une image. 
Mais il m’a renvoyé .
Alors j’ai pris une image plus petite, avec juste le dessin.
Le  dessin du chien avec un chapeau dans l'incendie en flammes®.
Bingo.
Je venais de découvrir le monde merveilleux des mèmes.
(de l'anglais meme; calqué sur gène, sans rapport et à ne pas confondre avec le français même, et en effet, c’est pas le même mème) qui est un élément culturel reconnaissable répliqué et transmis par l'imitation du comportement d'un individu par d'autres individus. L’Oxford English Dictionary définit le meme comme « un élément d'une culture (prise ici au sens de civilisation) pouvant être considéré comme transmis par des moyens non génétiques, en particulier par l'imitation »

La planche de blog BD dont était tirée l’intrigante vignette du chien avec un chapeau dans l'incendie en flammes® n’était donc pas une métaphore de la posture de déni de Donald Trump devant la menace du réchauffement climatique, comme je l’avais cru au départ. 

C’est un innocent webcomic créé par KC Green en 2013.



Devenu un mème Internet.
Créature qui semble avoir la fâcheuse tendance d'échapper totalement à son créateur, comme le monstre de Frankenstein.
En effet, le chien avec un chapeau dans l'incendie en flammes® fut instrumentalisé par les Républicains pendant une convention démocrate avant l’élection de Trump, pour se moquer de la feinte sérénité de madame Clinton juste avant le séisme électoral.
Puis provoqua la ruine spirituelle de son auteur originel, si j’ai bien compris.
Enfin, la ruine, pas vraiment, il a trouvé une source de revenus non négligeable avec la vente de peluches et de meugs « this is fine » :




mais disons que ça a cassé son élan créatif et qu’il a fermé son blog BD 
juste avant d’en ouvrir un autre, mais vous savez comment sont les bloggeurs.
Fontaine, je ne boirai plus de ton martini-gin, tout ça.
J’invente rien. 
Tout est là. 

Et moi pendant tout ce temps, confit dans mon ignorance crasse, je n’étais au courant de rien. 
On me cache des trucs.
Je ne vais pas sur les réseaux sociaux. 
J’y serais scotché en permanence. 
Au lieu de ça, j’ai créé mes propres réseaux, pour maitriser mes vecteurs de communication, songeant sans doute à ce que Jeannot Bistouquette m'avait dit un jour : qu'il était devenu réalisateur de pornos pour tenter de progresser dans l'intention de maitriser sa consommation de films de Q...
Et pourtant, l'image du chien avec un chapeau dans l'incendie en flammes® a fini par m'atteindre. 
Ils sont forts, ces Américains.
Alors c'est quoi l'intérêt de cette débauche d'hyperliens à propos de This is fine ?
Les mèmes sont abondamment utilisés comme images réactives sur les réseaux sociaux, mais finalement ne sont-ils pas surtout autoréférents ? 




mardi 10 janvier 2017

Esprit de Noël (7)

lettre reçue ce matin par moi et ma soeur

Cherzenfants,

Il m'a fallu me retenir de vous écrire plus tôt, dès le 27, tant mon envie était grande. Mais le passage à Marcellaz n'était guère propice, ni la suite, via Villeneuve, Barbizon, le Chesnay, Rouen ... puis j'avais en point de mire ce concert du 7 janvier, où j'avais la plus grosse charge, et la remise en ordre du 8 bis (je viens tout juste de retirer la rallonge de la table de cuisine, mais les lessives -nappes, draps, serviettes, ...- ne sont pas terminées).
Ouf, le concert (s') est (plutôt bien) passé ! Et j'ai pu, un brin vanné, me poser dans un fauteuil, devant une bière, des restes de chips, et, en priorité, téléphoner à mon fils souffrant. Puis, avec Elisabeth, nous sommes allés hier "tirer les rois" chez Viviane, et lui souhaiter bonne année, notre incontournable B.A.
Donc je ne me retiens plus pour vous dire combien votre venue m'a fait du bien, surtout succédant à la "réunion" précédente de novembre 2010. Que de la gaieté, des beaux petits enfants, qu'Adrienne aurait tant aimé voir grandir et s'épanouir! Bonheur tempéré toutefois par les "maux" de Hugo et John, que chacun voulait voir passagers.
Pourquoi cela fait-il tant de bien ? pas facile à expliquer précisément. Le rapprochement soudain avec ceux que j'aime, sans  avoir eu à me déplacer, occulte sans doute l'éloignement, qui me semblait terrifiant, fin 2010, et dont on ne peut jamais s'accomoder, de toute façon, même si l'on sait que le destin en est seul la cause. Et se voir tous dans la joie évoque toutes les autres joies passées. Sans doute aussi que voir grandis ces enfants et petits enfants, tels qu'ils sont maintenant, apporte la preuve que les espoirs que nous y avions mis à leur naissance et pendant leur enfance se sont en bonne partie réalisés.
Il faut dire aussi que cela s'est produit dans une "période faste", alors que j'en ai connu de difficiles, notamment 1983, 1993, ..., 2005, 2006, les disparitions de certains de nos meilleurs amis, fin 2010, été 2011 ...etc.
Période faste où je connais à peine les misères du vieillissement: tout juste quelques "VPPB" guère inquiétants. Mais zéro  souffrance physique, une vue qui se maintient, une autonomie totale, et une activité sociale quasi sans précédent, avec ... la musique, où j'ai  réellement "changé de dimension" au cours des deux dernières années. Sans parler de l'incroyable réussite du pari de 2011, avec Elisabeth, en nous embarquant ensemble pour la "traversée du troisième âge". Son dynamisme et sa gaieté inoxydables, des occasions de voyager, et une "famille d'accueil" chaleureuse !
Bref, la meilleure période de la vie ? comme dirait FOG, ajoutant "dommage que cela se termine toujours mal !".  Non , tout de même pas, car le malheur de 2010 ne peut être effacé. A un rêve que j'ai fait il y a 3 nuits, j'ai réalisé  que je m'étais  résigné seulement après plus de six années, et avais petit à petit relancé une sorte de nouvelle vie, à partir des décombres et de l'affection de ceux qui m'ont entouré.
Tout cela pour vous dire aussi que s'il m'arrive de geindre de ne pas vous voir souvent au 8 bis, il ne faut pas vous en formaliser. La vie l'a voulu comme ça. Revenez quand cela vous chante. 
Tournée générale de bises

Papijami

Une lettre qui se lit à deux :
un qui la tient, et un qui ouvre la fenêtre.
Je nous déconseille de répondre à cette provocation policière.
Commando Bouilloire

[Edit]

Le 10 janv. 2017 à 21:39, e.v. a écrit :

Oyé ! Oui je confirme.  Après son passage à R*** où il m'à chanté la même chanson plusieurs fois jusqu'à ce que je lui dise que ce n'était pas la peine d'insister compte tenu du comportement inapproprié qu'il avait eu à notre égard qui était de nature à nous infantiliser complètement et qu'on avait franchement passé l'âge et pas besoin de ça mais plutôt de détente. J'en suis à me demander si son vice ne va pas jusqu'à prendre un malin plaisir à se rendre insupportable avec son entourage. Pendant le peu de temps qu'il est resté chez nous, on a eu une très bonne copine à déjeuner qui le connaît un peu pour avoir séjourné quelques jours à la marina ces dernières années. Même elle a décelé en quelques heures qu'il y avait un vrai pb d'égo et de centrage sur sa propre personne alors qu'on ne lui avait rien dit de ce qui s'était passé les jours précédents. 
Bref, un bel exemple à ne pas suivre pour nous comme pour les gosse.  C'est dur de devoir leur dire que si ils détectent des symptômes ressemblants, ils doivent nous alerter pour que nous préserver de ce gendre de travers là.

Je ne répondrai donc pas car il sait ce que j'en pense.  A moins qu'il n'ait pas entendu ce que j'ai dû lui dire parfois ... ce qui m'étonnerait guère puisqu'il n'écoute pas grand monde d'autre que lui ... Pas la peine donc de répéter s'il n'a pas entendu les 2 itérations précédentes.

Pour ton info, Renaud à décidé de venir à la maison en avril et papa était au courant presque avant moi  ... ce sera du 20 au 23 avril. Donc si vous voulez venir aussi, vous êtes les bienvenus ! On lui montrera que "notre territoire " n'est pas une maison de verre en cristal en Baccarat et que c'est possible dans le calme. Et avec un peu de chance' si vous veniez, on pourrait même lui faire admettre que l'hôtel est complet. Comme ça on pourrait s'entraîner à  faire Noel entre frères et soeur pour voir si c'est possible aussi sans lui !  P'tain là je deviens un peu cinique non ? Parce qu'il le vaut bien !  Mais si c'est pour être stressée qd il est là,  franchement, je préfère qu'il reste chez lui. 

Bon aller j'arrête,  tu vas finir par croire que je le prends pour un gros pervers narcissique !
Bises, je vais coucher ma chouette à roulettes. 
Soeur

Envoyé depuis mon appareil mobile Samsung.

Objet: Rép : Traversée ...

Allo ma soeur
Je comprends toujours pas comment tu parviens à rédiger des pavés sur un appareil mobile.
Au risque de quelques coquilles comme le « gendre de travers », qui doit apprécier.
C’est pas grave.
C’est admirable (de lapin) de ta part.
Pas grand-chose à ajouter.
gros pervers narcissique ?
il n’est pas gros.
Je partage ton diagnostic, et je me contente d’essayer de ne pas lui ressembler, un jour à la fois.
Si je lui rentrais dans le chou, je me ferais plaisir, mais ça ne serait d’aucune utilité.
Le Christ a dit « aime ton ennemi ». Il n’a pas dit « deviens comme lui », lol.
Et de toute façon, comme papa l’a démontré, et le démontrera encore, il n’entend rien. 
Ne peut ni ne veut.
Je crois que ces tendances étaient latentes chez lui depuis pas mal de temps, et ne font que se renforcer avec l’âge et le manque de stimuli externes.
Et je crois que c’est encore et toujours la peur (la peur de tout ce qu’il ne maitrise pas, dont la quantité va croissante, et qu’il pressent vaguement menaçante et au-delà de sa compréhension) qui le fait réagir de façon agressive envers nous, tout en prétendant que nous sommes ce qu’il a de plus cher, et qu’il passe vraiment de bons moments avec nous.
On pardonne beaucoup aux personnes âgées, parce qu’elles ont été jeunes, et qu’elles nous ont engendrés.
On leur pardonne même de nous avoir engendrés (c’est du boulot !)
Il manifeste les symptômes de l’âge tout en prétendant en être épargné à longueur d’antenne.
(Maman avait bien raison de dire qu’il ne connaissait que le mode « émission »)
What the fuck ?
Faut-il tirer sur l’ambulance ?
Prenons un autre exemple : la vieille chatte à ma femme est condamnée par le vétérinaire, qui a diagnostiqué une tumeur de la thyroïde inopérable.
On arrête donc de lui fourguer des croquettes light de chez light à 27,50 € les 2,5 kgs qu’on lui administrait jusqu’à présent pour prolonger son existence par un régime hypocalorique (elle avait été condamnée par le vétérinaire  qui avait diagnostiqué une cirrhose du foie dans un épisode précédent remontant à plusieurs années) et on passe aux succulentes pâtées de chez Félix pour pouvoir lui mixer sa chimio et ses anti-douleurs dedans.
Moyennant quoi elle est trois fois plus infernale qu’avant, ne pense plus qu’à manger, et nous harcèle pire qu’un gang de démarcheurs téléphoniques bourrés et en rut au Salon International de la Bière et des Gonzesses.
On est carrément obligés de se barricader dans la cuisine pour faire à manger, sinon on lui marche dessus. 
Elle n’est plus qu’une petite vieille obsédée par la bouffe, qui nous engueule à longueur de journée pour avoir plus que ce qu’elle pourrait avaler.
C’est vrai que pour les chats difficiles, Fido Boulettes a inventé le coup de pied au cul, mais allons-nous frustrer cette pauvre bête (qui ne semble pas du tout) en fin de vie ? 
Non, nous continuons à lui témoigner notre affection inconditionnelle.
Je vais essayer de me représenter papa en chat, tiens. 
Avec des moustaches.
Ca sera peut-être plus facile à gérer.
Pour le rdv d’avril, avec Renaud, je le note, mais je peux rien dire pour l’instant.
a+
Frêre.  


la vieille chatte à ma femme
(pleine de poussière)



dimanche 8 janvier 2017

Esprit de Noël (6)

Un lecteur attentif me dit que passé un certain âge, les relations toxiques familiales doivent être coupées avec fermeté. 
C'est vrai. 
Mais je me suis un peu dépeint en victime, au cours de cette série d'articles exhibitionnistes dont j'ai le secret. 
Si ça se trouve, ma lombalgie, la gastro de ma femme et l’otite de mon fils sont complètement indépendantes de l’état maniaquo-chiatique de mon papounet, et que c’est mon esprit malade et pour tout dire enfiévré par le lithium qui fait des associations libres au service de ma martyrologie ambulatoire.
Et peut-être bien que Dieu est Amour, aussi, mais ça, je ne le saurai sans doute qu’après ma mort.
D’ici là, si je ne ressens rien, car penser et écrire ne sont pas les meilleurs moyens d'entrer en contact avec le divin, je peux toujours spéculer, et faire des prosternations (ça remuscle le dos), c’est tout. 
Et appeler D., tiens.
Car c’est dans le besoin qu’on reconnait ses amibes (proverbe de gastro-entérologue). 
D. a souffert d’atroces problèmes de dos depuis des années. 
Chez lui aussi je suspecte de la somatisation, mais bon, on va pas voir le Mal partout, non plus, on sait bien qu’il y est.
D'ailleurs je préfère somatiser, quand j'étais cassé dans ma tête c'était bien pire.
Pourtant, la vie de D. avait bien commencé. 
Je me rappelle, en quatrième, au lycée de Lannion, il écrivait un livre sur la Guerre de Sécession. 
Il était passionné par les indiens Peaux-Rouges, il pouvait regarder Little Big Man quatre fois d’affilée dans les cinémas permanents du 5ème arrondissement de Paris, car il en venait, de Paris, et possédait une certaine avance culturelle sur nous autres ploucs armoricains isolés du monde dans la lointaine Réserve de Corée du Nord des Côtes-du-Nord. 
Il avait enregistré la bande-son du film sur un magnétophone portable à cassettes, et nous transmettait son enthousiasme pour la scène de l’attaque du campement cheyenne au bord de la rivière Washita, on entendait surtout les quintes de toux des autres spectateurs du cinéma, mais ça nous faisait quand même rêver.
Le père de D. était restaurateur dans le quartier Saint-Michel, c’était un anar infernal et boit-sans-soif qui passait des nuits entières à jouer au poker avec Boby Lapointe et faisait tourner des chanteurs gauchistes crève-la-faim dans son restaurant.
D’ailleurs, le père de D. était tellement un joyeux luron que sa mère s’était barrée avec D. en Bretagne.
Plus tard, le père de D. est devenu crève-la-faim lui-même, car il se fichait bien du lendemain, et il a considérablement accablé D. de soucis domestiques, du fait de ses dettes accumulées et de sa propension à ne pas gérer ses problèmes logistiques.
Et c’est là que D. a commencé à avoir mal au dos.
Et D., à qui je prédisais un si brillant avenir, a finalement fait une carrière tout à fait banale de postier.
Et n’a rien écrit du tout jusqu’à présent. 
Mais il joue super-bien de la guitare.
Et qui serais-je pour lui en vouloir d’avoir trahi mes espoirs, vu comment j'ai trahi les miens, moi aussi je rêvais d'être écrivain maudit alors que je ne suis que maudit, et encore, que par ma femme, alors on est restés potes. 
Comme on ne se refait jamais d’amis comme ceux qu’on avait à 14 ans, on les garde. 
Ou on se fâche avec, parce que des fois on n’est jamais trahi que par les siens, mais là, non.
Et je vais l’appeler, D., parce que l’Esprit de Noël c’est aussi partager et communier avec les Autres, surtout quand on est cloué au lit et qu’on n’a que ça à foutre, la perspective d’écluser les 1, 5 Téraoctets de films stockés sur un Popcorn Hour A-500 4K Digital Media Player ne me disant rien qui vaille, puisque si l’abondance rassasie, la surabondance écoeure, et puis aussi parce que je ne retrouve pas mon édition de poche du Chemin des âmes de Joseph Boyden que je lui ai prêtée il y a quelques mois lors de son dernier passage avec sa fille de 14 ans à qui on a montré Brazil parce qu’elle ne l’avait pas vu, et on a passé une putain de bonne soirée. Ce film, c'est l'ancêtre élégant de la série Black Mirror.
Et j’aimerais bien faire lire le Chemin des âmes, à ma femme, puisque je la chope en train de lire Les saisons de la solitude, du même Joseph Boyden, sur le canapé.
" Waoulou, c’est vachte bien, Boyden, t’as pas lu le chemin des âmes ?
- Jamais vu. Il est où ?
- Heueueu… il est chez D… enfin je crois qu’il l’a prêté à sa copine…
… mais si je lui en parle il va culpabiliser… et ça sert à rien, de culpabiliser. J’en sais quelque chose.
Mais tu sais quoi, chérie ? D. y bosse à la Poste, y peut peut-être nous le renvoyer pour Noël, et ce en bénéficiant d’un tarif préférentiel ! 
Hein, D. ?"
Je le relance par mail. 
On est alors le 31 décembre, ça fait une semaine que je suis alité, et j’ai le choix entre passer le réveillon tout seul comme un chien d'infidèle, ou suivre ma femme aux Sables d’Olonne pour passer la soirée avec des amis. Mais pour cela, il faut redevenir un bipède à station verticale, et faire 120 km en bagnole.
- Ben oui il est là dans mon armoire le " Boyden", A. me l'a rendu en bonne fille bien élevée. C'est vrai je travaille à la Poste mais je suis un peu éloigné du service depuis le 17 octobre : cata au dos et à la jambe gauche - lumbago, sciatique, cruralgie, protrusion discale (çà veut dire à la limite de la hernie avec plein de souffrances) au niveau L5 S1, affaissement d'une vertèbre, discopathie dégénérative des disques, racine du nerf pour la jambe gauche coincée et en prime abolition du réflexe rotulien au genou gauche !!!
Bon je peux reconduire un p'tit peu (au début que dalle - je faisais pas 5 mètres chez moi sans m'appuyer et me reposer sur le dossier d'une chaise ou le plan de travail de la cuisine, tout ça sans dormir pendant 10 jours, ayant trop mal et ne trouvant aucune position qui pouvait me soulager : le toubib ne m'avait pas donné des cachetons assez fort, on est passé ensuite aux opiacés et à la morphine, faut dire que ça soulage et on se sent bien, bien shooté c'est pas désagréable non plus…

Ben alors là, je suis bluffé : D., qui n’écrit jamais, m’écrit !
Je lui explique que je suis sous corticoïdes et Lamaline (opiacés aussi, mais pas assez), qu’on a passé 4 jours 1/2 à endurer les monologues maniaques de mon père, qu’on n’avait plus visité depuis la mort de maman, qu’ il a été odieux, infect avec nous, avec sa meuf, avec ma soeur et ses gosses… que c’est pour ça que j’ai trouvé la force d’aller prendre l’avion le 26 au matin après avoir passé 36 heures paralysé avec juste la force pour me trainer vomir de douleur aux cabinets et entendre vaguement le  médecin suggérer un scanner parce qu’il croyait à une hernie discale, je voulais pas prendre le risque de rester avec papa à Montpellier, ville arpentée de long en large avant ma lombalgie et où décidément le moche côtoie le sublime…
- Comme te l'a suggéré le toubib de sos médecins à Montpellier, VA PASSER UN SCANNER EN URGENCE !!!
 A savoir que ce genre de problème se règle surtout avec du repos total et pas au boulot ( je sais que pour toi étant indépendant et ton propre patron c'est pas terrible du tout ....).
 Résumé : Va voir ton ou ta généraliste rapidement pour te programmer un scanner et demande lui conseil pour voir un spécialiste du dos ( sur Nantes j'ose espérer pour toi un délai d'attente moins loin que pour moi).
- Yo merci D. pour toutes ces infos, écoute, je vais pas plus mal qu’hier, mais de grandes tâches m’attendent aujourd’hui, comme aller au bureau me faire ma fiche de paye et mon chèque (12 km => jouable) puis au réveillon (132 km => improbable) chez un ami jeune retraité de la SNCF. 
Si je déclare forfait, je t’appelle dans la journée.
- Ben écoute drole de hasard je suis en train de lire également la suite de Boyden, le même bouquin que toi. Moi je serai toi, j'éviterai les 132 km pour le réveillon, 264 km aller-retour si je calcule pas trop mal, même si le retour est pour demain, ils comptabilisent quand même au compteur même si tu n'est pas le chauffeur. Because la voiture c'est fortement déconseillée avec tes pathologies à cause des vibrations. Moi au début je pouvais à peine conduire pendant 15 jours .... Un conseil fais-toi faire une ordonnance par ton toubib pour une ceinture de renforcement et maintien, pour l'instant je conduis toujours avec ma gaine "Playtex" ( c'est pas comme çà qu'elle était intitulée dans nos vieilles pub du siècle dernier).
Ah si sinon je suis aller voir, ne sachant plus à quel Saint me vouer, un mec sur Lannion ( conseillé par une collègue ) qui travaille sur les flux corporels - rien à voir avec notre médecine occidentale - entre le tibétain, chinois, indien et que sais-je encore....
2 séances à une semaine d'intervalle.
- 1ére séance il Il te questionne beaucoup : les blessures du corps sont liés aux blessures psychiques de ton passé. Pas faux. Puis il te manipule très peu que par des points ( j'appellerai d'acuponcture mais avec les doigts et non des aiguilles ) situés sur la tête et le crâne. Il prend en compte l'ensemble du corps et non que tes blessures physiques actuelles pour remettre tout ça d'aplomb. Tu sors de là vidé mais bien.
- 2ème séance, moins de parlotes plus d'action. Tu es allongé sur le dos, torse nu, il te met des petites pierres en partant du front et descendant jusqu'au nombril. A priori ces pierres joueraient un peu - si j'ai bien compris - le rôle de capteurs et transmetteurs lui permettant de se faire un diagnostic sur l'ensemble du corps. Il revient, enlève les petites pierres, les tient dans sa main quelques temps. Puis tu passes sur le ventre et là il t'explique à quels endroits il va agir et dans quel ordre. Ensuite il te manipule énergiquement et trouve facilement les points névralgiques - même là ou tu ne les sentais pas ou plus - en appuyant fortement et tu souffles très fort pour évacuer tout ça. Je dois dire qu'il m'a fait un bien fou !!!
Bon je sais on y croit ou pas.... J'y suis allé sans à-priori en me disant ça ne peut pas être pire ! Bon c'est pas remboursé par la sécu mais quand tu te sens mieux tu es prêt à tout.
Ah si une troisième séance est prévue 3 mois après tout cela. J'ai pris le rdv pour mars, je ne sais pas trop ce qui m'attend, surprise ! 
Bon n'hésite surtout pas à me contacter....

Putain, je l'appelle ! 
Moi qui me cache comme un chat blessé quand je suis malade, je vais pas recommencer mes conneries de cyber-autiste : et l'esprit de Noël, bordel ?
On passe une heure au téléphone. Comme deux vieilles filles. Il me raconte son calvaire, je lui narre le mien avec beaucoup de sobriété. Vous me connaissez. La sobriété, c'est un truc que D. m'a longtemps envié, quand il cautérisait ses blessures intérieures à l'eau de feu. Il trouvait que j'avais du mérite d'avoir cessé de consommer de l'alcool. 
Je lui rétorquais que c'était ça ou crever, mais quand même, la lueur d'admiration refusait de s'éteindre dans ses yeux. 
L'admiration, ce truc qui t'empêche de faire tes propres expériences. 
Bon, D., je sais pas comment il a fait pour se bousiller le dos à ce point, il a quand même pas distribué le courrier à vélo sur des pentes neigeuses, et puis les facteurs, ça fait longtemps qu'ils ont des mobylettes nucléaires, ou solaires, en tout cas je sens qu'il y a de la résilience chez ce garçon qui n'a pas eu la vie facile. On se promet de se tenir au courant. Ca fait longtemps qu'on n'a pas été si proches, pour des amis de 40 ans. Revitalisé par cette communion avec quelqu'un avec qui je ne n'étais plus très intime, je décide de m'arracher à mon grabat, et d'aller réveillonner aux Sables d'Olonne. 
Quelques heures plus tard, j'échouerai sur un canapé, m'évanouissant entre le foie gras et les verrines de saumon, mais qu'importe, j'aurai réussi à m'arracher à la gravité. 
Ma gravité.

Il est beaucoup trop tard pour envoyer chier mon père.
J'aurais dû le faire piquer à la mort de maman, c'est entendu, mais les vétérinaires contactés manquèrent de complaisance.
En l'état, papa reste un repoussoir utile à mes propres débordements égotistes.
"Celui des deux qui reste se retrouve en enfer", chantait Brel dans Les Vieux.
Je pense que papa n'est pas au clair, ni avec ma mère morte, ni avec sa femme vivante, ni avec lui-même.
Et que c'est pour ça qu'il se pourrit la vieillesse, au lieu de la vivre heureuse.
Un peu comme moi, quoi.
Sauf qu'en ce qui me concerne, j'ai encore l'espoir de redresser un peu la barre, alors que lui, ça ne peut que se dégrader, et pour nous (les Warsen) c'est une promesse d'ennuis futurs.
Cela dit, comme disait Flopinette, plus c'est ouvert vers le haut, moins ça se coince en bas.
Par contre, pour l'élégie funèbre de papa, je passerai mon tour.


Ils vécurent heureux,
et eurent plein de petits lumbagos
et de pères toxiques.

écrit assis avec mes mains pleines de doits, et publié après avoir demandé l'autorisation à D.
(mon blog a quand même 5000 visiteurs par jour selon les organisateurs, et 3 selon la police !)