jeudi 9 novembre 2006

La vacuité égotiste de la dérision


Qu’ils se gaussent avec un art consommé du pastiche de la nécrophilie, de la biogénétique, des films de SF des années 50 ou des limites inhérentes à l’autoérotisme, les humoristes n’échappent pas à la futilité de leurs mises en boîte : l’intelligence leur sert à karcheriser l’ignorance, mais après on fait quoi ? Elle est censée briller dans le noir de sa propre inventivité ?
Et si en plus il n’y a personne ? risquait Souchon.

L’angoisse de s’être fait flouer est alors une variante inquiète de la fantaisie déconstructiviste : si on se fait chier à essayer de se tenir debout alors que le néant nous guette et nous avale au bout du compte, alors à quoi bon se raser ?
Et si c’était une arnaque ?
Une telle attitude repose sur un paradoxe : s’il faut attendre l’au-delà pour apprendre qu’on s’est fait trouer le cul, c’est qu’il nous en reste un, donc c’est pas encore l’au-delà. L’odeur de ce genre de peur syllogistique est donc une fois de plus la signature du Malin.
Le Gros.S’il n’y a personne, y’aura eu nous.
…Pas sûr, comme on verra plus bas.
En attendant, brûlons donc les humoristes, les pétochards et les tièdes en nous, même s’il ne reste pas grand monde. Juste avant de céder à cette rage de la destruction, on aura été bien embêtés de trier pour éviter de se détruire soi (le soi qui nous a été donné) alors qu’on voudrait juste détruire le moi (le noeud dans le torchon) et d’ailleurs, le noeud sait très bien jouer sur l’angoisse que sans lui, plus de torchon… C’est pourquoi la rage est préconisée, sinon on n’est pas prèts d’errer dans les ruines, avec notre sac de ciment flambant neuf acheté en promo chez Casto dans une main et notre truelle dans l’autre.

Flo m’accordait son attention sur ce thème l’an dernier : “heureusement, me disait-elle, il y a quelque part chez l’individu l’intuition de sa non-existence (en tant que je). Son mensonge quotidien lui devient insupportable : demain ça ira mieux, demain je serai heureux, j’aurai moins de défauts etc… Comme le dit le bouddhisme, l’existence est souffrance, et il est normal qu’il y ait dans l’individu une tendance qui veuille mettre fin à ce mensonge (…) il ne faut pas culpabiliser de ses comportements auto-destructeurs car ils ne sont que l’autre face du mensonge quotidien. Une face pervertie, certes, mais quand même. Je veux dire par là que tout a sa place, et croire qu’il y a du bon et du mauvais ne fait que perpétuer les problèmes. Il n’y a ni bon ni mauvais, il n’y a que des phénomènes qu’il ne faut ni accepter ni rejeter. Accepter le mauvais, c’est mauvais. Mais accepter le bon, c’est mauvais aussi. Il faut simplement voir comment ils sont liés l’un à l’autre, et comment tous les deux sont, en fin de compte, des mensonges.”
Bon, c’était sa période Karl Renz.
Quand on étudie le marché spirituel, on a tous notre période Karl Renz. Ou U.G., Eckardt Tolle et la mafia des aficionados de la non-dualité
“Il est très bien mais il ne faut en attendre aucune méthode ni aucun enseignement relatif. ” conclut-elle, pratique.
Pour les méthodes et les enseignements relatifs, on sait où aller.
Je change de stratégie. Après tout j’ai moi aussi baratté mon beurre sur des prémisses auto-contradictoires, et l’effet vache-qui-rit me rend tout nauséeux. La station assise devant un écran ne me vaut rien de bon en ce moment, sauf quand un témoignage lu sur le forum des aspirants-dépendus m’inspire quelques mots d’encouragement, voire un fraternel coup de latte. Mon silence retentira donc (avec une réverb graduée jusqu’à 11) comme une victoire assourdissante sur la cyberdépendance.
Sur ce blog, je reste le petit niqué qui n’a pas peur des gros, mais ça n’avance pas vite, et mes grimasques me fatiguent.
Je reviendrai donc ici consigner uniquement les progrès de ma pratique spirituelle, en espérant que les bénédictions transmises par le lopön fin aout n’ont pas la même date de péremption que les yaourts de flo.

“Pas d’échappatoire! Tu ne peux pas échapper à ce que tu es !

C’est l’enfer, et l’enfer est là parce que tu veux en sortir.»
Sacré Karl, quand même.





Commentaires

  1. Et bé, bien frais le John du jour!!
    Perso, j’en retirerais cette phrase toute simple (noyée dans la masse des phrases moins simples!!!) : “S’il n’y a personne, y’aura eu nous”. A mon avis, c’est une figure de style!! Faire des circonvolutions grammaticales et orthographiques pour planter là, en plein milieu de nos yeux, cette vérité essentielle, lavée de toute figure rhétorique.
    Bref, j’ai rencard avec Déclick jeudi et je suis impatient de ne pas faire mentir ce “y aura eu nous”. Tant pis pour le gonflement de l’Ego…

    Rédigé par: Viking | le 10 novembre 2006 à 09:47|
  2. Demain, ce sera mieux, demain je serai heureuse, demain j’aurai plus de défauts, des trucs nouveaux , tout scrapuleux et gluantesques à capauter dans les mares fangeuses du plasir facile, des trucs que j’aurais pas imaginé aujourd’hui, plus rence que Karl, plus Popper aussi, des vers mouillus qui se glissent sous la peau du zarbi et qui te surprenne toi même. “Non, j’ai pas fait ça quand même, moi, si de gauche!!, j’ai scabré à mort ” quelle vie fabuleuse, collée là sous les draps de la peau de mon amant de St Jean, Jacques, Jules, Antoine, Fernand, Lucette, Nicole, et tant d’autres douces omoplates à me coller l’amour au bide. Vive la gluance brute !!! La Marie Claire des vacances…
    Rédigé par: liebig | le 12 novembre 2006 à 23:10|
  3. Vik, c’était un test ophtalmologiste, tu l’as réussi. Le style défait l’homme en l’enfermant (plus ou moins vivant) dedans.
    Marie-Claire, tu te serais pas fait passer dessus par des gars qui prétendaient être de la Légion ou un truc comme ça ? (cf les comm’ du post précédent)
    Ca expliquerait bien des choses.
    Ce siddhi, j’en fus et n’en suis plus.
    Même si tu me donnes l’occasion de me remémémorer qu’il ne faut jamais dire “tontaine, je ne boirai plus de ton martini-gin” au risque d’avoir à avaler la pilule du lendemain.

    Rédigé par: johnwarsen | le 12 novembre 2006 à 23:40|
  4. Eh bien en voilà du beau du bon J Warsen.
    Je me retrouve comme du co du con avec mes torpilles de 18 cm face au pas que beau “Le John Warsen”: 50 m de haut, 3000 tonnes de concepts mentaux en perpétuel (r)évolution. La base de registre de windows, qui a pourtant rendu fou ses propres concepteurs, eh bien il l’a depuis longtemps donnée à ses gosses pour qu’ils s’amusent avec.
    Je m’aperçois avec effroi que je n’ai pas eu de période Karl Renz ni U.G., Eckardt Tolle.
    Une période Fripounet: ça peut aller?
    (dois-je vous rappeller qu’à 23 ans je jouais encore au Lego)
    Je viens d’envoyer un mail au Ministre de l’Education: il faut étudier John Warsen en cours de Français.
    En oeuvrant pour la France, mon torchon va t-il retrouver son noeud?
    (ou l’inverse)
    John: ton blog se suffit à lui-même.
    Nous qu’on est dans la merde, on a cas le lire. Si tu nous tends la main tu vas t’en mettre plein les doigts.
    Je m’extrait seulement de mon stade anal.
    Mais ce stade anal n’est là que parce que les mômes doivent en sortir…
    Enfin c’est que mon QI de 62 m’a permis de percevoir.
    La question n’est donc pas “être” mais “devenir”, c’est bien ça?
    Et surtout ne pas y retourner, ajouterais-je…

    Le Glaute
    (PS: je suis pas tout le temps là, parfois je suis dans la remise, frapper fort sur la grande porte)

    Rédigé par: KlöD | le 20 novembre 2006 à 10:45|
  5. Je te ferai la réponse de Terry Jones à Eric Idle dans le sketch “Nudge Nudge” :
    Are you trying to insinuate something ?
    http://www.youtube.com/watch?v=zVJOP1RdHC4

    Rédigé par: john | le 20 novembre 2006 à 11:24|
  6. A part moi-même dans ton blog, je n’insinue rien d’autre…
    Mais c’est toi-même qui m’inspire ces propos!
    N’ayant aucune culture, je manipule les concepts que je peux…
    Donc je disais qu’un texte comme celui que tu viens de pondre obtient d’après moi le statut d’oeuvre et à part la postérité je ne vois pas à qui d’autre elle pourrait être destinée.
    Si bien que les torpilles que j’ai l’habitude d’envoyer je peux les remettre dans mon coffret JouetClub: toute stratégie est superfétatoire (http://atilf.atilf.fr/dendien/scripts/fast.exe?mot=superf%E9tatoire) On réagit face à une oeuvre mais l’oeuvre s’en fout.
    L’oeuvre est.
    Cela veut dire que toute critique de cyberdépendance devient vaine face à l’oeuvre: c’est comme si on accusait Picasso d’être picturo-dépendant (mais sors donc un peu de tes toiles devait lui dire sa mère)
    A partir de là mon cher John tu n’as donc plus à te poser de questions sur ton blog.
    Et pour moi c’est une simple façon de m’autocritiquer car de toute façon je m’envoie des torpilles à moi-même en permanence.
    Ceci dit nous pauvres zetres humains il nous faut devenir.
    Etre ne nous suffit pas…
    (ça me tracasse vraiment ce truc-là, l’enfer finalement c’est pas les autres, c’est le futur?)
    Ou plutôt c’est le temps: voilà ce qui différencie l’homme de l’oeuvre… Bon sang c’est incroyable!
    Une autre question ronge le frein de mes derniers neurones: John Warsen serait-il soluble dans son oeuvre?
    Je veux simplement dire: pour quand des petits John Warsen avec la neige qui tombe dessus, des posters, des Tshirts, des badges avec écrit dessus “John Warsen, a new way of life”? (même que t’en as 2 pour le prix de 3: génial!)

    Rédigé par: KlöD | le 20 novembre 2006 à 23:44|
  7. Ce genre d’article est autoréférent, et personne ne peut s’envoler en tirant sur ses lacets. Peut-être que Picasso était autant dans la merde devant ses toiles que moi devant mon blog, mais tu devrais profiter de ton extase pour faire autre chose que m’inciter au mercantilisme. Pour devenir, je n’ai rien trouvé de mieux que de commencer par accepter ce qui est : ni désirer ce qui sera, ni regretter ce qui fut.
    Poil au fût.

    Rédigé par: john | le 21 novembre 2006 à 00:00|
  8. Ne me parle pas d’acceptance, je suis un révolté permanent ( à poil ou pas)
    Rédigé par: KlöD | le 21 novembre 2006 à 00:08|
  9. Peut-être, mais je viens de modifier le commentaire précédent le tien.
    Je conçois que ce soit un nouveau motif de révolte, d’autant plus que je vais me pieuter.

    Rédigé par: johnwarsen | le 21 novembre 2006 à 00:14|
  10. Pourquoi mon commentaire serait-il plus autoréférent que les autres qui parsèment ton blog?
    (je suis pas révolté mais dubitatif)

    Rédigé par: KlöD | le 21 novembre 2006 à 00:52|
  11. il y a méprise, mais elle est lumineuse : je parlais de mon article de départ. Tu devrais créer un blog pour y découvrir les joies de la surdité autofascinatoire®
    Rédigé par: johnwarsen | le 21 novembre 2006 à 10:04|
  12. Ah oui tiens je me suis trompé, je croyais que tu parlais de mes commentaires.
    Rédigé par: KlöD | le 22 novembre 2006 à 22:59| Alerter

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