mercredi 25 octobre 2023

Le vélo dans l'eau

Début septembre, mon vélo a fini par être réparé. J'avais eu un petit accident sans gravité en allant au bureau, un mois plus tôt. De vous à moi, j'allais un peu vite, et je circulais sur un trottoir, j'étais donc en tort. Ca reste entre nous. J'ai réussi à sauter du vélo avant la collision, sans me blesser, et c'est lui qui a tout pris. J'aimerais bien que quelqu'un ait filmé la scène, pour comprendre comment j'ai fait. Ca sent l'intervention divine, que je ne méritais pas franchement, sur ce coup-là. M'enfin, c'est pas moi qui décide : la survenue des miracles n'est pas une méritocratie, ça marche plutôt comme le résume un copain "I prayed to god for a bicycle, but then I realized god doesn't work like that, so I stole a bicycle and prayed for forgiveness." En l'espèce, pendant que le mien était en réparation, j'ai emprunté celui de mon fils, qui m'a regardé partir chaque matin d'un œil inquiet et soupçonneux.
Je ne peux rouler que printemps-été, mon amplitude horaire fait qu'entre octobre et mars, il fait trop nuit pour que j'aille et revienne du bureau à vélo, un parcours de 25 km aller/retour, essentiellement constitué d'un chemin de halage le long de la Sèvre Nantaise, emprunté par les piétons, leurs bambins, leurs aïeuls, leurs chiens, les SDF, les migrants, réfugiés en attente d'asile climatique et autres Palestiniens égarés, et enfin les cyclistes; c'est donc un laboratoire de partage de l'espace public au quotidien. 
Le cycliste se doit de ne pas effrayer le piéton, qui reste prioritaire, en signalant sa présence par un avertisseur sonore avant de le frôler à mort à la vitesse ahurissante de 20 km/h, dans un hurlement de freins mal huilés, pour éviter son chien, qui ne regarde et n'écoute que la voie de son maitre, et n'anticipe pas du tout la trajectoire des autres usagers de la route. Arf.

Même pas mal.
Même pas mort.
La saison cycliste s'est achevée fin septembre, alors que le Never Ending Summer 2023 était loin d'avoir jeté ses derniers feux. Elle a coïncidé avec une marée haute d'un coefficient de 109 lors de mon ultime trajet de retour, le dernier jour de mon forfait mobilité, conclu au semestre avec l'entreprise, qui me verse une prime mensuelle de 40 euros, à condition que je pédale tous les jours, sans faire aucunement usage de mon véhicule à combustible fossile. 
En fin d'année, la prime est intégralement dépensée en pneus de rechange et en réparations diverses, parce que ça me fait quand même 2400 km par an, y'a un coefficient d'usure, en plus des incidents de parcours et des accidents voyageur. 
Malgré mon logiciel conscience_lucidité, qui tourne toujours en tâche de fond quand je suis au guidon de mon cheval de fer, j'ai au moins un pépin par an. 
Il y a les vieillards maniaques, à ne pas effaroucher, mais il y a aussi les chiens, imprévisibles, et aussi des escarmouches avec les chats, qui bondissent des fossés à la poursuite des souris, en oubliant toute prudence, et c'est pas moi qui leur jetterai l'abbé Pierre. 
25 km, ça fait 2 fois 50 minutes/jour de vigilance allumée tout le temps; sur 50 minutes, il y a forcément des trous conscientiels, des instants d'inattention. Or, si Dieu pardonne, le cyclisme rarement. Je ne suis pas de la génération qui porte un casque à vélo, mais suite à une chute mémorable (j'avais emprunté le vélo électrique de ma femme et n'avais pas bien mesuré la vitesse acquise), j'en ai acheté un jaune fluo, et même que je le porte, et c'est pas du luxe.
Ce soir-là, au moment où je rejoins le chemin de halage, la Loire est déjà passée par dessus l'écluse de Pont-Rousseau, elle remonte généreusement dans son affluent, et les bords de Sèvre sont inondés. Me voici débarrassé du risque piéton.

La Sèvre à marée descendante.
Qui l'eut crue ?

Au début, je trouve ça rigolo de rouler dans 10 à 20 cm d'eau, c'est un plaisir innocent et jubilatoire, ça me ramène à mon enfance, mais elle est un peu boueuse (l'eau, pas mon enfance) (en été, le bassin versant de la Sèvre n'est alimenté que par les usines d'épuration, j'ai appris ça en montant un reportage local sur la sécheresse persistante) et il faut rouler doucement, je ne sais jamais avant d'aborder une section immergée si la profondeur va tolérer mon passage et si je vais pouvoir poursuivre mon trip de vélo d'eau ou rebrousser chemin pour éviter la noyade. 
Daniel Goossens, " Les 2 roues"
Quand la berge est inondée sur plusieurs centaines de mètres, ça devient chaud patate. Je me transforme en Bernard Lavilliers du trajet domicile/bureau. Je suis en short et en sandales, j'avais anticipé, mais si je tombe, j'ai toutes mes affaires dans mon sac à dos, l'électronique embarquée appréciera moyen.  La chaussée engloutie, ça me rappelle aussi l'Afrique, un voyage à moto en Tanzanie à la saison des pluies. 
Des préados du quartier, réfugiés sur un banc déjà à moitié submergé pour assister au spectacle de cette petite apocalypse liquide et silencieuse, me saluent avec des bravos et des encouragements. Ils n'en reviennent pas de voir le vieux Charley passer à vélo tandis que l'eau continue à monter; comme il y a quelques négrillons parmi eux, ça y est, je suis en Louisiane, au coeur du bayou. Grâce à ce coefficient de 109, l'imagination m'entraine enfin là où je souhaite aller, et non là où l'avidité m'accule (le mot est faible). Je rentre chez moi un peu mouillé, et pour tout dire déguisé en zone humide, mais transfiguré par cette expérience de vélo dans l'eau. 
Je suis un précurseur : selon les plus récentes simulations du GIEC, dans 30 ans, le bassin hydrographique de la Loire se sera considérablement élargi, et tout le monde pédalera dans les flaques; sauf moi, dont le caveau sera inondé. 

En rose, projection à 30 ans du bassin hydrographique de la Loire autour de Nantes.
Je ne place pas le sticker "Vous êtes ici", 
sinon vous allez vous inviter à l'apéro.
Encore plus fort : ci-dessous, un mec sur Reddit a eu l'idée, pour rigoler dit-il, de faire une carte de la Bretagne à niveau marin +70m, quand tous les glaciers auront fondu. 
La ville de Rennes a disparu sous les eaux et celle de Nantes est devenue Nantes-sur-mer. 
Cette fonte semble inéluctable, quoi que nous fassions dans le futur.
C'est les autonomistes bretons qui vont être contents, à force de réclamer l'indépendance, ils vont l'avoir sans combattre, et ils n'auront plus à envier l'insularité des Corses pour exacerber leur sentiment d'identité.



Références & liens à consulter  pour hâter l'avènement de Waterworld :
(à chaque fois que vous cliquez, n'oubliez pas que vous faites chauffer un data Center en Californie, dit-il en cliquant comme un ouf) 

https://webzine.voyage/france/cartes/montee-des-eaux-en-france/


https://www.climatecentral.org/ 


Epilogue
un peu comme la drogue, quoi.
Quand donc sortirai-je de cette problématique ?


dimanche 22 octobre 2023

Truffes magiques : Les ravages de la guedro (4)

Précédemment, dans le feuilleton truffes magiques :

Après avoir percuté de plein calfouette (quoique de façon temporaire) le mur de la honte mi-septembre, je navets plus trop envie de voyager avec les truffes magiques. 
Si c'était pour me retrouver dans un pays déjà visité plein de fois, et bien que comme le rappelle le poète-pouette, la pornographie soit un dépliant touristique pour un pays merveilleux auquel on n'arrive jamais, alors que je croyais l'avoir quitté depuis un bout de temps, merci bien, c'est gentil de laisser votre siège à un vieillard maniaque, mais je descends à la prochaine, le jeu en valait-il vraiment la chandelle, surtout après l'avoir jadis fumée par les deux trous ?  
Naguère, la quête du sens était mieux balisée.
Hormis les cures de micro-dosage, étalées sur plusieurs semaines, qui me réussissaient assez mieux parce que j'avais l'impression d'y ajouter quelques maillons à la chaine qui me retient au mur de mon histoire personnelle, malgré les problèmes de sommeil de plus en plus léger engendrés en fin de nuits de plus en plus courtes, les prises de risque lors des séances truffières plus intenses généraient des résultats décevants, aléatoires, chaotiques, au goût de pétard mouillé, mais pas dans le sens souhaité, mon Dieu ne nous délivrez pas de l'ambiguïté, bref j'étais loin des amours de près, et tout aussi éloigné de la rencontre enthousiaste entre le consommateur et le produit, comme on dit après-coup dans les groupes de parole des ex-toxicos abstinents. Tox un jour, tox toujours, c'est le bon sens commun et populaire, aussi près de chez nous que le délit crédit agricole quand les publicitaires faisaient tourner le monde avant-guerre, ne précisons pas laquelle, nous serions en retard d'une.

Alors, sans doute grâce aux ressources mises en branle par la vertu de ma demi-heure de méditation quotidienne, je me dis que les psychédéliques sont comme un système de traitement informatique un peu compliqué genre Chat_GPT, d'où ressortira toujours tout ce qu'on lui a rentré dedans, mais pas forcément dans le bon ordre. 
On dira qu'au niveau de l'aoutepoute, con, on voit émerger tout ce qu'on a mis en inepoute, macaniche ! mais selon une hiérarchie éditoriale qui nous reste opaque, et qui ne devient intelligible qu'une fois que le feu d'artifices est fini, qu'on a rangé les chaises et mouché les lampions. Et puis aussi, le mot clé dans paradis artificiels, ça serait-y pas le même que dans intelligence artificielle, c'est-à-dire artificiel
Quand même, si je change l'inepoute, il me semble raisonnable d'espérer voir évoluer l'aoutepoute, à l'heure de la sortie; ça m'a l'air pas si con, con. Au moins ça me donne une hypothèse de travail. Dans cette attente, j'ai profité des soldes de fin d'été du Never Ending Summer des Zamnésiques pour acheter des kits de culture de champignons, qui semblent plus faciles et amusants à produire et à conserver que le kit de truffes qui croupit dans un tiroir métallique de mon bureau depuis une vingtaine de semaines sans que je le voie se couvrir de la moisissure promise. Je devrais peut-être essayer de le ranimer à coups de tapis chauffant, mais la confiance n'y est plus.
Après avoir acquis les rudiments mycologiques auprès des gars de chez Rustica, je me lance, et au bout de deux semaines je vois poindre la première récolte, alors même qu'en forêt la persistance de la sécheresse décourage les amateurs de girolles.

c'est moi, ou ça ressemble à ce que je pense ?
C'est un peu magique, la vitesse à laquelle poussent les champignons, alors on les pèse, on les fait sécher, on les met dans un bocal, on remet le bac en culture et on n'en parle plus, sauf sur son blog hyper-secret, parce que on n'est pas montés bien haut, on est restés prudents et on a appris à gérer depuis la précédente session de microdosage de printemps, qui nous avait fait chauffer le moteur jusqu'au diraisonnable, mais ça fait déjà deux semaines qu'on essaye de redescendre retrouver le sommeil en s'abstenant de tout produit modifiant le comportement, pour ne pas remettre du charbon dans la chaudière.  Bien sûr, la possibilité de faire un mauvais voyage quand on sera de retour aux affaires n'est jamais à exclure.
Mais bon, chez Castorama on connait la musique, au pire, on passera quelques moments désagréables, mais si on parvient à conserver les yeux ouverts, on aura fait avancer la science, au moins sa frange quantique qui défriche la nombrillologie en essayant de ne pas s'éventrer sur ses écueils glacés et glissants.
Parfois, un doute nous saisit; est-ce qu'on serait pas par hasard en train de se mettre le doigt, ce fameux doigt qui nous montrait la lune, dans l'œil ? Est-ce qu'on se sent de taille à devenir un Bouddha à gélules, comme dans le générique d'American Gods ?



Heureusement, ce n'est que de la télé; dans la Réalité Réelle Ratée chère à mon maitre Louis-Julien Poignard, les Dieux ne font pas de Razzia sur la chnouff. Encore que, si je me récite le mantra de wikipédia pour me remotiver, la collusion drogues / quête du divin est avérée dans de nombreuses cultures humaines à travers les âges.

Typiquement, seuls le fondateur et quelques-uns de ses premiers disciples sont en mesure de revendiquer l’autorité qui découle d’une expérience directe du sacré. Pour ceux qui leur succèdent, il ne reste que la maigre consolation des histoires, des rites symboliques et de la foi. Le temps atténue la puissance originelle de l’expérience, qui se déroule désormais par l’intermédiaire des prêtres. Mais le culte des psychédéliques offre une promesse extraordinaire, celle pour quiconque d’accéder, à tout moment, à l’expérience religieuse originelle grâce au sacrement, qui se trouve être une molécule psychoactive. La foi devient dès lors superflue.

Et l'année dernière, quand j'ai commencé la méditation en pressentant qu'il me fallait être "clean" avant de goûter les champis, j'avais l'impression de camper à la sortie d'un égout : j'observais l'apparition de pensées peu agréables à leur point d'émergence dans le mental. C'était un peu pénible, même en essayant de ne rien en attendre, comme nous le suggère vivement la littérature spécialisée. Cette année, je ne médite que 25-30 minutes le matin, mais les pensées sont notées "agréables" au lieu d'être taxées de pénibles - vous allez me dire, tout ça, c'est la valse des étiquettes organisée par la grande distribution. Mais ça rend la méditation difficile, car les pensées agréables s'accrochent plus aisément que celles qui étaient vécues comme médiocres ou nauséabondes, et qui allaient se cacher tellement elles étaient gênées d'avoir honte d'elles-mêmes. 
Finissons ce billet d'humeur un peu mossad par un message d'espoir de notre sponsor :


Une étude a révélé que les expériences de type mystique induites par la psilocybine entraînaient des changements positifs plus durables, notamment l'altruisme, la gratitude, le pardon et le sentiment d'être proche des autres, lorsqu'ils étaient associés à une pratique régulière de méditation et à un programme de soutien à la pratique spirituelle.

liens à explorer avant la prochaine réunion de section :

- conférence non gesticulée sur les champis
- les filles et le microdosage
J'ai bien l'impression que les gens, et moi le premier, utilisent le microdosage comme une sorte d'antidépresseur homéopathique pour augmenter leur efficience sociétale. 
Timothy Leary doit s'en retourner dans sa tombe, et c'est bien fait pour lui.

Le Très Saint Livre
qui m'a mis le feu aux poutres 

Post scriptum
liens retrouvés le lendemain dans mes tablettes :
et plus généralement
dans les versions traduites spontanément en français par mon pécé de bureau, la cerise sur le gateau c'est les thérapeutes psychédéliques :
C'est sans doute les gens rencontrés par Michael Pollan quand il écrivait son livre. 
C'est la traduction automatique qui me fait sourire, quand elle crée des néologismes comme "conseillère certifiée en matière d'alcool et de drogues (CADC), facilitatrice de respiration". 
Qui serais-je pour me moquer des facilitateurs de respiration ? Ne présumons pas des besoins du turfu, qui, pour advenir, prend des chemins bien tortueux. Benalla Akbar.

mercredi 18 octobre 2023

Truffes magiques : Devenez celui que vous êtes déjà ! (3)

J'ignore pourquoi le conditionnement sous vide
garantit la pérennité des microdoses au frigidaire
bien plus longtemps que les doses "normales".
Je passe 3 semaines sans rien tester, et tant pis si les truffes moisissent au frigo, je ne veux pas me ruer dessus quand ma femme repart en vacances et mon fils au boulot. Je refuse de me droguer. Je ne veux pas non plus revivre mes erreurs de jeunesse, sans être en capacité physique et mentale de les encaisser, et en tirer d'amères leçons, que j'applique déjà sur d'autres produits moins exotiques, alcool et tabac, dont je suis abstinent depuis de nombreuses lunes. Finalement, c'est pas très grave si ça foire, avec les truffes, je suis déjà sous microdosage depuis mi-juillet, un gramme de "truffes magiques" (en fait du mycélium de champis) conditionnées sous vide tous les trois jours, selon le protocole de Fadiman, alors que je croyais que c'était celui de Paul Stamets tel qu'on le voit cité, chez Zamnesia (la World Company des bonbons acidulés) et sur les forums de psychonautes plus ou moins intrépides. 
D'ailleurs, il faut que je fasse bientôt une pause, la cure ne doit pas dépasser 10 semaines, si j'en crois les mêmes forums d'usagers (parfois usagés). La nouvelle variété testée "ENERGY" induit chez moi un effet euphorisant assez sensible, j'ai l'impression d'être à 0.5 g comme dans le film "Drunk", donc je cesse rapidement d'en prendre avant d'aller travailler, je ne veux pas saouler mes collègues et perdre en productivité. 
J'en viens à absorber la microdose le soir avant d'aller me coucher. 
Qu'importent l'ivresse et le flacon, si on a la conscience un peu élargie.


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expérience du 16 septembre

Néanmoins soucieux de la péremption probable des truffes conservées au frigidaire depuis début aout, je mâchonne 15 grammes de la variété "Utopia" un soir à 20h25. Je ne suis plus du tout motivé. Je pense m'être fait avoir par les rois du marketing du développement personnel. Mes expériences de l'été ne sont pas à la hauteur de celles évoquées par Michael Pollan dans son ouvrage de référenceDonc on va voir qu'est-ce que ça fait quand on prend de la psilo sans croire à ses effets. Deux heures plus tard, léger accroissement de la sensibilité musicale, et puis je me laisse prendre par "The Village", film d'atmosphère au twist tordu de M. Night Shyamalan, (malan et demi) dont le mystère vaut bien mieux que sa résolution cauteleuse. Le film se veut sans doute une parabole sur la frilosité et le repli spirituel de l'Amérique. Ce n'est qu'une fable bancale et assez navrante, sur une bande d'Amish laïques qui se complaisent dans le jansénisme. 
Au moins j'ai appris ce nouveau mot, en parcourant le lendemain les critiques de l'œuvre sur hallucinéAprès le film, je suis sorti sur ma terrasse en bois exotique, et j'ai passé un moment à regarder les étoiles, en regrettant l'éclairage périurbain, mais je me sens quand même tout d'un coup un privilégié, de disposer de tout cet espace, de ce petit bout de canopée qui s'avance au-dessus de chez moi. Au temps pour l'expansion de la conscience de la jouissance du propriétaire, qui ne devrait pas durer puisque mon voisin met un bout de sa parcelle mitoyenne en vente, dans l'espoir que quelqu'un veuille bâtir son habitation sur une bande de terrain toute en longueur de 500 m2, dont il espère tirer 185.000 €, et il lui faut aussi détruire sa piscine s'il trouve acquéreur. Je ne peux qu'avoir foi dans le marasme immobilier et l'inflation des couts de construction pour penser que ma paix restera inviolée encore un moment.  La nuit est tiède, et j'ai peut-être une légère amélioration du discernement concernant la préconscience de mes processus mentaux en amont de leur émergence, encore que dit comme ça, on se demande de qui se moque-t-on.  
Ben de toi, couillon de la lune.

ma terrasse, ici légèrement anamorphosée par les psychotropes, mais sinon elle est bien.


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expérience du 18 septembre


De déception en rendez-vous manqué, j'en viens à tenter le diable, ou tout du moins l'expérience interdite : suite aux conseils donnés par un ami pour « booster » l'effet truffier, je mélange une dose de 15 grammes de truffes Atlantis + 15 grammes de Utopia, je les broie au mini-mixer et je les laisse infuser 15 minutes dans du jus de citron.
A postériori, qu'en dire ? 
Putain de la vache de sa mère en tongs à la Bourboule. 
Sur le moment, ça m'a juste mis par terre, et j'ai totalement perdu le contrôle, si tant est que je l'eusse jamais eu; et celui qui prit possession du navire en mon absence, c'était pas le Supramental, ça c'est sûr madame Chaussure. Tout à fait le même type de perte d'identité et de squattage de soi par des entités basses du front que pendant une ivresse alcoolique. 
avec Zamnesia vous y seriez déjà,
avec Gévéor vous y seriez encore !
(merci Coluche)
En amont, je me disais "elles sont en train de périmer au frigo, je peux y aller, ça va encore rien me faire", et il s’est avéré qu’elles n'étaient pas si périmées que ça, ou alors le lemon tek démultiplie les effets, bref, alors que j'étais tranquillement la tête encastrée dans mon canapé à écouter un disque de psybient emprunté à la médiathèque sur un serveur russe, belle mentalité, disque qui déroulait ses ors et ses pompes et convertissait les sons en images architecturales, je perdis conscience et m'absentai un moment; quand je me réveillai j'étais en train de contempler d'un œil épouvanté démons & succubes en train de s'empapaouter sur un stream HD de ma tablette tactile en essayant de me tirer sur l'Anouilh, qui restait flaccide. (terme utilisé en médecine pour qualifier un organe, ou tout autre tissu du corps humain, qui a perdu de sa réactivité et de son tonus, suite à une pathologie ou à une réaction à une substance) 
Des démons ? aucun doute là-dessus, je sais ce que c'est, parole d'expert, j'en ai déjà croisés en rêve et dans des films de David Lynch, et des succubes, ou "démon judéo-chrétien féminin qui séduit les hommes et abuse d'eux durant leur sommeil et leurs rêves", j'en ai beaucoup fréquenté sur internet, ce non-lieu où les hommes rêvent beaucoup. Tout habillés, et parfois sans leur bas de pyjama. 

On a dit beaucoup de mal de ce monsieur Satan, jusqu'à ce que Roman Polanski
le dédiabolise dans Rosemary's Baby, profitant de la libéralisation des mœurs de 1968.
Après avoir revu le film, je ne suis pas certain qu'il faille dissocier l'homme de l'oeuvre. 
"Il renversera les puissants et dévastera leurs temples !: Il rachètera ceux que les bons ont persécuté,
et vengera ceux qu’on brûle, qu’on torture et qu’on damne !"
On dirait un plaidoyer pour l'alternance droite / gauche, 
impoissible tant que Macron occupe les deux bords de l'échiquier. 
Benalla Akbar !

Depuis l'écran de ma tablette, les bougresses m'adressaient des œillades moqueuses et des grimaces grotesques, tout en se faisant grimper dessus par des ayatollahs furibards, prédicateurs turgescents qui maudissaient ma présence voyeuriste, qu'ils détectaient aussi, d'où leur colère. Et je ne peux pas leur donner tort. Qu'est-ce que je foutais là ? C'est quoi, cette débandade soi-disant extra-lucide ? C'est vrai que je ne lis que des trucs sur les démons en ce moment, c'est un peu logique que ça soit ça qui ressorte. Quand je dis que je vois des démons, c'est peut-être juste une partie de moi qui se prend les pieds dans l'avidité (la peur du manque).Ça ne serait pas improbable, et ça me pendait au nez. Et je manquais de préparation, j'avais prophétisé l'an dernier qu'il me faudrait plusieurs mois de nettoyage corporel et spirituel (méditation, vie saine et hygiène intime dans tous les domaines de ma life, endormissement les mains sur les couvertures) avant de m'initier aux crèmes à récurer le verbe Être. Je n'ai pas appliqué ce programme aussi sérieusement que j'en manifestais l'intention. Et c'est pas après que la poule a pondu qu'elle doit serrer les fesses.

John Constantine aux prises avec un succube : c'est pas lui qui gagne.
(Hellblazer #272)
Je lis dans Le peyotl chez les Indiens Huicholes du Mexique que ceux-ci usaient du cactus sacramental pour voir leur futur. Pute borgne de macarel ! Si c'est un futur possible qui m'a été montré, il vaut peut-être mieux que je me les coupe. Ou que je fasse une overdose de psychédéliques, bien qu'on ne soit jamais assuré d'y rester, on reste juste avec les séquelles psychologiques et les biais cognitifs des cramés de l'acide et des champis. En tout cas, ça m'a bien fait flipper. J'étais dans une tristesse froide et alcaloïde, abruti comme un désespéré, et quand je suis allé voir ma tête dans le miroir de la salle de bains, j'arborais le masque arrogant et meurtri d'un vieil allemand sexuellement impuissant, pornoïque et bedonnant. 
Au temps pour la haine du Boche, dont je présumais récemment qu'elle s'était éteinte avec les survivants de la seconde guerre mondiale, et je m'excuse par avance s'il y a de vieux Allemands pornographes parmi vous, mon but n'était pas de froisser leur sensibilité. 
Et je ne vais dénazifier ni l'Ukraine ni la bande de Gaza, si j'arrive à me dénazifier moi, ça sera déjà pas mal. 

Bashung avait pourtant écrit
une bonne chanson sur sa bite.
Mais c'était de son vivant.
Une fois mort, c'est moins facile.
J'espère juste que c'est une extériorisation de ce qui trainait, exhibée à ma conscience pour que ça ne traine plus, et non la bande-annonce de l'avenir de mon futur, un flash forward qui laisse un mauvais goût dans la bouche. A tel point que je répugne à en parler, même ici, l'exhibition a ses limites, et on vient de les franchir, trop tard. Ça fait quand même un mois que je sue sur ce compte-rendu. C'est pas facile de lui prêter un tour humoristique, et mon auto-éditeur préfèrerait sans doute que ça reste dans le tiroir, avec les autres polichinelles à ne publier qu'après ma disparition, comme les rogatons des maquettes ratées de Bashung qu'on trouve pourtant à pleines mains quand on les plonge dans les bacs des disquaires. 


Heureusement que quand je suis sous psilo, je sais que je ne dois rien croire de ce que je vois, car un bout de moi se rappelle alors que mes sens sont abusés. Ce que j'appelle faute de mieux une conscience objective (bien qu'elle traite des perceptions et non des objets perçus) se manifeste comme garde-fou en me rappelant de reporter les décisions à plus tard, quand je serai redescendu; il y a eu un sacré trou noir conscientiel, avant que je me retrouve à surfer sur du p0rn sur la tablette, et à me dire "putain mais c'est pas vrai, j'en suis encore là ? " J'ai enfin l'âge d'être pédophile, mais ça ne me branche toujours pas. Incapable de bander, et les cyber-greluches n'étaient pas non plus dans leur état normal, elles me lançaient des oeillades et des grimaces torves et carrément vulgosses, elles avaient l'air de s'emmerder à mort, et leurs ramoneurs avaient des têtes d'éfrits, ces génies malfaisants de la mythologie arabe; les scènes aux contours tremblotants étaient maculées de trainées et d'échos vidéos, de rémanences visuelles comme on en obtenait jadis en filmant une source de lumière vive avec une caméra tritube, ce qui avait pour effet secondaire de marquer le tube et de flinguer la caméra.

Visuellement, c'était un peu comme ça, mais avec des couleurs qui bougent. 
En image arrêtée, on dirait juste de l'art vidéo malaisant.
Certes, l'art contemporain se doit de mettre en question les formes et les structures.
Mais il s'affranchit trop souvent du sens.

le premier qui parle de dénazifier Israël
se prend deux heures de retenue
face au Mur des Lamentations.
Les scènes n'avaient rien de particulièrement sexuel, c'était de pauvres pantomimes de domination et de soumission, dont tous les participants-victimes étaient enchainés à leurs karmas foirés, tels des damnés, accomplissant de lugubres simulacres d'un désir qui n'était pas le leur. Une horde exténuée et hargneuse de fantômes affamés, diraient les tibétains. Et moi, condamné à poser un œil épouvanté sur leurs pauvres rituels, en plus d'être vieux, gros, impuissant, et allemand, comble de l'infâmie, j'étais moi aussi un fantôme affamé, juif allemand, peut-être, mais parvenu au stade ultime de la solitude et de l'isolement. 
Il était sans doute temps de me mettre à lire "Avoir le courage de ne pas être aimé : Le phénomène japonais qui vous montre comment changer votre vie et atteindre le vrai bonheur."


Ça a l'air bien, surtout si on est Japonais.
Les Coréens, eux, n'ont pas besoin de lire ça
pour avoir le courage de ne pas être aimés
des Japonais, et lycée de Versailles.
Enfin, j'en suis pas là. Sur le moment, une fois la fièvre retombée à El Pao, je suis affreusement vexé, je fais un débriefing à chaud dans l'après-midi, un peu de ménage aussi, en marmonnant des évidences de gueule de bois, comme quoi j'étais quand même au courant qu'internet était truffé de démons, c'est pas une nouveauté pour moi, le mieux pour les éviter c'est encore de pas y aller, je fais aussi un peu de méditation sur ma terrasse en bois exotique, je me dis qu'il me faut racheter un pyjama mental en urgence, que je trouverai bien un moyen d’évoquer cette expérience douloureuse sur mon blog de slips sales (même sous forme d'une obscure allégorie), vu qu'au départ je l'avais créé pour ça, suite à la fermeture du forum d'Orroz en 2006, mes lecteurs les plus assidus comprendront à demi-mot, dans l’intervalle, je vais passer un vrai week-end en famille, travaux des champs etc…
et il me faut impérativement reprendre une hygiène de vie exemplaire avant de finir ces maudites truffes gratuites, la preuve est faite, ensuite j'ai encore les champis de cet été à tester, mais la résurgence des cauchemars pas enterrés assez profond sous le tapis, c’est quand même violent, j'aimerais qu'on ne m'y reprenne plus. 
Au moins, ça va calmer mes ardeurs psychédéliques pour un moment.

si en plus de fumer on pète au lit,
ça devient carrément l'horreur,
un accident industriel de type Seveso,
que même Stephen King
il redoute d'écrire dessus.
Si je regarde de quoi je me suis nourri ces dernières semaines, rien d'étonnant à l'irruption du bestiaire de ce petit pandémonium :
- le bureau des atrocités (et ses multiples suites) de Charles Stross, un mélange de Lovecraft et de James Bond
- la créature des marais de Len Wein et Bernie Wrightson, relayés ensuite par Alan Moore, du Frankenstein dans le bayou
- Rosemary's baby, le film de Polanski sur l'avènement de l'antéchrist
- Legion Saison 1, la série de super-héros handicapés de la tête de Noah Hawley et Sharp Objects : possession démoniaque et féminité toxique à tous les étages.
Shade, The Changing man, et Damn You All, comics US délétères et bourrés d'entités cheloues...
- les nouvelles de Mariana Enriquez vantées par le Monde des Livres... 

Pas étonnant que mes poubelles existentielles soient si mal vidées, si mal rincées, parfois re-remplies à la hâte avec ce qui passe à portée, et qu'elles m'éructent à la face. 
Heureusement que les 25 minutes de méditation quotidienne rétablissent un peu l'équilibre et relativisent les aléas de la navigation à l'estime (de soi).
Aah, j'étais si bien, bourgeoisement encastré dans mon canapé, à écouter bien stoned les nappes de synthés en margarine astrale du psybientcette musique abstraite et instrumentale puissamment évocatrice d'autres mondes, ça pouvait pas durer, avant d'être inquiété par les nazis et les pédophiles, comme si c'était des agents du changement travestis en métaphores tourmentées de mon passé de cyberdépendant sexuel. En tout cas, je reconnais bien là, sinon la présence du Malin (le Gros, pas le petit !) tout du moins un envoûtement puissant, témoignant de mes obsessions et de ma santé sexuelle un peu branlante, sans doute une fragilité incurable mais que je peux maintenir à distance en la privant de carburant et en me tenant loin des falaises surplombant internet. Celles auxquelles même l'arabe dément Abdul Al-Hazred-Benalla-Akbar avait fini par mettre une rambarde, dans son Best Seller Google Books : "Si ti as li courage di regardi l'abime, oublie pas mon zami qi'il ti rigarde aussi".

Charb, qui sait de quoi il parle, vu qu'il y est depuis 2015.

Après tout, cela fait 31 ans que je suis abstinent d'alcool, par exemple, et je n'en suis encore jamais mort. Alors d'un côté, je me dis que je n'avais pas vraiment besoin de psilocybine pour voir ça, et confirmer mes préacquis, mais je suis quand même impressionné par la puissance de la réaction, et par la violence de la pulsion, même incapable d'atteindre son but ; l'aspect hallucinatoire du porno sous psilo est très répulsif. Un souterrain hideux, et très mal fréquenté. Toutes ces entités travesties en humains, franchement, ça fait peur. Et je peux difficilement prétendre que ça ne soit pas arrivé. Si c'est un spot de prévention contre le danger de "moi dans dix ans si je ne fais rien",  un petit cauchemar hypnotique à l'usage des visages pâles pour qu'ils aillent chercher des couleurs ailleurs, c'est assez efficace. Pour l'instant. Ca sent la refondation du Parti Socialiste après une branlée à 6% aux dernières érections pestilentielles.
Dans ce songe obscur, j'étais bien ce fantôme affamé que nulle vidéo n'aurait pu rassasier, comme l'eau salée ne peut étancher la soif, et cette malédiction qui consumait ma pitoyable existence était un châtiment auto-engendré par le fait que je n'avais pas l'amour, ce liant de la vie (pour ceux qui ignorent ce que c'est, prière de se référer au texte de Saint Paul l'épitre aux Corinthiens, un autre  Best Seller Google Books) Du coup, il ne me restait que Thanatos pour me raccrocher aux branches basses de l'arbre de vie, dont tous les os saillaient sous les corps suppliciés, car Satan l'habite.
Le truc vraiment flippant, c'est que l'impuissance du psilocybé qui se pognait sur le canapé n'empêchait pas le désir; avant cet épisode onirique, je me disais que l'eunuque, dans son malheur, était délivré du désir, mais là j'ai le sentiment d'avoir testé expérimentalement son sort peu enviable : il n'est délivré de rien du tout, il subit juste l'inextinguible soif de la damnation éternelle (d'ailleurs j'ai trouvé ça très long, surtout vers la fin) et tous ses efforts ne font qu'aviver sa blessure. C'est cruel, quand même.
Prochain test : au lit avec un bandeau noir sur les yeux mais sans trous dedans sinon c'est Zorro, et un bon psybient genre Hearing Solar Winds dans les oreilles. 
Et les mains ligotées dans le dos, nom de diousse.

Loïc Sécheresse a fait beaucoup mieux que Polanski
dans sa réhabilitation du satanisme.
Question de génération.
L'urgence climatique n'est pas la même, non plus.