lundi 26 juin 2006

Pornographie du désespoir



Parfois, je me dis que c’est pure lâcheté que de continuer de mener cette vie (ou plutôt d’être mené par elle) qui ne m’apporte soi-disant aucune satisfaction. Mais enfin, pourquoi restè-je aux côtés de cette femme avec qui je semble former un couple répondant aux critères draconiens de la catastrophe humanitaire ? Y serais-je acculé par des principes moraux qui m’interdisent de l’abandonner, ainsi que les deux enfants dont nous avons la charge, alors que je ne rève que de me noyer dans un océan de femmes noires et de bouddhisme ?
Et n’est-ce pas au nom de l’inefficacité de ces principes moraux que je suis un cyber-dépendant défroqué, c’est à dire refroqué ?
Quelle valeur intrinsèque attribuer alors à ces principes s’ils ne servent qu’à endiguer la pulsion sexuelle aux heures de crue ?
Je me rappelle ensuite que me juger, c’est me niquer, et la meilleure façon de sortir de mes godasses, dans lesquelles je ne suis déjà pas souvent.
Ne me fouté-je pas de ma propre gueule ainsi de celle de mon public virtuel, qui se presse aux grilles de mon blog après avoir tapé "je me masturbe devant ma mère", "blog de blackette " ou "je me fais empapaouter par un dromadaire devant mon berger allemand" dans google ?
J’interroge alors mes raisons d’agir de la sorte.

-Attends, t’as parlé d’action, là, mais elle est où ton action ? là il n’y a qu’une brochette d’états mentaux, dans deux minutes tu vas nous reparler de ton inassouvissable appétence pour les femmes noires qui viendraient providentiellement combler les manques dont tu crois souffrir depuis que tu existes sous cette forme, mais à part résister au changement, elle est où ton action ? Le regard que tu poses sur une femme noire n’est pas celui d’un homme sur une femme, fût-ce pour la parer des oripeaux du désir qui tout enlumine, sauf derrière l’escalier là où la concierge ne balaie jamais parce qu’elle a peur du noir, mais celui d’un enfant sur un jouet dans une vitrine, voire sur une tablette de chocolat en haut de l’armoire. Quelle femme noire serait heureuse au bras d’un blanc à l’oeil triste et à la paupière lourde, qui serait doucement mais sûrement rongé par la culpabilité d’avoir jeté sa vie aux orties par abdication devant ses fantasmes alors qu’il avait juré fidélité, secours et assistance à celle qui le soutint dans ses heures les plus sombres et qui continue d’accepter de partager sa vie alors qu’il ne donne pas beaucoup de lui-même ? Et en plus, quand tu ne fais pas du boudin (noir) tu rèves encore de te tourner vers le bouddhisme, mais tu imagines la gueule de ta quète spirituelle, animé par d’aussi peu nobles motifs que celui d’échapper à la dictature de tes désirs bidon ? Ne te vouerait-elle pas à rajouter une couche d’illusion à une fiction que tu t’es bâtie dans le réduit de ton cerveau ? La vraie lâcheté ne consiste-t-elle pas à te mettre minable sur ton blog au lieu d’affronter tes responsabilités dans le réel, en fus-tu investi à l’insu de ton plein gré ?
Après, pour tes songes récurrents de bouddhisme et de femmes noires, un ami t’a récemment suggéré que "tu pourrais trouver une boudhiste noire : ça c’est boudhiste, trouver le tout dans le tout".
Malgré tout, tu crains que le bouddhisme, qui semble offrir un refuge convenable aux occidentaux insatisfaits de leur insatisfaction, n’attire guère les blackettes. Ca te rappelle sans doute Matt Johnson, qui du temps où tu croyais au pouvoir cathartique du rock chantait "I was just another western guy / with desires that couldn’t be satisfied" avec The The sur "Infected" qui t’apparaissait alors comme le meilleur album du monde ? Ce même Matt Johnson qui a renoncé au rock et qui est aux dernières nouvelles bouddhiste de chez bouddhiste ? Allez, John, ce n’est pas du désespoir, c’est juste le refus d’un enfant trop gâté et solitaire de lâcher les illusions émotionnelles qui lui pourrissent la vie.

-Ben voui, mais faut bien que je les voye pour ne plus me faire avoir… comme je le disais à une amie, je sais que mon rétablissement sera effectif quand je n’irai plus chercher sur internet des choses qui n’y sont pas (le frisson des films d’épouvante à petit budget via le miroir déformant du blog, le sens de la vie & co…)
Je veux dire, le message ultime, c’est "vous êtes dans la merde ? DEMERDEZ-VOUS !"
Il ne s’agit pas de guérir du désir, mais de ses égarements projectifs solidifiés par des années de pratiques conditionnantes.
Si je semble d’humeur aussi navrante, c’est aussi dû en partie au fait que je refume du tabac comme un suppôt de la SEITA depuis 2 mois, que je continue de télécharger comme un bourrin des films normaux que je n’ai pas le temps de regarder, et que de la part d’un cyberdépendant, nourrir un blog relève de la complaisance la plus bécasse. Ici, je passe la moitié de mon temps à enlever les commentaires déposés par des robots probiroutesques, et l’autre moitié à me dire "je peux pas publiier ce post néo-dépressif, mes lecteurs méritent une autre nourriture, eux sont en convalescence, il faut des trucs positifs…" Vous voilà prévenus, à l’instar des disciples de Bokonon, que toutes les choses vraies que je vais vous dire sont des mensonges éhontés." Bien que sur Internet on soit plutôt à l’Eglise Gritchtèque, d’ailleurs je vais essayer de trouver le temps de faire un post sur les religions imaginaires, qui comme les filles éponymes, consolent des chagrins fictifs au moins aussi bien que les réelles.

Commentaires

  1. Tiens, toi aussi t’es un fan d’Hypérion ? Tu as lu Endymion je suppose. Je crois que je l’ai préféré au 1er, j’en fais encore des cauchemars la nuit…

  2. Merdeu… ce machin avait gardé mes anciennes coordonnées.

  3. Balloté entre la fantasmatique femme noire et la spiritualité bouddhiste, tu me fais penser à cette phrase de Siddharta dans “Little Bouddha”, dans la scène où, après de années de privation et de méditation acharnées, il entend un prof de harpe dire à son élève: “Si tu ne tends pas assez la corde elle ne sonne pas, si tu la tends trop elle risque de se casser”.

  4. Flo, je me suis ennuyé sur Endymion que je trouve franchement cent coudées en dessous d’Hypérion, et apparemment, ça ne s’arrange pas :http://www.cafardcosmique.com/Critik/critik/s/Simmons.Dan/simmons.Olympos.html
    Orroz, je ne suis pas ballotté, j’accomode les restes dans ma panoplie de clown triste. Je vide ma barque dans l’océan avec une toute petite écope.

  5. salut johnny (yopyop pour les commentaire a deux rouble sur le blog de flo)…

    attend tu va te mettre à deprimé.

    ton blog et enorme..

    jreviens de la fete du buddhisme (a vincenne) j’ai vue de ces tronches (ya un moment faut consulté quand même!!) entre les pelos qui flash les bonzes qui recites, et les adeptes du new ages.. (j’oubliais les tibetain vrp)… nann sinon beaucoup de gens sympa!!

    la clope j’ai arretté… le porno j’ai arretté (cf : casi 4 mois), les medoc j’ai arretté…

    m’reste plus que l’arabica..

    parais que ca depend de l’experience du produits ce qui fait l’addiction.

    arrette la clope hein ;-)
    c’est pas moins dure (je revise mon jugement) que le porno et vis versa..

    allez jvais mfaire un café.

    a force de cogité pour du vents, j’ai du vents entre les oreilles…

  6. Quelle bonheur de voir que tu le dis quand ça va moins bien! Ca te rend humain et ça légitime notre droit à tous d’avoir des coups de moins bien. Tant que ce n’est pas un espèce d’aspirateur vers le bas et que tu ne te complais pas dedans. Mais ça je te fais confiance. Y a juste un truc qui me chiffonne. Je sens bien qu’alimenter ton blog est quelque peu incongru pour un cyberdépendant et en même temps, bien égoïstement, ça me fait du bien d’y lire tes ch’tiotes contributions. Mais tu sais quoi? Tu fais ce que tu veux!! Allez John, bonne journée et… Merci.

  7. Juste pour info, comme je cherche une nouvelle plateforme de blogs avec catégories, sur Le Monde, tu es obligé de supprimer des tas de spams à la main, alors?

  8. salut viking, vieux pirate… sans le vouloir et tout en voulant ne pas le vouloir, je montre que la physique quantique sexuelle dilate démesurément les objets qu’elle prétendait observer… si on veut observer sa complaisance avec lucidité, on se gourre de flingue et de cible…on s’en doutait un peu. Pire que les regrets illégitimes de n’être ni çi, ni ça et d’être affligé de désirs infantiles : la saisie sur les regrets, les larsens du warsen. Focaliser sur ses incapacités, c’est jamais une bonne idée. Il y a mieux à faire en s’inspirant de la 6ème étape du programme de rétablissement suggéré par les AA : “nous avons pleinement consenti à ce que Dieu élimine tous ces défauts de caractère”
    Un gars m’écrivait ça récemment, avec la fougue de la jeunesse :”Tu sais pourquoi je t’aime bien John ? Pourquoi j’aime ton site ? Parce qu’il est fait par quelqu’un d’authentique et ça me plaît de lire tes articles plutôt qu’un bouquin entier sur l’être et le non-être, des textes de “Maître” qui vont bien remplir le mental qui ni une ni d’eux va s’en approprier le contenu pour diriger ta vie, une vie orientée par la croyance d’un autre, par la croyance des autres.
    Aujourd’hui le mental ne me fait plus ch***, plus autant qu’avant, il joue son rôle pratique, c’est tout, bien que parfois il revient à l’assaut … mais toujours pour des conneries en somme.
    J’ai appris à vivre pour moi, à m’aimer, et aujourd’hui tu vois j’aime la vie, j’aime faire l’amour et je m’en donne jusqu’à SATURATION, car ce principe de saturation est primordial, comme dans la dépendance à la pornographie dont ton site traite. La guérison elle viendra de la saturation. Un alcoolique qui arrêtera, dans la plupart des cas, ne le fera pas parce qu’une âme charitable, qui se mettra dans un rôle de “sauveur’ et qui se croit parfaite lui dira “ce serait bien pour ta santé”… non, il le fera parce que LUI-MEME en aura marre, il va saturer. La vie va comme ça - expériences agréables - répétition de l’expérience - saturation et … on passe à autre chose. Les personnes qui sont au fond du trou comme je l’ai été il faut les laisser là, bien au fond, elles ne peuvent que remonter de toute façon, et la remontée nous apprendra une chose : à devenir enfin maître de notre vie, et c’est à ce moment là qu’une révélation te survient de ton esprit, de ton coeur, une sensation : tu es déjà divin à la base. N’est-ce pas une aliénation mentale que de vouloir le redevenir ??!!! Qu’est-ce que je fais sur terre ? Et bien je suis un humain. Et quel est le sens de ta vie ? Bah je fais des expériences d’humain, celles qui me plaisent je les refais, les autres qui sont chiantes, rien ne me pousse à les reproduire, ni les religions, ni la famille, …
    Aujourd’hui j’aime la vie, j’adore vivre ici sur terre, et je mourrai sans regrets, car c’est le pire des tourments d’avoir des regrets. Des amis qui suivent encore des voies spirituelles s’empressent de me dire NON tu vis dans l’illusion, un méditant comme toi, comme est-ce possible ? Pourtant je vis bien, je me sens bien, j’ai fait la paix avec moi-même, où est le problème ? C’est là que le mental revient, et s’ils avaient raison ? ahhhhhh me dit mon sage intérieur, ces personnes elles représentent quoi ? euh… le doute. OUIIIIII tes doutes, il faut qu’il sse logent quelque part voyons, ils sont là, ce sont ces gens et ces gens n’aiment pas te voir heureux, n’aiment pas le bonheur, alors qu’en déduis-tu ?”

    Oui, dado, et de la main gauche, en plus ! (je suis gaucher)
    de plus, je crois bien que les blogs du monde sont réservés à l’élite des abonnés à la version papier. Tu pourrais demander à Flo de te franchiser :-)

  9. Tu fais bien d’aimer la vie sur terre. C’est une expérience formidable. Certains pensent que la spiritualité interdit la jouissance en cette “vallée de larmes”. Comme si cette vie sur terre n’avait rien de spirituel, comme s’il y avait Dieu et le Monde, comme si Dieu n’était pas omniprésent. D’autres y vont de l’autre extrême, vivant comme si cette vie terrestre était une finalité en soi. Entre les deux, il y a selon moi cet état d’équilibre, où l’homme rend grâce pour la beauté de la vie visible, tout en sachant que quelque chose d’encore plus grand et mystérieux réside au-delà de ce que percoivent les sens.

    J’aime bien cette anecdote des deux saints invités à une grande réception. Arrivés devant le buffet, le premier se détourne et refuse de prendre de la nourriture en disant: “Pour la gloire de Dieu”. L’autre, au contraire, prend un savoureux morceau de nourriture et dit: “Pour la gloire de Dieu”.

    Bonne journée John, bonne continuation dans ta quête. ;)

  10. Spirit, merci pour ton histoire, en voici une autre qui met en scène deux saints : c’est une dame qui promène ses deux énormes clébards dans la rue, et elle aperçoit un petit garçon qui la regarde rouge d’envie, alors elle s’adresse à lui : “tu veux caresser mes deux saints-bernard ?”
    - oh oui madame, mais je m’appelle pas bernard.
    dado, merci d’avoir attiré mon attention sur l’existence du round-up : pour éviter les robots spammeurs, il me suffisait de cocher “Demander l’adresse email des commentateurs non authentifiés”.
    Bon, ça n’aura qu’un temps, mais pour l’instant ça marche.

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