samedi 27 janvier 2007

Voeux & renoncements


Cette année j’ai fait une carte de voeux bien moins dépressive que l’an dernier, dans l’petit bois derrière chez moi, alors que trois jours avant, j’avais envie de rentrer mes gosses dans le ventre de ma femme et de me trancher la gorge. Facéties de l’orgueil, que j’ai laissé me traverser comme on observe un autocar de supporters bourrés rater un virage et sombrer dans un ravin. Quand tout est affaire de mise en scène, l’image devient support ostensible de mensonge.


Deux semaines que je vis autre chose, ordinateur éteint, sans tabac, ma cuisine finie… c’est bien joli le renoncement, mais après quelques crises d’angoisse vite estompées, ça crée du vide. Avec quoi vais-je le remplir ?

Le lopön dit de la compassion qu’elle doit nous faire éprouver une sensation interne comparable au sentiment d’une mère qui voit flamber devant elle son enfant unique dans un brasier. Evidemment elle n’a pas la capacité d’entrer dans le brasier, donc elle ne peut rien faire et elle est là, impuissante, à regarder son enfant se consumer. Eh bien, c’est exactement imaginer ce sentiment en vous-même, voilà ce qu’est la compassion. Il ne suffit pas d’employer des mots, il faut qu’il y ait un sens derrière.

J’ai de la marge, comme dirait Homer Simpson. C’est pour retrouver ce sens derrière les mots que je vis le plus souvent possible ailleurs que devant ma bécane, et ça me fait du bien d’avoir redécouvert le bouton OFF après l’avoir laissé ON pendant 10 ans. Ca me rend plus clair, ce qui ne veut pas dire moins sombre, et surtout plus vivable. J’ai rangé ma panoplie de cyberprêcheur dans l’armoire. Elle peut resservir. Je pars un mois à Paris monter un documentaire sur un Suicidé de la République, ça va me changer les idées.

“Que les puces d’un millier de chien galeux infestent le cul de celui qui gâchera une seule seconde de votre année et que les bras de cet abruti deviennent trop courts pour qu’il puisse se gratter… “ J’ai lu ça quelque part en guise de voeux de nouvel an et ne trouve pas très cool de souhaiter des accidents karmiques pareils, bien que je comprenne qu’on puisse en arriver à invoquer ce sort sur des ignorants ou des malfaisants, la malfaisance étant une forme aggravée d’ignorance, synonyme de “méconnaissance des propriétés de la loi de cause à effet”.

Mon débloggage fera regretter les dessins de Xavier Gorce (©LeMonde.fr) qu’on peut lire tous les jours en s’abonnant à la version électronique du journal, 6 €/mois.


























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Commentaires

  1. Tu devrais essayer de tenir la nuque comme ta fille. Elle est parfaite. En fait tu es celui qui se tient le plus mal de la famille…

  2. Un peu sévère ta réflexion, Flo ! John fait déjà assez d’efforts pour se tenir debout, non ? Pour le moment, il redresse la barre, il ne peut pas tout faire en même temps, tu comprends ?

  3. Elle est sympa ta photo de famille, John. Ça fait plaisir à voir. Vraiment. Quand j’avais l’age du gauchiste chevelu qui essaie sans doute de ressembler à l’inimitable John Warsen quand il fut jeune, j’admirais Lemmy, de Motorhead, car j’avais lu quelque part qu’il ne dessoulait jamais. Depuis, il y a de la Quezac qui coule dans mon verre.
    Bon séjour à Paris !

  4. Flo a raison, je ne me tiens pas bien. Enfin, là sur la photo c’est parce que je me grouille de rejoindre les autres après avoir enclenché le retardateur, mais je suis toujours un peu voûté ou de travers; si j’avais pris Flo comme professeur de maintien, tout cela ne serait pas arrivé. Elle a une sorte de super-pouvoir pour détecter des choses dans l’attitude corporelle. C’est sans doute lié à ce qu’elle épingle de façon très juste sur son blog :”le problème vient de ce qu’il y a chez les occidentaux une espèce de base culturelle de culpabilité et de détestation de soi qui n’existe pas chez les orientaux (et que je ne perçois pas en effet chez mon traiteur chinois). Les chinois et les tibétains, eux, ils savent ce qu’ils veulent : gagner plein de pognon, réussir dans la vie, être admirés et ça, pour eux, c’est BIEN. Donc, quand on leur dit que ça n’est pas bien, mais que c’est futile, et qu’il faut s’en détourner, cela ne fait que produire un sain rééquilibrage. Maintenant, prenez un français moyen qui pense qu’il est un nullos, qu’il est coupable de la dépression de sa vieille mère, que la vie de toutes manières ne l’intéresse pas parce que c’est de la merde, et que lui même c’est de la merde aussi, et dites-lui de se détourner de cela. Le résultat sera la dépression. Ce type n’a déjà aucune vitalité à la base, le bouddhisme ne fera que lui enlever le peu qui lui reste. D’où cette atmosphère sinistre des centres bouddistes. Nous sommes les bénéficiaires de tout ce joyeux héritage judéo-chrétien comme quoi la vie doit être difficile, qu’il faut se punir parce que par définition nous sommes mauvais, et ainsi de suite. Je n’exagère pas. Cette discussion était partie d’une phrase du dalai-lama, comme quoi il avait mis très longtemps à comprendre que les occidentaux se détestaient, et dans quel état cette détestation de soi les plongeait. Car ça ne lui serait même pas venu à l’esprit que ça pouvait exister. Ce qui explique aussi que Chepa se marre quand quelqu’un lui dit “je ne m’aime pas”. Il répond rigolant “mais si, tu t’aimes, tu joues du piano, tu manges bien”… Il ne s’agit pas de cela évidemment. Un tibétain n’a pas d’arrière-pensée. Quand il mange bien, en effet, c’est qu’il s’aime. Tout va bien pour lui. Un français, quand il mange bien, pour commencer on lui a dit au catéchisme que le plaisir était illicite et qu’il fallait vivre une existence austère. Donc déjà, il se sent coupable. Il n’est pas en train de gagner sa vie à la sueur de son front. Il n’est pas à l’hôpital en train d’aider les mourants. En plus il pense à tous les enfants qui meurent de faim dans le monde. Et quand il essaie de prendre l’air content de lui, on voit que c’est complètement faux. Les plaisirs de la vie n’ont jamais été permis pour lui. Alors si en plus on lui dit qu’ils sont illusoires, il va déprimer, et la dépression n’est pas du tout un état correct pour pratiquer. Donc sa pratique ne donnera pas de résultat, et il va déprimer encore plus et ainsi de suite. Alors que le tibétain, lui, il pratique sur une vitalité. La pratique ne fait que détourner son énergie vers des buts plus nobles que l’accumulation d’argent. Mais quand on n’a déjà plus d’énergie parce que rien ne vaut la peine ? Sur quoi va-t-on pratiquer ? Sur le néant ? Sur le désir de se punir ?
    Bien sûr, tout le monde n’est pas comme ça, il y a des gens qui ont une vie sympa (dans leur perception) et qui en sont contents. Mais le problème, c’est que ceux qui sont attirés par le bouddhisme sont principalement les dépressifs, les coupables, ceux qui pensent que la vie ne vaut rien et qu’eux-mêmes ne valent rien, ceux qui veulent aller s’enterrer dans le froid et la neige. Ils vont vers le bouddhisme car ils pensent que le bouddhisme dit la même chose qu’eux, qu’en effet la vie et eux-mêmes ne valent rien. Mais la réalité c’est que le bouddhisme dit cela à des gens qui ont une haute estime d’eux-mêmes. Un jour, un grand lama disait à un traducteur :”Cessez de vous sous-estimer, et de croire que vous ne valez rien !”. Il avait perçu cette tendance, assez marquée chez cette personne au demeurant.
    Le problème, c’est maintenant d’arriver à gérer l’orgueil bien réel qui résulte du sentiment de sa propre nullité, car plus une personne se trouve nulle, plus en général est aura développé de l’orgueil par-dessus pour arriver à survivre. Et que faire aussi de cette énorme tendance à la distraction qui est la fuite de tout cela ? Un chinois qui travaille 14h par jour dans son magasin fera un bon pratiquant si on arrive à le détourner de son compte en banque. Mais un gars qui passe 14h par jour devant un jeu video ?
    L’esprit occidental est vraiment compliqué.”
    Vu que je suis à Paris, je vais peut-être lui demander un entretien.
    Le choix entre tenir debout et ramper par terre, je ne me pose pas la question en ce moment. Je squatte l’appartement et garde le chat d’une amie partie en Inde dont la bibliothèque regorge d’ouvrages de spiritualité depuis qu’elle a un parcours parallèle au mien - AA puis NA.
    Orroz et Bruno, vous avez relevé que Hugo “ressemble” à papa quand il était petit. Vous n’y êtes pas : oncques n’eus les cheveux longs, j’étais keupon.
    Lemmy fut un mythe fondateur, qui a survécu à sa légende, mais qui tourne toujours à une bouteille de Jack Daniels par jour, d’après de nombreux témoignages. Il n’en semble pas particulièrement affecté. Mais c’est Lemmy.

  5. Qui êtes vous, John Warsen (à la fort jolie famille) qui venez commenter dans mon blog ? Serait-ce le mandala qui vous a attiré ? Ou le parenchyme ? Votre adresse est fort sympathique mais je suis incapable de dire si je continue à me ressembler. La cinquantaine approchant à grand pas, j’ai plutôt tendance à penser que je ne suis plus ce que j’étais… Hélas, l’andropause est un sujet tabou. La seule fois où j’ai tenté d’évoquer mon état d’âme sur le sujet, c’était à table et les autres hommes se sont dressés contre moi. Les femmes (une tante, une cousine et une très bonne amie) ne m’ont pas soutenu. Je devais être trop folle ! Là, je ne changerais jamais.
    Cordialement…

  6. CHOC ! (une clope, un rhum/pamplemousse et le rappel de mon cardiologue). Kristof P. Le fils de la Reine de la ratatouille, celui que je cite au top-ten de mes jules d’antant ! (Que ses proches d’aujourd’hui me pardonnent ce qui peut être des indiscrétions). Evidement, avec un pseudo pareil, ma vue défaillante et les palmipèdes du Grand Nord n’étant pas une piste probante… C’est en fouillant dans le blog… CHOC ! Le K. à la trentaine avenante… Je reviens en avant, le même (quadra et demi)… J’ai la banane qui s’allume, des kilotonnes de souvenirs se concentre à la surface du cortex et un soupçon de culpabilité. Le marseillais que je suis depuis quelques temps est dans une nouvelle aventure - Le K. connait mes capacités à négocier les tournants - et n’a qu’une envie à l’heure présente : renouer. Affectueusement donc !

  7. haha
    je t’ai vu hier chez Chepa !!!

    Bon alors John, cette nouvele vie ça va ?

  8. ben chepa si elle est nouvelle… en tout cas elle ne m’inspire rien sur mon blog. pourquoi t’es pas venu dire bonjour ? j’étais avec un autre john, mais ça aurait été sympa de te rencontrer.

  9. Ahh bah j’ai 4 mois de retard moi. J’avais bien lu les 10 premières lignes du billet et les deux premiers commentaires.. donc je m’étais arrêté à la fête du nouvel an et à la photo de famille !

    Ce qui me manquera de ce blog, c’est les petits pics et les dessins, car des fois je dois l’avouer je décrochais des messages codés et second degré de tes messages John.. j’ai pas l’esprit assez intello ou pas assez cultivé pour comprendre toutes tes références. Ma foi avec un peu de temps, j’aurais pu monter les cieux un part un lol

    Au plaisir de te relire dans un autre blog encore plus secret ;)

  10. Dis moi John, c’est quoi ton documentaire ? ça m’interresse cette histoire… Tu l’as monté ? Tu peux m’en dire plus ?
    Tu sais où me joindre !
    Bonne journée à toi !
    Hyalf

    PS : Tu fais des références cinématographique à “Coup de tête” sans t’en rendre compte (Ah Dewaere….)? C’est l’image que j’ai eu en lisant ton intro de post au sujet des supporters… Nous sommes rassuré, “Perrin n’a rien !! Perrin n’a rien !!”…

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