samedi 31 octobre 2020

La lecture, c'est l'aventure (4)

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consultations sur rendez-vous et sur devis uniquement.
Les historiens de l'an 3000, dont l'existence est de plus en plus hypothétique, prétendront avoir exhumé des indices attestant l'existence des épisodes 1 à 3 de La lecture, c'est l'aventure dans la colonne des archives, sur la droite de votre écran. 
Je doute avoir rédigé tout ça tout seul.
Dieu a dû me filer un sacré coup de main, en catimini, fidèle à sa traîtrise habituelle. Ca ne peut être que lui qui me réveille tous les matins à 5 heures et m'enchaine au clavier.
Priez pour n'être pas parmi mes correspondants. Le cas échéant, bon courage à touffes et à troutes.

Sourire du matin (plutôt rare sur internet en ce moment) en découvrant grâce au blog d'Anniceris (auquel je n'entrave usuellement guère plus que ce qu'un passant lambda décoderait en débarquant nuitamment sur le mien) et à son article "Nul n'est prophète dans sa propre tête" qui fait référence à un blog encore plus criptyque au frontispice duquel je lis une profession de foi dûe au "Pater Taciturnus  (??) que j'aimerais faire mienne, mais c'est pourtant la sienne :  
(si vous avez décodé cette phrase du premier coup vous devriez aller vous faire dépister. Si vous ne l'avez toujours pas encore comprite au bout de trois jours, aussi)

"Ton péché originel c'est d'ouvrir la bouche. Tant que tu écoutes tu restes sans tache"
Pourquoi ce blog ? Je pourrais invoquer pour seule justification la lâche excuse d’Adam : 
 « c’est ma femme qui m’a dit de le faire ». Pour ce qui est du contenu, il s’agira avant-tout d’un exutoire à mon impuissance à faire partager mes enthousiasmes. J’y ferai également part de certaines de mes perplexités, dans l’espoir qu’un visiteur de passage me fasse bénéficier de ses lumières. Pourquoi Pater Taciturnus ? C’est évidemment un hommage au pseudonyme « Frater Taciturnus » utilisé par Kierkegaard. Mais le pseudo original était déjà pris, et j’ai maintenant plus l’âge d’être appelé pater que frater(...)
"Taciturne, fatigué … ça fait envie!
- J’espère!
- On pressent une accumulation de références culturelles destinée à masquer une personnalité assez profondément dénuée d’intérêt …
- C’est exactement cela … vous voulez que je vous cite un passage de Platon à l’appui de cette idée ?"

C'est quand même plus élégant comme déclaration d'intention auto-dévalorisante (si j'ai bien compris, à chaque fois que le mec va faire un article, pour complaire compulsivement à Kirkegaard, il postule qu'il va perdre une bonne occasion de se taire) que moi qui avais démarré ce blog pour soi-disant témoigner de mes progrès dans la lutte contre la cyberdépendance pornographique. 
Pour Pater Taciturnus comme pour moi, le succès de l'entreprise était tout entier contenu dans les prémisses, comme les métastases sont en germe de soja dans le mélanome, comme on s'entend parfois  répondre dans les restaurants asiatiques où l'on avait ses aises, par la patronne soudain dévêtue au fond du verre de saké une fois vidé, quand on l'interroge sur la recette de l'ingrédient secret. 
Pour en revenir à la consommation de la chose littéraire, de loin préférable au radotage interné sur internet, le temps que je parvienne à affirmer que les libraires sortaient renforcés du Covid, ils avaient déjà tous refermé leur échoppe. En se félicitant d'avoir fait plier la Fnac, les espaces Cthulhurels Leclerc, et même le rayon livres de mon Super U, qui est depuis tout à l'heure sous une bâche. 
Je le sais parce que Tyler Durden a monté une brève là-dessus au journal régional ce midi. 
Du point de vue subjectif des livres eux-mêmes, qui dépérissent puis succombent assez vite de n'avoir pas été lus, c'est loin d'être une victoire, bien qu'ils aient refusé de répondre aux questions de notre reporter dépêché sur place.

Charlie Hebdo reste en vente et se pavane sur les présentoirs presse.
Une loi va sans doute être passée cette nuit pendant qu'on dormira, enfin, surtout vous,
pour rendre son achat et sa lecture obligatoires, avec questionnaire de contrôle
des connaissances corrigé par Darmanin en ligne,
et gare aux antisèches griffonnées au dos de la dérogation...

... mais les livres sont désormais interdits à la vente. Sauf sur les plateformes.
Enrichir Jeff Bezos au détriment du commerce de proximité,
c'est désormais envoyer un message fort au gouvernement.
Cherchez l'erreur. 

Il ne faudrait quand même pas accabler Emmanuel Macron, cet homme actuellement obligé de :
- défendre Charlie Hebdo et le droit au Blasphème jusqu'au Liban, s'élevant courageusement contre l'Arabie entière après leur avoir vendu des armes très performantes.
- de réinjecter des milliards qu'il n'a pas pour perfuser l'économie réelle et éviter qu'elle clabote tout de suite.
- de filer d'autres milliards aux pauvres pour éviter le chaos autocide (je suis d'accord, ça ne sonne pas aussi bien que ça devrait) dans les rues, bien que les djihadistes soient maintenant eux aussi confinés et réduits à égorger des sacristains virtuels dans des basiliques en 3D
- de faire des concours de testostérone avec Erdogan
- et de replonger le capitalisme marchand et financier sous coma artificiel, sans savoir si on pourra le réveiller une seconde fois, même avec un défibrillateur nucléaire, réanimation qui sera sans doute loin d'être la dernière. 
Toutes choses qu'il n'avait pas du tout prévues de faire au cours de son premier mandat. 
Le soir, quand il rentre du bureau, il a du mal à s'acquitter des trois minutes de méditation de pleine conscience que lui a suggérées son ami et confident Christophe André pour retrouver un peu d'oxygène et lâcher-prise sur ses dossiers dans sa tête.
Tant qu'il est chaud, il devrait peut-être en profiter pour annuler Noël, ou au moins le reporter jusqu'au 14 juillet prochain, avant que la grogne des libraires l'accule à la réouverture, provoquant des contaminations géantes au Musso d'automne (qui n'est pas un champignon) ou pire, au Werber d'hiver (une vraie truffe, mais moins chère au kilo) pour complaire à la frange de son électorat pour qui le shopping en librairie reste d'une urgence vitale, même si le pronostic n'est pas engagé, car après quelques milliers d'heures de vol sur des simulateurs de fauche à l'étalage, on peut se bâfrer comme un porc de chien d'infidèle en tchourant tous les livres qu'on veut sur internet. 
Douce Frange, dont je suis fier de faire partie, bien que j'aie peu le temps de lire en ce moment avec tous les trucs qui me passent par la tête quand je lis tous les articles sur le Cioran-19 dans Le Monde sans chapeau. 
Macron m'impressionne donc favorablement, pour une fois. 
Et je préfère que ça soit tombé sur lui que sur un de ses prédécesseurs. 
Il a un peu plus de plasticité neuronale, à mon avis.
c'était la rubrique "on connait pas son bonheur jusqu'à ce qu'on le perde", et ça ne va plus tarder.
Mais alors, quand même, c'est curieux, d'un côté Macron défend Charlie Hebdo, de l'autre le gouvernement interdit la vente des livres. Du coup, acheter Charlie devient un acte politique pro-LRM, mais on peut encore trouver le dernier Emmanuel Carrère en ligne pour faire du Yoga sur Internet, comme disait ma fille à 6 ans quand elle me surprenait sur des sites de pranayama clandestin, ce que ma religion m'interdit de faire.  
Avec tout ça, mes repères sont chamboulés, Blasphémator® ne sait plus à quel saint se vouer, car si on conditionne un chien d'infidèle comme moi à distinguer un cercle d'une ellipse et si on lui montre ensuite des ellipses de moins en moins allongées, à un certain moment, il devient incapable de les distinguer d'un cercle. Il a alors un comportement de névrose expérimentale, et manifeste soit de la stupeur, soit de la rage.
Je n'ai pas de colère en moi, ça ne ferait pas bon ménage avec mes défenses immunitaires, mais je crois que je vais me réinscrire à la bibliothèque, en attendant que ça se tasse.


Avec tous ces stop Angot du petit commerce confiné, 
c'est pas très commode pour la vendre sur le bon coin. 
Surtout qu'en général, les gens m'appellent 
pour savoir si la lampe ne serait pas aussi à vendre.

Déjà rien que le titre,
mes métastases en frémissent d'aise.
Comme la Réalité Réelle Ratée dépasse cette semaine mes rêves de déception les plus fous, dans le peu de temps qu'il me reste à consacrer chaque soir à la lecture, je choisis de confier le ravalement de mon cerveau à de la non-fiction : Malaurie (ma femme m'a retrouvé l'édition de poche des Derniers rois de Thulé, qu'Elle Soit trois fois Bénie, et surtout que Je Vienne à table quand Elle m'Appelle) et Morizot
J'ai acheté son bouquin quand c'était encore autorisé, bien que ça eut été sans doute plus excitant de l'acheter lors du Black Friday des libraires interdit par la Préfecture, mais avec toutes ces histoires je n'ai pas encore trouvé le temps de l'ouvrir. 
Vous conviendrez que j'ai bien fait de proclamer par anticipation, et ce à plusieurs reprises, mon futur silence bloggesque.
Surtout que même si je ne me sens pas plus malade que d'habitude, mes aller-retours fréquents avec l'hôpital sont presque aussi chronophages que ma correspondance privée et publique. J'ai d'ailleurs trouvé dans l' enquête nationale de mesure de la satisfaction et de l'expérience des patients hospitalisés une question portant sur mon niveau de satisfaction de la vie, à laquelle je n'ai pas encore répondu. J'attends d'avoir un jugement plus nuancé, surtout si je trouve une petite infirmière black à l'hosto, qui serait d'accord pour me faire mes injections non léthales.

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