Footing le long du parc de Sèvre. Huit kilomètres en trottinant sans ostentation : pas question de redevenir jogg-addict comme en 2003; au bout de 11 mois, j’avais péniblement réussi à substituer l’obsession du sevrage à celle de la cigarette, et le premier pote qui m’a ramené d’Inde le paquet de beedees que je lui avais commandé avant son départ m’a observé remettre le nez dedans à la première taffe, devant laquelle nous sommes tous égaux , consterné que je me laisse réenfermer. Alors que là, en jouant franc jeu avec le sevrage et sans devenir un activiste, même l’obsession mentale m’a été ôtée, et l’attachement s’est dissous. Après, la vigilance au quotidien, bien sûr, mais ça ne prend pas beaucoup d’énergie ni d’attention. Et je ne mythifie pas les plaisirs du tabac, trop content de m’être éloigné de ce produit qui crée le manque qu’il prétend combler… Merci Qui ?
Donc, jogging raisonnable, alterné avec piscine et vélo. Surtout rien de forcé. Tandis que je trottine, une sexagénaire rasée de frais, très élégante dans son cardigan ocre clair, surgit de derrière un fourré, un carton d’emballage “Maxipack 64 Kronembourg” à la main. Tout dans son maintien, son maquillage et son habillement indiquent l’appartenance à la vieille bourgeoisie locale, qui ont fait des rives de la Sèvre un fief immobilier de prédilection. A l’évidence, cette dame égoïstement bien intentionnée fait dans la dépollution des bords de Sèvre qu’elle considère un peu comme un second chez elle, elle cherche des yeux une poubelle, mais le contraste entre sa tenue et son carton de bières est tellement saisissant qu’en passant à sa hauteur, j’ai envie de lui demander avec une fausse connivence si elle a bu le pack de 64 à elle toute seule. Mauvaise blague1 aux rebonds prévisibles : son petit sursaut outragé, vacillement d’incompréhension impossible à convertir assez rapidement en colère tandis que le mauvais plaisant s’éloignerait en ricanant au volant de ses baskets neuves. Si l’intuition luciférienne est plaisante à imaginer dans l’instant, je me demande quelle revanche sur quelle grand-tante rigide je recherche là, et puis Jacques Brel a bien démonté le mécanisme de l’arroseur arrosé dans la chanson “Les Bourgeois”, …je gamberge tout ça pendant les quelques foulées où nos sphères perceptives se croisent, comme si je me déplaçais à une vitesse infra-temporelle tel Makkari dans les Eternels de Neil Gaiman, et je laisse passer ma chance de me croire drôle. Luciférien, ce blog l’est déjà suffisamment (en tout cas pour mes besoins) si j’en crois cette description glanée sur un forum (plus collectiviste, le forum se rit des écueils du blog sur lesquels ne s’éventrent que les Narcisses en pot) : “Lucifer qui, dans un geste de démesure, a voulu remonter à sa source pour s’en saisir et se recréer à partir de sa volonté-propre”.
Le blog étant par essence luciférien, à moins d’effacer la personnalité de son auteur derrière une grande cause, il faut en user avec modération.
1il y a des années de cela j’avais expliqué à mon fils la différence entre une Mauvaise et une bonne blague, la bonne c’est quand tout le monde rit, la Mauvaise quand tu es le seul à rire.
Echauffement avant le jogging : élargissement manuel de l’entrée du port de Ploumanac’h (collection privée)
Commentaires
Ah ben vla ti pas qu’on apprend que John fait du footing !!!
Comme Sarko !!
Il y avait une caméra pour immortaliser cette rencontre ex-addict/ex-pack de kro ?
En tout cas, j’espère que tes chaussures neuves se font à ton pied. Il est bon parfois de changer de chaussures pour repartir du bon pied (phrase qui se veut philosophique, à prendre au 36ème degré….)(A moins qu’il ne s’agisse d’une mauvaise blague…)
A plus
Rédigé par: stauton | le 03 novembre 2007 à 12:22|
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