"Ce que je veux dire, c’est que je ferais une mère abominable. Je suis égoïste, égocentrique… la seule autre personne que je connaisse qui soit plus égocentrique que moi, c’est Carlos.
Il est tellement égocentrique qu’il ne voit même pas à quel point je le suis."
- Gabrielle Solis dans Desperate Housewives -
Le problème des égocentrés qui finissent par suspecter leur cécité comme cause première de la pauvreté du spectre visible, c’est qu’ils s’arrangent souvent pour le formuler dans des termes inexploitables. Pour rester coincé dans le constat il suffit de lui donner une forme tragico-ironique, et le cercle se referme.
Je disais à Flo : "Y’a un truc que j’ai dû rater : ça fait 20 ans que je lis des trucs qui me persuadent de l’irréalité du moi, et ça n’a fait que le renforcer.
-C’est normal. Le mot important c’est "persuadent". Le moi se renforce en se persuadant de n’importe quoi, y compris de son inexistence. Comme Mr Smith dans Matrix. Au lieu de combattre les gens, il les transforme en lui. Donne de l’anti-moi au moi, il le transforme en moi. Magique !"
Le Moi est comme un bulbe qui refuse de germer, alors qu’il s’est amplement prouvé qu’il n’arrivait à aucune satisfaction digne de ce nom par les voies de l’égoïsme. Il lui faut d’après les traditions un paquet d’existences foireuses avant de cesser de faire son boudin et de se mettre au boulot.
Sans parler de l’épineux problème des scènes de cul dans les films normaux, qui devient très tendance. D’un côté c’est louable d’arracher la représentation de la sexualité aux griffes du porno qui en détenait le quasi-monopole, de l’autre y’a pas mal de dépendants qui vont flipper s’ils vont au cinéma ces temps-ci. Excellente occasion pour repérer les éventuelles émotions qui s’élèvent dans le cadre d’une fiction non-pornographique, ou le cas échéant de tester ses capacités à évacuer la salle en cas d’incendie.
Cyberdépendance virtuelle, auto-addiction, rédemption de l’objet fascinatoire, progrès dans l’intention de pratiquer le bouddhisme.
jeudi 8 juin 2006
Bulbes
mercredi 7 juin 2006
Un truc avec la mère
Ayant pris avant-hier l’initiative courageuse d’aller acheter des sandales d’été à ma fille, je me retrouve dans la galerie commerciale d’Auchan. Tiens, je vais acheter des clopes, n’ayant pas encore tenu ma promesse de restopper, même si j’ai vaguement l’impression que ça nuit à mon intégrité. Auchan est le seul centre commercial du coin à intégrer un tabac-journaux en son sein, loué soit-il.
Me voici au rayon des revues. La couverture de l’Echo des savanes du mois de juin arbore “la copine du mois”, une black qui a l’air ravissante de dos et qui a tôt fait de raviver le souvenir enfoui guère profond d’une autre dont j’ai pu croire il y a quatre ans qu’elle allait me permettre de voir “le nombril des femmes d’agent” sans en mourir comme dans la chanson.
Oh là là, heureusement que ma fille me tire par la manche, j’ai failli ouvrir ce magazine pour voir si elle ressemblait à celle que j’ai failli voir de très près en 2002.
Je suis con moi ou quoi ? Si je commence à ne plus accepter mon impuissance devant un stimulus qui me rentre dedans comme dans du beurre, je suis mal barré.
D’ailleurs, c’est quoi ce délire avec les blacks ? Cette fixation, je peux la dater précisément : en 94, j’ai noté quelque part “Croisé une Valérie P. noire dans le métro ce matin. J’ignorais qu’elle existait aussi dans ce coloris. A l’angle d’un couloir, elle s’admirait dans une grande glace murale, visiblement très satisfaite de son apparence. Comme je la comprends ! ”
Et c’était parti. La Blackette n’était pas plus inaccessible que Valérie P., mais pas moins. Valérie P. avec qui j’ai entretenu une relation épouvantablement coupable et clandestine pendant des années, et je n’ai jamais pu me faire à sa rouerie candide, mais je n’ai jamais pu m’en défaire non plus, Dieu me tripote. J’ai toujours pensé que si je m’engageais dans une vraie relation avec elle, au bout de trois semaines elle m’arracherait le coeur avec un couteau à huitres sans se départir de son adorable sourire, alors j’ai préféré passer mon temps à me le lacérer tout seul à force de ne pas tenter quelque chose. Et puis, j’étais déjà engagé ailleurs, avec quelqu’un qui avait l’air d’avoir la tête sur les épaules, et c’était plus rassurant. Vouloir concilier les besoins d’aventure et de sécurité est une mauvaise idée sur le plan affectif.
J’ai rompu tout lien avec Valérie P. depuis quelques années, comme si je m’extirpais d’un cancer, mais avec moins de soulagement.
Etre aimé d’une femme noire imaginaire, alors que je suis même pas foutu d’être aimable par la mienne, qui est blanche et réelle.
Quelle blague ! ça me fait penser à un vieux sketch des monty python.
Bref, ma dernière rechute date de huit mois, mais j’ai l’impression que c’était la semaine dernière. J’ai peut-être découvert sans le vouloir le secret de l’éternelle jeunesse, qui se confond alors avec celui de l’éternelle puberté, ce qui expliquerait tous ces conflits d’intérèt avec mon fils de 14 ans.
Ce matin la première pensée qui s’est pointée c’est “j’ai plus d’intimité avec mes souvenirs qu’avec ma femme, pas étonnant qu’elle n’ait pas souvent envie de faire l’amour alors qu’eux sont toujours prêts à tout”. Ca ne me préoccupe pas plus que ça, je veux dire que c’est là, à clapoter quelque part, avec tout le reste, et que ça ne mérite pas l’attention que je lui consacre sauf à vouloir augmenter la hauteur des vagues.
“Une photo de facture donne le mal du pays” chantait Jonasz. C’est à peu près ça. Du coup, je suis allé trainer sur un vieux blog de Flo, et j’ai ramené ça :
Ted écrit :
En fait, le remède au sentiment de fusionnalité, comme tu l’appelles, serait peut-être, de se convaincre de l’impermanence des phénomènes. Faire une sorte de cure de désintoxication pour comprendre et expérimenter que notre attente d’une identité “qui dure” sera déçue tôt ou tard.
Quand on constate que le lien de l’attachement pend dans le vide, la souffrance est au rendez-vous. On revient dans la ville de son enfance et la vieille ferme près de laquelle on jouait a été rasée. On souffre. Alors, on recrée un objet d’attachement mental, un souvenir qu’on idéalise. On écrit un roman : “la vieille ferme”. La critique hurle au génie. Ca y est : on a réussi son coup et immortalisé l’objet d’attachement en le rendant vivant dans la mémoire de cent mille personnes.
Mais en fait, ce n’est jamais qu’une représentation qu’on s’en fait dans notre cerveau. Nous sommes attachés à des objets mentaux en 3 D qui tournent doucement sur leur axe quelque part dans notre tête.
Gautama conseillait de méditer près d’un charnier. En fait, la Voie royale est peut être celle de l’acceptation, accepter ce qui arrive, accepter ce qui repart. Vivre à 100 % l’instant présent et ne pas se lamenter quand la roue tourne.
Dormir dans un palace le lundi et dans un taudis le mardi, en s’adaptant sans état d’âmes, en acceptant.
ETRE SANS ATTENTES.
Par exemple, il semblerait qu’accepter pleinement la perspective de sa mort inéluctable aide à apprécier pleinement la vie.
Quoi qu’il arrive : accepter, accepter, accepter.
Se battre pour faire aboutir un projet, mais accepter toutes les issues possibles. Agir ! mais sans attentes.
Bon, c’est un avis tout a fait personnel, mais il me semble que quand on accepte totalement les phénomènes qui se présentent, une sorte de système presque immunitaire se met en place qui adouci les situations extrêmes et réalise les voeux non exprimés.
Flo répond :
Le problème n’est pas tant l’attachement aux objets matériels qu’aux objets imaginaires. Comme tu le dis “ce n’est jamais qu’une représentation…”. Bien sûr. Mais l’attachement est l’attachement à une représentation, les “objets” sont très secondaires dans cette affaire. Voir qu’ils disparaissent, ça ne change rien. Le palace et le taudis, on s’en fout, puisque l’imaginaire peut faire ce qu’il veut.
Hier, un ami me disait :”Les gens peuvent penser ce qu’ils veulent de moi, ça ne me dérange pas”. Je lui ai répondu :”Pour sûr, tu vis dans ton imaginaire. Tu as juste décalé le problème”. Là, il n’a plus rien dit, et pour cause.
Pour accepter, comme tu dis, on s’appuie sur l’imaginaire. Tout le monde le fait. La pauvre fille qui a une vie de merde se vit en Reine de la Nuit, et tout est réglé. Et cet imaginaire est dans l’instant présent, il n’est ni demain ni hier. C’est ce qu’on appelle s’appuyer sur l’instant présent, ce que font parfaitement les femmes, les enfants et les animaux. Le problème, c’est que le Bouddha ne s’appuie sur rien, et surtout pas sur l’instant présent. Le problème n’est pas de passer de demain à aujourd’hui. Il est de passer de aujourd’hui à rien du tout. Il n’est pas celui d’une identité qui dure dans son objet, mais d’une identité qui dure dans son principe. La saisie saisit des tas d’objets différents mais elle est toujours la même.
C’est pour cette raison que la mort et la réalisation sont très voisines, et que les gens ne veulent pas mourir. Tu me dis qu’accepter la mort aide à apprécier la vie. Ce que je vois autour de moi, c’est des gens qui ne savent pas qu’ils vont mourir, pas des gens qui acceptent la mort.
C’est vrai qu’il y a eu autour de moi des gens qui ont cru qu’ils allaient mourir, assez récemment, et qui n’ont pas eu peur. Je pense simplement qu’ils n’ont pas de conscience de ce qu’est la mort. Je me range assez volontiers à ce que dit Chepa à ce sujet : “la rigidité cadavérique provient de la très grande peur qu’a eu la personne en mourant. Le corps des maîtres reste souple quand ils meurent”. Tu en connais beaucoup toi, des cadavres qui ne sont pas devenus rigides ? Faudrait demander à des médecins légistes, mais à mon avis, il y en a très peu.
Ignorer le problème n’est pas le résoudre, et pour moi les données sont simples. Quand on a pleinement accepté la mort, la vraie, celle du moi, on est pleinement dans l’état naturel, et si on n’est pas encore un bouddha, on va le devenir très vite. Je connais plein de gens qui disent accepter la mort et aucun qui soit même loin d’être un bouddha (je ne parle pas des lamas et autres enseignants du genre). Il me semble qu’il y a là une très grande inconscience, rien de plus. Comment tu fais, toi, pour défusionner de ton imaginaire ? Est-ce que tu as essayé ?
mardi 30 mai 2006
Attentes
Du jour au lendemain, le forum "bonsaï" consacré à la dépendance sexuelle a disparu du Réseau. Il avait été créé par Spirit, jeune padawan des pornodeps et sa compagne, Espoir, qui l’animaient depuis quelques mois dans une relative solitude au milieu d’une poignée de cas désespérés, mais je le fus aussi. Voici leur dernier message : "Espoir et Spirit, fondateurs et administrateurs du forum Bonsaï, ont réfléchi beaucoup ces derniers temps et ont réalisé que leur vie était beaucoup trop virtuelle: forum, blog, etc. Si bien que nous en sommes venus à ne plus voir nos enfants grandir, à vivre la majeure partie de nos journées devant un écran d’ordinateur, chacun dans son monde. Nous avons donc décidé de revenir à une vie plus authentique, plus proche de nos valeurs, plus proche de l’humain. Dans cette optique nous avons donc décidé de fermer le forum Bonsaï de façon définitive."
Je leur ai répondu ça : "c’est pas trop tôt
combien de fois me suis-je retenu de vous suggérer de plier la boutique !
c’était terrible de voir votre acharnement. Mais ce n’était pas mes oignons.
pour l’instant, pour vous deux internet semble un remède pire que le mal (si c’est possible) puisque vous avez réussi à rester "stationnaires" et à vous y enfermer "par amour" l’un pour l’autre et pour en sauver d’autres.
Que vous soyiez arrivés vous-même à la conclusion de l’inefficacité de la démarche me soulage."
Spirit avait recommencé un blog après une ixième rechute, et me demandait un coup de main en mp : "Ce matin, je lisais la littérature des Sexoliques Anonymes et je suis tombé sur cette notion de Parrain. Puisque tu me vois probablement déjà venir, je vais donc aller droit au but: J’apprécie ce que tu écris, j’apprécie ta franchise et ta capacité à évaluer objectivement les choses, j’apprécie ta propension à ne pas ménager outrageusement les illusions d’autrui…. donc j’apprécierais beaucoup que tu acceptes d’être mon parrain.
Vois-tu, je me sens seul, malgré la multitude, je me sens seul malgré les forums, malgré mon épouse, malgré tout. Je ne connais pas beaucoup de sexoliques qui ont fait un bon bout de chemin. Or j’ai besoin d’une personne qui pourra me donner son avis, qui pourra m’accompagner pour que je cesse de me raconter des salades. Sens-toi libre à 200% de décliner cette offre. Peut-être as-tu besoin de te centrer sur ton propre cheminement et je comprendrais cela. Mais si tu considères ma demande, sache qu’elle n’a rien d’un contrat ou d’une obligation. J’ai simplement besoin d’un frère à qui je pourrai écrire dans des moments difficiles (ou heureux) pour partager, demander un avis.
Ne t’inquiète pas, je ne te considère pas comme un sage, un thérapeutre ou un guru… je sais que tu n’as pas toutes les réponses et je présume que tu demeures vulnérable et sujet aux tentations. Mais il reste que tu as fais plus de chemin que moi et en ce sens, ton expérience me serait profitable."
Je lui ai répondu ça : " putain j’allais juste mettre un commentaire sur ton blog, fait chier !
je l’ai lu vite, j’avais envie de te dire que tu y faisais trop d’honneur à ta part sombre, en la jouant dolby stéréo sensurround au lieu de lui couper les vivres.
Que tu n’aies pas de problèmes pour exprimer brillamment tes idées est peut-être ce qui te baise le plus.
ce fut le mien jusqu’à ma premiere rechute sur orroz.
Ca deviendra un avantage plus tard, ou ça tombera tout seul. Depuis, stylistiquement je ne suis plus que l’ombre de moi-même mais mon rétablissement est moins branlant
pour l’instant, je crois que l’expérience te dit de lâcher la souris, non ? quitte à la reprendre plus tard.
si l’hopital est trop près du bar à putes, faut en chercher un autre.
Je continue à m’éloigner de mon ordinateur, qui me fait toujours remonter dans les tuyauteries les mêmes symptômes de fuite du réel, avec ou sans porno.
Alors bien sûr, évacuer le symptôme ce n’est pas résoudre le problème, mais ça va déjà mieux.
Je ne peux être ton parrain : un parrain SA est ce qu’il te faut, mais il faut que tu le déniches dans un groupe SA dans lequel tu iras confronter physiquement ta problèmatique à celle de tes condisciples.
Faut que la souffrance soit plus forte que l’égo pour lâcher prise, et c’est tout le mal que je te souhaite. Sinon, tu peux m’envoyer un mail de temps en temps, ça c’est jouable.
Si ça m’inspire une réponse, elle viendra.
si elle t’aide, tant mieux.
mais j’aurai beaucoup de mal à cesser de me branler à ta place.
Tu comprends ce que je veux te dire ? tu as déjà toutes les infos, et tu les as ressassées plus qu’assez. Si les forums, les mails et le virtuel n’arrangent pas ta situation, je vois pas en quoi mes mots te protègeraient de tes dysfonctionnements.
Tu connais mes gourous : Orroz et Flo. Au moins, avec eux c’est difficile de faire des projections émotionnelles. Lui a démonté les mécanismes intérieurs qui sous-tendent la soumission du cyberprolo envers l’usine à fantasmes, elle ne cesse de pointer ceux qui sous-tendent l’Ego Moderne (qui ressemble fort à l’Ancien).
Je n’ai guère cessé de raconter mes salades : grâce à eux j’y crois un peu moins, c’est tout."
Je leur ai posté ces réponses, mais leurs adresses e-mail ont été prises dans la Grande Dissolution.
Alors je les mets là, au cas où ils se ravisent.
Il est évident que les attentes perdurent bien après la cessation de la consommation du produit. Et alors ? Comme dit Flo, "Internet n’est qu’un symptôme. Si on ne traite pas les causes, avec ou sans internet, ça ne changera pas grand-chose."
Quand je suis devant mon ordinateur, je suis évidemment affairé à me nourrir avec des choses qui n’ont aucune énergie intrinsèque, que ce soit des forums, du mail ou du téléchargement compulsif de produits culturels. Si la soif se pointe, elle sait que ce verre ne sera jamais assez plein, et qu’elle n’arrivera pas à le vider. Essayer de me faire croire que j’ai une responsabilité envers les lecteurs de ce blog, envers moi-même, comme me le soufflait John B Root en parlant du sien ? Sur son blog, on a toujours raison, et c’est pas bon signe. C’est du cinéma mental, qui n’est pas de nature différente de celui de la vie diurne et nocturne, même si son intensité particulière permet de mieux le percevoir.
Si je reste conscient de l’aspect illusoire de toutes ces productions de l’imaginaire, j’en suis un peu plus libre. Elles finissent par se fatiguer, et l’imaginaire va chercher des filons plus rentables, bien qu’il aime rester à couvert.
Et tout ça, c’est des problèmes de riches. La seule chose que nous puissions raisonnablement attendre sans peur d’être déçus, c’est la mort, précédée d’une terreur indicible.
Publié dans porno macht frei |
Commentaires
vendredi 26 mai 2006
Exister
Quand des émotions anciennes émergent alors que je les croyais disparues, je me rappelle la phrase de flo : "Il y a deux façons d’exister : être une star, ou une victime. Les deux à la fois c’est encore mieux. (…) Il y a aussi des gens qui se font des cancers pour ça, pour avoir le plaisir de montrer à tous que leur situation est vraiment terrible, et qu’en plus, ils survivent." En général, après ça va mieux, bien que l’effet lénifiant de telles lectures ne puisse s’inscrire dans la durée. J’essaye de ne pas trop me projeter dessus : des fois, lire flo c’est comme lire un dictionnaire médical quand on est hypocondriaque. Pas le truc idéal. Des fois aussi j’analyse ma réaction à ses articles en repensant à ce qu’écrivait un lecteur de Libé à l’annonce de la mort d’untel : "Je préfèrerais qu’il soit mort du sida car j’ai 43 ans et je fume beaucoup."
Publié dans le bouddhisme pour les nuls |
dimanche 21 mai 2006
Super-guerrier 3000
Il y a un mec que j’aime bien sur le forum des dépendants sexuels, il s’est sobrement intitulé "Super-Guerrier 3000", poste très peu, et l’essentiel de ses messages tourne autour du fait qu’il cultive la respiration profonde, son indifférence à la Pornographie, le calme et la paix intérieure. "En gros, j’ai cessé de donner à la Pornographie le pouvoir de m’asservir, bref je me désintéresse d’elle. Maintenant je m’en moque." Que n’ai-je pris cette voie ! mais il est toujours possible de refaire ses choix quand ils ne nous satisfont plus.
John B. Root m’a répondu : "D’abord, j’ai visité ton site et je l’ai aimé. Ton désespoir métaphysique, ton humour noir, tes délires science-fictionnesques et tes dessins sont beaux. Pardonne le ton un peu aigre de ma réponse à ton film sur mon propre blog aujourd’hui. Mais, dans ma situation d’animateur du joyeux club des amateurs du vrai trou de balle en fleur, je n’avais pas le choix. Je n’en pense, parfois, pas moins. J’ai 47 balais et 12 années passées dans les orifices des filles. J’ai eu le temps de mûrir…"
Il a fait littéralement exploser la fréquentation de mon blog : de trois pelés et deux tordus par semaine, je suis passé à + de 500. D’où mon désarroi de n’être pas encore une publicité vivante pour le rétablissement.
Alors je lui réponds : "je vais finir par penser comme le Pen, que plus on parle de moi mieux c’est, bien que je n’aie rien à fourguer. L’abstinence de porno, c’est un choix perso après avoir constaté ses effets "dévastateurs" sur ma libido et mon regard sur la vie en général. Un peu comme boire de l’eau salée quand on a soif : pas terrible comme résultat.
Ma tristesse et mon désespoir métaphysique (fichtre ! ) préexistaient à mon addiction, lui ont servi d’alibi, et lui survivront peut-être, je sais pas, c’est pas des trucs sur lesquels on a directement prise.
L’abstinence n’est pas non plus ce mot d’ordre à la con qui ne désigne qu’une absence d’autorisation de jouissance. Il faut trouver du fun ailleurs, reprendre son pied sans baisser son froc devant son ordi. C’est le plus dur, mais quel challenge !"
Evidemment, pour ça il faut aussi laisser tomber les métaphores guerrières, les armures et tout le bataclan.
Publié dans porno macht frei |
Commentaires
-
Par effet inverse le blog de John B Root a reçu un visiteur de plus, histoire de voir de l’autre côté du miroir…
Pas top l’idée finalement, y’avait plein de femàpoil partout ! Heureusement, j’avais mon buis pour me flageller…
J’ai tout de même réussi à lire l’intervention de l’autre John.A bientôt, Nicolas.
Rédigé par: Nicolas | le 30 mai 2006 à 07:27| -
c’est pour ça que je me suis tâté avant d’écrire cet article : l’effet le Pen marche dans les deux sens, bien qu’aucun de nous ne soit au FN. Après être allé sur son blog, j’ai révé de rechute, je te promets que ça calme.
Rédigé par: john | le 30 mai 2006 à 20:12| -
Super-guerrier3000 c’est du flan, un gars qui écrit ce qu’il ne vit pas … ça se sent
Rédigé par: Hin Conitho | le 31 mai 2006 à 14:45| -
ben j’sais pas, faudrait lui demander ! tu la jouerais comment, toi ?
Rédigé par: john | le 01 juin 2006 à 20:26| -
Que se soit du flan ou pas, on s’en fout, c’est lui que cela regarde. Lors de mon premier “viandage”, me suis dit, je le dis ou pas ? Si je le dis je vais passer pour un con…
Mais le sevrage tu le fais pour toi, puis pour ta femme, et tes enfants. Pas pour les forumeurs du forum…
Sûr qu’il y en a qui n’affichent pas les vrais chiffres, confondant l’objectif à atteindre et la réalité des chiffres (comme au temps regrettés du Plan Quinquenal), mais qu’importe ?A bientôt, Nicolas.
Rédigé par: Nicolas | le 03 juin 2006 à 10:47| -
Salut, je sais pas comment je suis arrivé ici, mais le voyage ne me déplait pas, carrément pas.
Rédigé par: Bruce | le 27 janvier 2007 à 22:10| Alerter
Meme si je suis pas un cyberporno-toxicomane, je trouve qu’il y a des phrases choquantes par les vérités qu’elles révelent mais aussi par la façon dont tu les exposes.
Sinon je voulais juste dire que le sexe, c’est comme toutes les drogues, plus on en consomme et plus on en a besoin.
samedi 13 mai 2006
Jeannot Bistouquette
…par le plus grand des hasards, je m’appelle John aussi.
Et je viens de travailler avec quelqu’un (je suis monteur) qui a fait ses études de cinéma avec toi, et qui t’a un peu perdu de vue depuis, mais ce n’est pas le propos, c’est le concours de circonstances qui m’a rappelé ton travail.
film Quand je me shootais au porno, j’ai fait un petit film sur le sujet.
J’aimerais que tu le regardes en préambule.
Il t’arrachera peut-être un pauvre sourire. C’est un autoportrait mi-figue mi-raisin.
Contribution à l'étude de la pornographie (version longue et dure) from john warsen on Vimeo.
J’ai cherché dans l’imagerie de cul quelque chose qui n’y était pas, basta.
Ca a été assez hard de me cartonner à ça, et j’ai trouvé plus dur de décrocher du cul virtuel que de l’alcool.
Je suis tombé sur un psy qui avait connu le problème personnellement, et qui a monté un site sur la question.
Je me suis rétabli avec son aide. Je me sens redevable.
Il y a des gens qui ont les yeux plus grands que le ventre.
C’est un peu ton fonds de commerce.
Pourquoi je t’écris ?
Je rêve peut-être, mais vu les accros et les dégâts que le porno génère, je rêve de la petite étiquette "consommer avec modération" sur la bouteille.
"Réservé aux adultes" me semble insuffisant.
Je ne vais pas râler après un marchand d’armes en me plaignant que les produits que je lui ai achetés peuvent blesser. Mais en jetant un oeil sur ton blog, j’ai vu que tu te targuais d’une certaine liberté de ton et ouverture d’esprit sans doute peu fréquentes dans le milieu. Quand tu auras parcouru cette étrange littérature, rédigée par des "victimes consentantes" qui se sont amochés plus que de raison avec l’industrie du cul, peut-être mettras-tu le site d’orroz (ou le forum actuel) en lien sur ton blog ou sur ton site ?
c’est pas grand chose et ça peut en aider plus d’un.
Tu comprendras que je ne peux pas trop trainer sur ton blog.
Pour un alcoolo, il faut boire le premier verre pour rechuter.
Pour un ex-porno dépendant, faut pas trop en voir.
merci de m’avoir lu."
Je ne pense pas qu’on me retrouve avec deux balles dans la nuque dans le coffre d’une DS sur ce coup-là. Ce serait m’accorder un peu trop d’importance. Je ne vois pas non plus ce qu’il pourrait me répondre : il en vit, j’ai failli en mourir.
Je n’ai pas envie non plus de devenir un activiste.
Mais on réfléchissait récemment à ce qu’on pouvait faire, à part radoter sur les forums.
Du coup, j’ai l’impression que je suis encore plus naïf que ce que je pensais.
J’imagine Paul Ricard recevant une délégation d’anciens buveurs venus l’informer de la nocivité de l’alcool, leur manifestant un intérèt de façade en se retenant de rigoler.
Pas grave. C’est fait. Je retourne au jardin.
Commentaires
- l’interview qui m’a donné envie d’écrire à john (je la mets ici parce que sur la page où je l’ai trouvée il y a des photos qui pourraient faire bobo à un public adulte et non sevré) :
En 76 c’était une époque bénie pour le cul, l’année où les films X étaient autorisés. Il y avait plus de films X que de films normaux . Les films étaient vachement bien, la production française avait de la gueule, des films en 35 mm avec des scénarios. Je passais mon temps à me branler dans les salles de cinéma. Des filles comme Marilyn Jess avaient 18 ans, j’avais 18 ans c’était le monde idéal ! On avait l’espoir que ça devienne quelque chose, et puis le censeur est passé avec la loi de finance, et foutu le X dans un petit ghetto, où il est toléré à condition d’être insignifiant.
-Et puis la loi de finance est arrivée, la vidéo qui a définitivement enterré le genre ?
Le X n’est plus fait par des gens du cinéma, mais par des gens qui faisait des fringues dans le sentier et qui ont trouvé un moyen plus simple et plus rigolo de gagner de l’argent.
Ils achètent un caméscope à la Fnac, ils tournent ça chez eux avec une apprentie shampouineuse, ils mettent une belle jaquette et ils vendent ça. Mais c’est pas des films, c’est des produits de consommation sexuelle qui servent à se branler, mais c’est ça qui fait avancer le genre.
-Pour en revenir à ton parcours, tu deviens journaliste, tu écris des bouquins pour des enfants, des reportages…
-Avec une vie de famille, des enfants…Tu as des enfants ?
J’ai vécu marié avec deux enfants pendant 15 ans !
-Alors qu’est ce qui a fait que tu abandonnes une situation plutôt confortable…
Je m’emmerdais ! j’ai eu envie de recommencer à jouer avec des trucs qui m’enthousiasmait tant quand j’étais ado. Ca s’appelle la crise de la quarantaine !
J’ai recommencé à fréquenter en douce les sex-shop, les cinémas X, acheter des cassettes porno Mais mener une double-vie, c’était pas possible., je n’allais pas recommencer honteusement à aimer la pornographie. J’ai donc inventé John B. Root en 95.
-Ca a bien marché. Tu as été le premier à faire des cd rom X…
Ca n’a jamais bien marché.
-Quand même !
Ca n’a jamais bien marché économiquement. Je n’ai jamais su gagner ma vie avec ce métier. Et encore aujourd’hui. Mais ça a été passionnant d’un bout à l’autre….
-J’ai commencé par les cd-rom et puis Canal est venu me voir car ils aimaient mes cd-rom, et ils m’ont demandé de faire un programme interactif diffusé à la télé. On a fait Cyberix, un truc monstrueux ! 24 acteurs en direct, ça a coûté une fortune et j’ai jamais revu l’argent !
J’avais fait un tel trou dans la caisse, qu’il a fallu que je me mette à faire des films, en se disant qu’on ferait peut-être de l’argent. Mais je l’avais pas du tout prévu de faire des vidéos X, je pensais que le marché était saturé. A l’origine la boite que j’avais monté devait produire pour moitié des programmes pour la jeunesse. Mais John B. Root a tout bouffé !
-Dans les dernières interviews que j’ai lues, 2004 n’avait pas l’air formidable.
Ca a été la pire année d’existence de la boite. Tous nos marchés sont tombés. Canal ne diffusait plus nos films, le retour de l’ordre moral a fait que toutes les chaînes ont arrêté de se lancer dans des projets. Le carnet de commande était vide. On ne payait même plus le loyer, c’était une année épouvantable. On s’en sort peu à peu.
-Tu me diras en ce moment c’est plutôt la crise pour tout le monde. Tous les professionnels se plaignent.
Oui mais c’est leur faute. A force de pratiquer une politique de marchand de fruits et légumes, de vendre n’importe quoi avec des belles jaquettes, ils ont tué le marché. Maintenant ils ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes. Je l’avais écrit il y a cinq ans dans porno blues, et on y est. Le marché est mort.
(…)
-Et les films du genre extrêmes uro, scato…
Toutes ces franges du porno sont absolument indispensables. Si le porno arrête d’être salissant, faut qu’il arrête complètement.
-Alors toi, tu pourrais faire un film scato ?
Moi je peux tout filmer s’il y a du plaisir. Je ne vois pas pourquoi je ne tournerai pas du scato, du dégueu, du SM si je connais les codes. Si un couple prend un vrai plaisir, je ne vois pas pourquoi je ne le tournerai pas. Je ne suis pas raciste envers les sexualités ! Par contre je ne le mettrai peut-être pas sur le site, pour ne pas choquer les visiteurs. Ou alors avec un gros avertissement !
-Et les films de viol ?
Ah non, certainement pas. La seule chose qui compte est le plaisir. Le SM c’est encore autre chose, c’est un choix.
Mais même si ça amuse la fille de faire semblant de se faire violer, ça fout trop de merde dans le crane des mecs. Il ne faut pas que l’on croie qu’on peut imposer le plaisir.
-Et les films d’inceste ?
Non. Dès qu’on mélange le sexe avec du pouvoir ou de l’argent, on tombe dans la prostitution, la pédophilie, le viol… Le sexe ça ne se mélange avec rien d’autre, ça se mélange avec du plaisir.
-Pourtant beaucoup d’éditeurs Francais le font.
Ca fait un tort considérable au métier. Cet automne, tout le monde parlait de ces cassettes de viols qui nous ont attiré les foudres. J’ai passé mon temps à me défendre à la télé contre des gens qui disaient c’est parce que le porno est autorisé qu’il y a des viols dans les banlieues. Il faut arrêter avec le sexe non-consenti parce que c’est la pente glissante. Faire croire qu’une nana prend du plaisir parce qu’on la viole…on est dans le pourri.
-Maintenant que tu es présent sur internet, que penses-tu de l’accès des mineurs aux sites X ?
Il y a des solutions, il y a des moyens, mais c’est un vrai problème. En France, le législateur ne veut pas trancher. On vit de la tolérance du législateur, on est dans un pays de Tartuffe ! Aux Etats-Unis, ils ont tranché : l’utilisation d’une carte de crédit fait preuve de majorité.
L’outil de filtrage il existe. C’est comme à la télé. Si les parents utilisaient le code parental de leur décodeur les gamins n’auraient pas accès aux films.
Rédigé par: john | le 13 mai 2006 à 20:30| Alerter - Ben en fait ça pose un vrai dilemme. Sans les gens comme toi, je serais à la rue. Je vois bien qu’il y a des pauvres gars qui m’achètent toutes les videos. Mais si le salut de leur âme doit me ruiner, je n’ai pas assez de compassion pour ça. Si je faisais un bel héritage, j’arrêterais de vendre ça. Mais pour le moment j’ai rien et pas de retraite quand j’aurai 60 ans. Envoyer mes clients sur le forum d’Orroz serait un véritable luxe. Tu vas me dire que je pourrais faire un travail honnête. Mais si je travaille, je ne peux pas pratiquer. Le salut de mon âme passe par la damnation de celle des autres, cev qui est assurément étrange… Alors que faire docteur ?
Rédigé par: flopinette | le 14 mai 2006 à 09:04| Alerter - “Le salut de mon âme passe par la damnation de celle des autres” : si tu poses l’équation en ces termes, je ne vois pas non plus comment la résoudre. D’ailleurs je me demandais comment tu t’en dépatouillais, mais je n’ai pas pensé à toi en écrivant ça. Et pourtant, les rapports entre Jeannot Bistouquette et Flo Pinette sont maintenant clairs
il y a quelques semaines, tu m’écrivais “Pour information, ce que je mets sur mon site ne présente pas le moindre
intérêt à mes yeux. Mais comme il en présente pour d’autres et que ces
autres sont prêts à payer, et que ces vidéos sont faciles à faire, je ne
vois pas pourquoi je me ferais chier à bosser 35 heures par semaine pour
gagner une misère alors que je peux gagner plus en ne foutant presque rien.” C’était peut-être écrit un peu vite, mais je prends ce que tu me donnes dans l’état où c’est.
J’ai lu sur le blog de la vache cosmique : “Comme l’enseignent les Maîtres Kadampas, l’imbécile est une bénédiction : il vous enseigne la pitié”.
Mais lui, il apprend quoi ?
Et un jour tu as écrit “si les gens savaient ce qu’est la compassion, ils découvriraient que c’est exactement le contraire de ce qu’ils pensent. C’est à l’exact opposé. Comme la spiritualité.”
Est-il plus charitable de parler de maladie ou de stupidité localisée à l’endroit de ces “pauvres” dépendants ? Il y a longtemps que certains sites de culs référencent en lien les Sexoliques Anonymes. Ce n’est pas plus choquant ou hypocrite que “fumer tue” sur les paquets de clopes. L’avatar d’un copain sur le forum dépendance sexuelle, c’est une petite phrase encadrée de noir : “le porno nuit gravement à la santé mentale.” Dans notre monde, l’information et le profit ne sont pas à une incompatibilité près.
De toute façon, nul espoir de guérir les malades sans leur concours actif. Entre rendre l’information accessible et scier la branche sur laquelle tu es assise en lotus, il y a de la marge.
Rédigé par: john | le 14 mai 2006 à 15:18| Alerter - Ah oui tiens, ça pourrait passer pour de l’humour. Cela dit ma clientèle ne parle pas français à 90%.
Rédigé par: flopinette | le 15 mai 2006 à 02:13| Alerter - bonne occasion de participer au retour du rayonnement intellectuel de la patrie (actuellement rayonnement fossile) en leur expliquant que la “french touch” ça peut aussi s’exprimer par la “don’t touch”… ceci dit, si le branling, ce nouveau sport de l’extrème, nous vient d’outre-atlantique, les mouvements d’abstinents y sont aussi nés, bien qu’ils aient plus de mal à traverser l’océan. Mais ce n’est qu’une question de temps.
En plus, je raconte des bêtises : Orroz est 100% français et n’a pas attendu de faire partie d’un hypothétique “mouvement” pour sauver ses fesses et nous inviter à sauver les notres.
Rédigé par: john | le 15 mai 2006 à 07:38| Alerter - j’ai beaucoup aimé ta vidéo (bonjour, au fait)
Rédigé par: johnlocke | le 23 mai 2006 à 20:55| Alerter
lundi 8 mai 2006
La négativité n’est plus ce qu’elle était
Comme j’hésitais sur la définition du terme, je me suis documenté.
C’est pas l’info théorique qui manque.
La question c’est comment sommes-nous passés de la dépendance envers des personnes réelles (mère, puis compagnes épisodiques ou longue distance) à celle envers des personnes imaginaires ? C’est une histoire d’obscurcissement progressif en zône floue. Pour nous, il faut d’abord manquer s’étouffer dans les voiles émotionnels pour chercher une issue.
Flo me l’a soufflé, il ne s’agit pas de renoncer à la passion mais de renoncer à saisir son objet, ce qui n’est d’ailleurs pas un renoncement puisqu’on a l’occasion de s’apercevoir que l’objet en question est toujours une projection de son propre esprit, et qu’en réalité, c’est Dieu qui s’aime lui-même, à travers sa propre création. Il s’agit donc de ne pas de confondre la mariée avec la robe dont elle est vêtue.Je ne fais pas non plus vertu d’assécher le marécage en instrumentalisant cette noble cause qui nous exalte(1).
Ca serait complètement con de ma part, ce qui n’est ni improbable ni souhaitable. Comme le dit un copain en bonne voie, "c’est pas pire", témoignant ainsi de l’enracinement du truc en nous.
L'ironie désabusée serait alors de rigueur, serait alors de rigueur, si elle n’était le tremplin possible d’une nouvelle débandade, et puis pour l’instant elle est tombée toute seule. Elle m’a permis de dédramatiser, elle m’empèche d’accéder au pardon, seul garant d’évolution.
Le sexolisme sera bientôt un "marronier" (terme qui désigne en argot journalistique un sujet récurrent que l’on peut traiter quand on est en panne d’actu) comme il l’est déjà aux States, où si l’on en croit les spécialistes, "La science moderne nous permet de comprendre que la nature d’une dépendance à la pornographie est chimiquement similaire à une
dépendance à l’héroïne." Moi qui me félicitais d’être passé à côté, j’ai l’air malin.
Je peine à élaborer un discours hors du cadre du sevrage, comme savait le faire notre bon Orroz. Je dis ça comme s’il était mort, mais il peut pas passer sa vie à secourir milliers de fantômes affamés qui s’échouent sur les sites consacrés au problème, qui va sans doute grandissant. Il s’agit de réfléchir à la meilleure manière de rendre un peu de ce que j’ai reçu. Et il va bien falloir s’y mettre : les stratégies déployées par l’industrie du cul en branche pour légitimer son propre discours - un totalitarisme "soft", comme dirait Baudrillard ou je ne sais plus lequel de nos penseurs dépressifs, laissent présager un bel avenir à ce fléau qui n’a guère à se soucier de trouver de nouvelles "victimes consentantes".
On va nous faire le coup du "light", c’est sûr. Et cataloguer tous les "anti" comme des puritains et des coincés du cul. La machine est lancée, et elle est bien huilée.
Nos rangs comptent peu de théoriciens sensibles à ceux qui préparent déjà le Cyber Sex de demain. On n’est pas obligés de laisser le crachoir à Christine Boutin et aux cathos de tout poil, même si certains sont prédisposés à être meurtris dans leur chair. L’abstinence, ce terme peu amène, nous désigne comme pervers repentis, ou renonçants, expression antinomique dont le premier terme est décrédibilisant.
Il faut élargir la perspective.
Il faudrait aussi qu’on soit un peu plus
nombreux à être "en voie de rétablissement" pour se mettre d’accord sur la couleur des drapeaux et des étendards que nous voulons arborer, qui dans cette attente ont tendance à rester jaune devant et marron derrière.
Fin de l’épisode tabac ce soir, j’ai le cerveau et les poumons de la même couleur.
(1) Entraînement de l'esprit Par Sherlock, dimanche 7 mai 2006 à 22:59
Cela pose finalement la question de savoir ce qu'est le vrai respect. Le vrai respect n'induit ni des mots, ni une mise en scène de sa propre image ou de celle de l'autre. Il n'y a pas de sensation d'être comme ceci ou comme cela. En fait, on ne sait pas, l'action est naturelle et il n'y a pas de pensée particulière à ce sujet. Autrement dit, il n'y a ni "respect", ni "non-respect". Il n'y a rien du tout. Car s'il y a quelque chose, il y a moi qui observe la chose, et s'il y a moi, il y a les autres. Pour qu'il n'y ait plus ni moi ni autres, il faut que la chose disparaisse, aussi louable soit-elle.
Chepa prenait l'autre jour l'exemple de la dévotion. "Si vous vous dites "que mon maître est grand et bon", c'est que vous n'avez rien compris aux enseignements du bouddha". Et pour cause. Le premier objet de cette pensée "que mon maître est grand et bon", ce n'est pas mon maître, c'est moi. Si c'était mon maître, j'écouterais ce qu'il dit au lieu de me créer des sensations agréables en m'improvisant auteur d'une pièce dont il serait le héros - car si je puis créer un tel héros, c'est que moi-même je suis quelqu'un de grand et de noble.
Nous en revenons à ce que je disais l'autre jour. On peut soit examiner la pensée du point de vue de son objet, ce qui serait comme examiner une arme sans voir à quoi elle est destinée, soit examiner la pensée du point de vue du penseur dissimulé dans son coeur. C'est ainsi que l'on perçoit que les pensées ne sont pas faites pour décrire le monde, mais uniquement pour magnifier le penseur.
De même, l'art ne décrit pas la nature, ou les choses, mais l'esprit. Si j'écoute une oeuvre à la gloire du communisme (Gayaneh, de Khatchaturian) et que j'en déduis que le communisme est bon, je suis dans une grande confusion. L'artiste, dans son oeuvre, ne fait que retranscrire l'exaltation (la magnification de soi) qu'il éprouve à la pensée du communisme. Toutes exaltations étant égales, il se peut qu'elle soit contagieuse, et que je me retrouve dans un sentiment exalté, qui va générer ses propres images n'ayant probablement rien à voir avec le communisme. L'erreur serait ici de croire que les choses désignées par ces images sont bonnes. Mais en fait, ces images ne font que décrire le sujet qui les crée. Sujet qui disparaîtra avec elles. Il en va de même pour toute noble cause qui nous exalte. Le sujet naît avec la noble cause, disparaît avec elle, et il est le véritable objet de la cause. L'objet de la liberté, c'est moi. L'objet du respect, c'est moi. L'objet de la protection des marsupilamis et des femmes battues, c'est moi. Moi, moi, moi. La réalité est tout autre, et elle est inconnaissable.
Comme le disait Chepa l'autre jour : "Quand je regarde cette fleur devant moi, c'est clair, c'est vide, c'est quelque chose en mon pas rien, mais je ne sais pas ce que c'est".
Commentaires
- Tiens c’est marrant, je voulais faire un post sur ce qui vous a fait passer de la dépendance envers des personnes réelles à la dépendance envers des personnes imaginaires…
Rédigé par: flopinette | le 08 mai 2006 à 23:42| - Par rapport au besoin de travail “idéologique”, nous ne sommes en effet pas obligés de se sentir coincés entre la Marc Dorcel Ideology et Christine Boutin.
Même s’il y a beaucoup de diversité chez les cathos. Et la dernière encyclique du pape, consacrée à l’amour, en a surpris quelques uns en sortant un tant soit peu de ses canons moralistes traditionnels.
On peut travailler sur l’amour, mais aussi sur le refus d’un monde de plaisirs égoïstes (Marx parlait des eaux glacées du calcul égoïste pour parler du capitalisme), ou le sexe est une marchandise ; de tendre la main aux plus faibles (dépendants affectifs), notamment ceux qui sont les plus facilement victimes de logiques commerciales visant à nous transformer en consommatuers prisonniers de nos pulsions.
;-)
Bonne continuation, amigo.
Bruno.
Rédigé par: Bruno | le 11 mai 2006 à 17:42| - flo, j’ai noyé le poisson sur ce coup-là, mais c’est en rapport avec le mariage malheureux de l’idéalisme et de la sexualité, où le romantisme devient un paravent…peu approprié. Si tu te sens de développer, faut pas te priver.
bruno, j’aime bien ta coquille sur les “consommatueurs” qui consomment leur perte. Marx Dorcel aurait-il pu prévoir cet ultime opium du peuple ?
Rédigé par: john | le 13 mai 2006 à 01:39|
“Je leur ai posté ces réponses, mais leurs adresses e-mail ont été prises dans la Grande Dissolution. Alors je les mets là, au cas où ils se ravisent.”
Rédigé par: orroz | le 03 juin 2006 à 16:46|Grâce au “téléphonarabduWeb” j’ai tout su par Bruno et là j’ai lu ton commentaire, donc pas grand chose à ajouter, sauf que je me réjouis de voir que les animateurs de Forums en arrivent aux mêmes conclusions que moi. A un moment donné, il faut lâcher la souris et regarder un peu la vie en vrai se dérouler sous nos zyeux zébahis…
La raison de ces mails perdus dans la nature : ma nouvelle adresse email : orroz@orroz.net
Merci John !
Salut John,
Bon je vais pas te faire tout un roman ici, apparement Orroz te fera suivre un mail que je lui ai envoyé.
Juste pour te dire que j’ai mis un lien vers ton blog sur le mien:
http://halte.mabulle.com/
Et voir avec toi si c’est ok.
Rédigé par: Dora | le 05 juin 2006 à 12:47|Merci!
ben y’a pas de problème. Mais tu sais, les blogs ça tourne un peu en rond
Rédigé par: john | le 06 juin 2006 à 00:43|pour une fois qu’un truc tourne (en) rond, on va po s’plaindre! ;0)
Rédigé par: Dora | le 06 juin 2006 à 19:30|Salut John,
“si l’hopital est trop près du bar à putes, faut en chercher un autre”.
Délicieuse comparaison. J’ai passé près de 5 jours sans stopper devant mon PC et sans surfer. Et, constat ahurissant: je ne suis pas mort. Mes idées deviennent plus claires et je réalise à quel point j’étais dans un cul-de-sac en m’acharnant sur ce forum.
J’ai eu à maintes reprises l’envie de le fermer mais j’avais l’impression que je pouvais aider des gens, oubliant sans doute qu’un aveugle ne peut conduire un aveugle.
J’en suis à considérer des théories très radicales du genre: Internet ne peut absolument rien faire pour le dépendant.
Je crois que le changement s’opère loin de l’écran, près du coeur. Et il arrive lorsqu’il doit arriver. On ne stimule pas le changement en distribuant des Bonsaïs d’or mais en touchant au paroxysme de l’écoeurement face à un comportement inutile et destructeur.
Merci pour ton texte. On garde le contact
Rédigé par: Jean (alias Spirit) | le 07 juin 2006 à 02:04