mardi 4 juillet 2006

Karma Coma


Un des piliers du forum dépendance sexuelle a rechuté hier matin après 9 mois de sobriété.
Allons bon.
Dans le Landerneau de l’abstinence, cette nouvelle est loin de jeter la consternation, puisqu’un nombre incalculable de 17 messages de soutien inconditionnel est parvenu au malheureux, qui s’accusait à nouveau de n’être qu’une merde, je ne mérite pas de vivre, ou alors de vivre caché sans internet, bref, les trucs que j’écrirais si ça m’arrivait.
C’est difficile de se sevrer avec discernement : au début, il faut beaucoup y penser pour trouver la force de décrocher, après il faut tâcher d’y penser moins pour ne pas rester jambes ballantes au bord du trou fumant jonché de poétiques décombres que fut notre vie, mais ne pas l’oublier tout à fait pour ne pas se faire recrocher au calbuth par ces forces qui nous dépassent. Il faut joindre la persévérance au lâcher-prise. Le gars était surexposé au danger, de par sa fonction de créateur du forum, c’est un peu comme si un pochtron en renonce avait ouvert un bistrot au lendemain de sa dernière cuite. Je le remercie sincèrement de s’être laissé avoir, c’est une leçon d’humilité et un avertissement à tous les pornodeps en préretraite.
Il n’a guère d’autre choix que de remonter sur le vélo, quitte à plier le forum pour sauver ses fesses, comme Spirit il y a quelques semaines.
Au début de mon premier sevrage, je m’imaginais number one sur le podium du rétablissement.
Je jalousais ceux qui avaient plus d’abstinence que moi, leurs traits d’esprit et la pertinence de leur analyse.
Heureusement, ça m’a un peu passé.
J’applique toujours la même recette : pas de filtre. Pas de contrôle parental.
Juste le souvenir de la terrible raclée infligée par la compulsion, et le désir, qui croît avec le temps, de ne pas y retourner. Je ne sais si je mérite mieux que de nager dans le caniveau à contre courant, parce que la question est mal posée. Nous ne "méritons" que dalle, parce que ce que nous obtenons est au confluent de nos actes et de déterminismes environnementaux dont nous ne percevons qu’une petite partie. M’enfin on peut déjà essayer d’influer sur ceux qu’on croit capter plutôt que de se lamenter sur l’impalpable.
Je présente globalement les mêmes symptômes que P** : je ne communique pas beaucoup et je laisse parfois les choses aller. Je passe encore trop de temps sur l’ordinateur, ce qui fait que ma femme se sent cybernée alors que j’ai l’impression d’avoir progressé. Je suppose que ce qui me sauve, c’est une recherche de plus d’honnèteté et de bien-être au quotidien.
Sinon, suite à mes petites réflexions sur Dieu en kit, et vu que la Femme Noire revêt toujours pour moi et pour aujourd’hui les attributs de la divinité, je me suis dit qu’il est hors de question d’entretenir l’idée de faire l’amour avec Dieu. Non seulement c’est pure présomption, et je ne dis pas ça uniquement à cause du regard amusé que trois négrillonnes ont jeté sur moi ce week-end à Créteil, mais ça me rappelle les risques illustrés par tous ceux qui l’ayant rencontré sous LSD, ne se sont jamais remis après-coup de sa Persistante Absence. Alors, la question de lui rendre un culte priapique et commémoratif prend un sacré coup de vieux. Dieu ne désire certainement pas que nous consumions notre énergie en vain. Je n’irai pas non plus demain postuler pour bosser dans un foyer d’accueil pour blackettes en difficulté, ma femme l’a fait il y a quelques années avec plus de professionnalisme que je ne saurais en rêver. M’enfin, avec l’abstinence et le programme de 12 étapes, soit ça me passe, soit je trouverai un truc à faire avec ça.

Commentaires

  1. Le pilier qui a rechuté. Dommage mais prévisible. La dernière fois que j’ai fait un tour sur son site il y a quelques semaines, j’ai constaté qu’il était en croisade contre la porno, et pas juste un peu. L’effort est louable et compréhensible. La porno c’est vraiment que de la merde. Et pire encore car au moins la merde peut fertiliser les jardins. Mais la porno n’a rien à voir avec notre dépendance. Elle n’est qu’un support choisi arbitrairement à notre jeune époque. Le vrai noeud auquel il est bon de s’attarder, c’est celui des émotions refoulées qui engendrent la compulsion et des réflexes pavloviens qui nous poussent à éluder les problèmes avec autant de grâce que de pauvres chiens privés d’intelligence.

    Le sevrage nécessite de l’expérience, je le comprends plus que jamais. A force d’essais et d’erreurs, on en vient à saisir l’attitude à avoir face à un ennemi qui a plus d’un tour dans son sac. Nul doute que P** trouvera sa voie. Enfin, je l’espère sincèrement.

    Concernant ta recette du succès, je suis d’accord avec l’absence de filtre. En mettre un n’est pas de bon augure et c’est sous-estimer la luxure. Dans les WC, le filtre n’a plus tellement d’efficacité de toute façon.

    Bonne journée frère John.

  2. Le sevrage serait bien plus simple avec quelques notions de physiologie subtile. C’est une simple question de souffles placés au mauvais endroit. Au fait, John, je ne sais pas si tu as vu ma proposition de venir à la 1ere semaine du lopön (du 23 au 30 juillet). Après ça, tu aurais les moyens de remettre tes souffles au bon endroit et d’arrêter de geindre (en effet, il est possible de demander aux moines la transmission des trulkors, et qui dit trulkors dit vase, et qui dit vase dit contrôle des souffles. La pratique n’est pas compliquée, et demande surtout de la constance. Ensuite tu pourras aller porter la vraie bonne parole sur les forums… je veux dire la bonne parole du mec qui n’en a réellement plus besoin, et pas celle du mec qui se retient…)

  3. frêre Spirit, il me semble que frère Desproges préconisait une méthode pour éviter les attaques de la luxure dans les cabinets : éteindre la lumière.
    Flo, elle est où ta proposition ? à part sous mon nez, je veux dire.
    Pas possible la semaine du 23 juillet pour moi; ne vaudrait-il pas mieux que je commence par les préliminaires et le stage fin aout avec Khenpo Tenpa Yungdrung si j’en avais l’occasion ?

  4. Il me semblait t’avoir proposé ça suite à un de tes commentaires sur mon blog, mais c’est vrai que t’y es peut-être pas retourné (et tu n’es pas obligé). Tu peux aller effectivement pour les préliminaires mais il faudrait te faire transmettre le vase par les moines car c’est la base des yogas.

  5. En quelques mots le résumé de la problématique ! Tout est question de la bonne distance face au porno. La distance est variable en fonction du temps de sevrage…

    Mais comme le fait remarquer Spirit, le porno n’est qu’un symptôme : “l’arbre qui cache la forêt des causes”. Et maintenant que je commence à explorer cette forêt, tout me semble de plus en plus obscur. Et mon addiction au porno finalement… secondaire.

    A bientôt, Nicolas.

  6. la forêt est obscure, certes, mais nous y rajoutons souvent notre lampe qui n’éclaire souvent qu’en lumière noire.
    Je t’indique quelques mots, qui désignent un état pour rester calme dans la forèt :

    “L’être humain est un lieu d’accueil
    Chaque matin un nouvel arrivant.

    Une joie, une déprime, une bassesse,
    une prise de conscience momentanée arrive,
    Tel un visiteur inattendu.

    Accueille-les, divertis-les tous
    Même s’il s’agit d’une foule de regrets
    Qui d’un seul coup balaye ta maison
    et la vide de tous ses biens.

    Chaque hôte, quel qu’il soit, traite-le avec respect,
    Peut-être te prépare-t-il
    A de nouveaux ravissements.

    Les noires pensées, la honte, la malveillance,
    Rencontre-les à ta porte en riant
    et invite-les à entrer.

    Sois reconnaissant envers celui qui arrive
    Quel qu’il soit.
    Car chacun est envoyé comme un guide de l’au-delà.”

    cité par Jack Kornfield dans “après l’extase, la lessive”

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