Cher journal,
il n'est que temps de prendre de bonnes résolutions pour l'an neuf (9), car vu comment je n'arrive même plus à écrire sans lunettes, il semble que le temps me soit désormais décompté, au lieu de compté, et ça fait une différence qu'il me plait d'estimer sacrée, plutôt que ça craint.
D'ailleurs, même Dieu semble infoutu de déroger aux lois de l'univers tel qu'il l'a créé, même si mon père est bien parti pour s'affranchir du déterminisme.
En tout cas c'est ce qu'il psalmodiait dans les coins sombres de la maison toute la semaine qui a précédé notre départ au ski.
Allons bon.
Il me faisait un peu l'effet que Marlon Brando marmonnant du T.S. Eliot à la fin de Apocalypse Now a dû exercer sur Francis Coppola quand il s'est aperçu que l'acteur était incapable de jouer le rôle qu'il lui avait écrit. Il m'a fallu éviter de le taquiner (mon père, pas Coppola, et encore moins feu Brando) : je ne ricane ni ne condamne, et me suis bien gardé d'attraper la perche enduite de glu et de matérialisme dialectique qu'il me tendait là, me bornant à la lui signaler, reportant à plus tard le slow burning gag sous cape à la voile entre amis triés sur le volet à propos de s'affranchir du déterminisme, d'autant plus que deux nuits plus tard, j'ai réveillé ma compagne en parlant dans mon sommeil et d'après son témoignage, mon dialecte somnanbulique présentait d'étranges accointances avec les mélopées paternelles.
Ben voyons.
Je comprends mieux avoir voulu expier tant d'orgueil transmis par la lignée par une auto-humiliation si constante et si appliquée, à travers les différents âges de ma vie.
Et de jalouser l'amour inconditionnel (de type maternel mais exercé par aucune mère terrestre de ma connaissance), de le confondre en imagination avec l'amour humain et féminin, et d'avoir passé tant de temps dans une terrible bouderie avant d'accepter qu'il n'avait rien à voir avec le bizness* dans lequel j'étais pris.
Pour l'heure, il m'apparaît que seule l'observation et acceptation desdits déterminismes puisse desserrer quelque peu leur joug, donc y'a pas de quoi ricaner, d'abord.
Pour certains des plus encombrants, je m'efforce de passer mon tour, un jour à la fois.
Pouêt-pouêt.
Donc, cette année, ça serait chouette si je me cantonais à pas plus d'une heure d'ordinateur par jour, parce que ça c'est vraiment la plaie, hein, même si je ne retrouve plus cet entrefilet qui m'avait tant frappé sur ce japonais qui s'est suicidé pour échapper à ses emails, et puis d'abord, où échapper à quoi que ce soit ?
Et puis j'ai lu un article bien flippé sur la cyberdépendance en Asie.
Eux, c'est le jeu qui les domine de son vieux puits de mine, plutôt que les conquêtes féminines qui finissent par .jpg, bien que, maintenant que la seule ressource naturelle quasi-inépuisable concevable soit la meuf virtuelle, le développement soutenable prend un autre visage (rires.)
Au ski, je me suis vu et entendu pester contre les Espagnols, qui s'obstinent à ne pas remplir les sièges laissés vacants par les français dans les télésièges à quatre ou six places qui se présentent à eux, ils préfèrent s'agréger par petits groupes ibères et grumeler dans les files d'attente, alors après comment tu veux qu'on fasse l'Europe si déjà on est pas foutus de brinquebaler ensemble dans les agrès de remorquage prévus à cet effet et qu'on se mure dans cette socialité du mépris mutuel héritée d'un autre âge ?
Et puis, au bout de 6 jours de descentes à toute berzingue, l'insatisfaction était toujours plus forte que le désir de poudreuse du début du séjour.
Snniirrffllll.
Nature purement addictive de la vitesse, que ce soit à ski, ou sur les autoroutes de l'information.
(relire du papier plutôt que de l'écran est un bon antidote)
Au ski, j'ai vu aussi combien, en bas des pistes, le tabac était une plante épyphite (= plantes qui poussent en utilisant d'autres plantes comme support) de l'humain. Dire qu'il y a deux ans j'étais comme ça, à m'en griller une à 2400 mêtres d'altitude, sur le tire-fesses, dès que j'en avais la possibilité... je remercie le Ciel que l'obsession m'ait été retirée, tiens, c'est toujours ça de pris.
D'autant plus que j'ai eu ma location inespérée de dernière minute grâce au fait que la dame que j'avais contactée n'avait pas eu le temps de proposer son appartement à des agences pour les fêtes, vu que son mari est en très mauvaise posture à l'hopital avec un cancer du poumon; j'ai retrouvé des petits cigarillos dans l'appartement familial qu'elle nous a loué en direct, qui ne feront plus mal à ce pauvre homme pour lequel j'ai une pensée émue puisque je lui dois une semaine à la neige, et j'ai mené ma petite enquète pour obtenir cette vérité avant-dernière.
Et vaut-il mieux faire rêver les gens ou leur mettre le nez dans la merde ?
Est-ce qu'un jour ils n'y sont pas confrontés, quels que soient leurs efforts pour se dérober à un réel "insoutenable" ? c'est la question que je me suis posé devant l'absurde des programmes télé, que je n'avais pas regardés depuis longtemps, et le soir après 6 heures de ski c'était la seule activité soutenable avec la préparation du kilo de pâtes de semoule de blé dur qu'on engloutissait quotidiennement et la lecture du Lucius Shepard laissé par le père et la mère Noël.
Et j'ai été assez sidéré par l'inanité des émissions, qu'il s'agisse de divertissement ou de pseudo-magazines et reportages, je trouve que le niveau baisse. Vite.
Et c'est carrément les chaines publiques qui donnent le mauvais exemple, en jouant les maisons de retraite complaisantes aux animateurs passés de mode des opérateurs privés, je vais écrire de ce pas à monsieur de Carolis pour lui dire de quel bois je me chauffe.
* Est-il meilleur d'aimer ou d'être aimé ?
Ni l'un ni l'autre si notre taux de cholestérol excède 5,35. (Woody Allen)
Pour aimer Dieu, ou la Nature dans sa perfection, faut pas être rancunier. La Nature nous aime d'un amour inconditionnel, mais ça va pas l'empêcher, par le jeu des déterminismes et du thermostat qu'on lui a tout bouzillé, d'augmenter la température d'un nombre inédit de degrés d'ici peu de temps.
Vas-y, Seigneur, augmente-là dès maintenant d'au moins 10 degrés chez moi, quitte à la baisser d'autant chez ces pauvres africain(e)s, les contraignant à aggraver leur dette extérieure par l'achat massif de bermudas en pilou.
Envoie-moi un signe, putain, que je cesse de jalouser ton amour inconditionnel, ptdr et tldc !
("pété de rire" et tu "l'as dans l'cul" en langage jeune selon Elie Seimoun)
N'empêche que dans le temps, Flo s'était fendue de ce post homérique :
Kaios Kagathos : j'aime cet homme.
Flocrate : "aimer quelqu'un" n'a pas de sens.
KK : Ah bon ?
F : L'aimes-tu pour une qualité qu'il possède ou pour autre chose ?
KK : je l'aime parce qu'il est lui.
F : Ce "lui" tient-il à une qualité spécifique ou à autre chose ?
KK : A autre chose.
F : "Lui" ne dépend donc pas des qualités
KK : assurément non.
F : Donc si demain il perd une jambe tu l'aimeras toujours
KK : Bien sûr
F : Et s'il lui pousse un pelage noir et qu'il se transforme en chauve-souris, tu l'aimeras encore.
KK : Euh... oui.
F : Et en arbre et en montagne ?
KK : Euh... sans doute...
F : Donc il peut être tout et tu l'aimeras encore.
KK : Ben euh...
F : Donc c'est clair, soit ton amour ne tient à aucune de ses qualités et il est universel, soit il tient en fait à des qualités spécifiques, et là ce n'est plus "lui" que tu aimes mais ses qualités, et ça, c'est du bizness, pas de l'amour.
(Explication : le hic c'est que l'ego est un agrégat, donc "personne" ne peut aimer "personne", il n'y a que Dieu qui peut s'aimer lui-même. Donc tout amour qui n'est pas universel n'est pas de l'amour. On a le droit de faire des préférences, mais ce sont des préférences, pas de l'amour (...) Parce que sinon ce serait de l'attachement ou tout au moins une préférence, et là ce serait une autre histoire. L'amour est par nature non-limité. En fait tu te reconnais toi-même en chaque chose, ou plus exactement Dieu se reconnaît lui-même à travers toi. Sans compter que Dieu et toi n'étant pas séparés... bref.
Flo.
il n'est que temps de prendre de bonnes résolutions pour l'an neuf (9), car vu comment je n'arrive même plus à écrire sans lunettes, il semble que le temps me soit désormais décompté, au lieu de compté, et ça fait une différence qu'il me plait d'estimer sacrée, plutôt que ça craint.
D'ailleurs, même Dieu semble infoutu de déroger aux lois de l'univers tel qu'il l'a créé, même si mon père est bien parti pour s'affranchir du déterminisme.
En tout cas c'est ce qu'il psalmodiait dans les coins sombres de la maison toute la semaine qui a précédé notre départ au ski.
Allons bon.
Il me faisait un peu l'effet que Marlon Brando marmonnant du T.S. Eliot à la fin de Apocalypse Now a dû exercer sur Francis Coppola quand il s'est aperçu que l'acteur était incapable de jouer le rôle qu'il lui avait écrit. Il m'a fallu éviter de le taquiner (mon père, pas Coppola, et encore moins feu Brando) : je ne ricane ni ne condamne, et me suis bien gardé d'attraper la perche enduite de glu et de matérialisme dialectique qu'il me tendait là, me bornant à la lui signaler, reportant à plus tard le slow burning gag sous cape à la voile entre amis triés sur le volet à propos de s'affranchir du déterminisme, d'autant plus que deux nuits plus tard, j'ai réveillé ma compagne en parlant dans mon sommeil et d'après son témoignage, mon dialecte somnanbulique présentait d'étranges accointances avec les mélopées paternelles.
Ben voyons.
Je comprends mieux avoir voulu expier tant d'orgueil transmis par la lignée par une auto-humiliation si constante et si appliquée, à travers les différents âges de ma vie.
Et de jalouser l'amour inconditionnel (de type maternel mais exercé par aucune mère terrestre de ma connaissance), de le confondre en imagination avec l'amour humain et féminin, et d'avoir passé tant de temps dans une terrible bouderie avant d'accepter qu'il n'avait rien à voir avec le bizness* dans lequel j'étais pris.
Pour l'heure, il m'apparaît que seule l'observation et acceptation desdits déterminismes puisse desserrer quelque peu leur joug, donc y'a pas de quoi ricaner, d'abord.
Pour certains des plus encombrants, je m'efforce de passer mon tour, un jour à la fois.
Pouêt-pouêt.
Donc, cette année, ça serait chouette si je me cantonais à pas plus d'une heure d'ordinateur par jour, parce que ça c'est vraiment la plaie, hein, même si je ne retrouve plus cet entrefilet qui m'avait tant frappé sur ce japonais qui s'est suicidé pour échapper à ses emails, et puis d'abord, où échapper à quoi que ce soit ?
Et puis j'ai lu un article bien flippé sur la cyberdépendance en Asie.
Eux, c'est le jeu qui les domine de son vieux puits de mine, plutôt que les conquêtes féminines qui finissent par .jpg, bien que, maintenant que la seule ressource naturelle quasi-inépuisable concevable soit la meuf virtuelle, le développement soutenable prend un autre visage (rires.)
Au ski, je me suis vu et entendu pester contre les Espagnols, qui s'obstinent à ne pas remplir les sièges laissés vacants par les français dans les télésièges à quatre ou six places qui se présentent à eux, ils préfèrent s'agréger par petits groupes ibères et grumeler dans les files d'attente, alors après comment tu veux qu'on fasse l'Europe si déjà on est pas foutus de brinquebaler ensemble dans les agrès de remorquage prévus à cet effet et qu'on se mure dans cette socialité du mépris mutuel héritée d'un autre âge ?
Et puis, au bout de 6 jours de descentes à toute berzingue, l'insatisfaction était toujours plus forte que le désir de poudreuse du début du séjour.
Snniirrffllll.
Nature purement addictive de la vitesse, que ce soit à ski, ou sur les autoroutes de l'information.
(relire du papier plutôt que de l'écran est un bon antidote)
Au ski, j'ai vu aussi combien, en bas des pistes, le tabac était une plante épyphite (= plantes qui poussent en utilisant d'autres plantes comme support) de l'humain. Dire qu'il y a deux ans j'étais comme ça, à m'en griller une à 2400 mêtres d'altitude, sur le tire-fesses, dès que j'en avais la possibilité... je remercie le Ciel que l'obsession m'ait été retirée, tiens, c'est toujours ça de pris.
D'autant plus que j'ai eu ma location inespérée de dernière minute grâce au fait que la dame que j'avais contactée n'avait pas eu le temps de proposer son appartement à des agences pour les fêtes, vu que son mari est en très mauvaise posture à l'hopital avec un cancer du poumon; j'ai retrouvé des petits cigarillos dans l'appartement familial qu'elle nous a loué en direct, qui ne feront plus mal à ce pauvre homme pour lequel j'ai une pensée émue puisque je lui dois une semaine à la neige, et j'ai mené ma petite enquète pour obtenir cette vérité avant-dernière.
Et vaut-il mieux faire rêver les gens ou leur mettre le nez dans la merde ?
Est-ce qu'un jour ils n'y sont pas confrontés, quels que soient leurs efforts pour se dérober à un réel "insoutenable" ? c'est la question que je me suis posé devant l'absurde des programmes télé, que je n'avais pas regardés depuis longtemps, et le soir après 6 heures de ski c'était la seule activité soutenable avec la préparation du kilo de pâtes de semoule de blé dur qu'on engloutissait quotidiennement et la lecture du Lucius Shepard laissé par le père et la mère Noël.
Et j'ai été assez sidéré par l'inanité des émissions, qu'il s'agisse de divertissement ou de pseudo-magazines et reportages, je trouve que le niveau baisse. Vite.
Et c'est carrément les chaines publiques qui donnent le mauvais exemple, en jouant les maisons de retraite complaisantes aux animateurs passés de mode des opérateurs privés, je vais écrire de ce pas à monsieur de Carolis pour lui dire de quel bois je me chauffe.
* Est-il meilleur d'aimer ou d'être aimé ?
Ni l'un ni l'autre si notre taux de cholestérol excède 5,35. (Woody Allen)
Pour aimer Dieu, ou la Nature dans sa perfection, faut pas être rancunier. La Nature nous aime d'un amour inconditionnel, mais ça va pas l'empêcher, par le jeu des déterminismes et du thermostat qu'on lui a tout bouzillé, d'augmenter la température d'un nombre inédit de degrés d'ici peu de temps.
Vas-y, Seigneur, augmente-là dès maintenant d'au moins 10 degrés chez moi, quitte à la baisser d'autant chez ces pauvres africain(e)s, les contraignant à aggraver leur dette extérieure par l'achat massif de bermudas en pilou.
Envoie-moi un signe, putain, que je cesse de jalouser ton amour inconditionnel, ptdr et tldc !
("pété de rire" et tu "l'as dans l'cul" en langage jeune selon Elie Seimoun)
N'empêche que dans le temps, Flo s'était fendue de ce post homérique :
Kaios Kagathos : j'aime cet homme.
Flocrate : "aimer quelqu'un" n'a pas de sens.
KK : Ah bon ?
F : L'aimes-tu pour une qualité qu'il possède ou pour autre chose ?
KK : je l'aime parce qu'il est lui.
F : Ce "lui" tient-il à une qualité spécifique ou à autre chose ?
KK : A autre chose.
F : "Lui" ne dépend donc pas des qualités
KK : assurément non.
F : Donc si demain il perd une jambe tu l'aimeras toujours
KK : Bien sûr
F : Et s'il lui pousse un pelage noir et qu'il se transforme en chauve-souris, tu l'aimeras encore.
KK : Euh... oui.
F : Et en arbre et en montagne ?
KK : Euh... sans doute...
F : Donc il peut être tout et tu l'aimeras encore.
KK : Ben euh...
F : Donc c'est clair, soit ton amour ne tient à aucune de ses qualités et il est universel, soit il tient en fait à des qualités spécifiques, et là ce n'est plus "lui" que tu aimes mais ses qualités, et ça, c'est du bizness, pas de l'amour.
(Explication : le hic c'est que l'ego est un agrégat, donc "personne" ne peut aimer "personne", il n'y a que Dieu qui peut s'aimer lui-même. Donc tout amour qui n'est pas universel n'est pas de l'amour. On a le droit de faire des préférences, mais ce sont des préférences, pas de l'amour (...) Parce que sinon ce serait de l'attachement ou tout au moins une préférence, et là ce serait une autre histoire. L'amour est par nature non-limité. En fait tu te reconnais toi-même en chaque chose, ou plus exactement Dieu se reconnaît lui-même à travers toi. Sans compter que Dieu et toi n'étant pas séparés... bref.
Flo.